Mais où se cache notre Cinéma Politica?

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Par Tahia Wan
lundi 2 février 2015
Mais où se cache notre Cinéma Politica?
En tant que lieu d’échange et de réflection, l’UdeM est l’endroit idéal pour la projection de films documentaires engagés.
En tant que lieu d’échange et de réflection, l’UdeM est l’endroit idéal pour la projection de films documentaires engagés.
Apprécié par les amateurs de films documentaires et engagés, le réseau de ciné-club du Cinéma Politica projette des films et des courts métrages à teneur politique d’artistes canadiens et internationaux. Il s’inscrit dans une tradition cinématographique vieille d’une vingtaine d’années et propre aux universités anglophones. Le ciné-club s’est forgé une place dans plusieurs universités francophones, pourtant, l’UdeM semble avoir échappé à cette pratique.

Pour la professeure au Département d’histoire de l’art et d’études cinématogra­phiques Marion Froger, le Cinéma Politica et le Ciné-Campus répondent à deux missions totalement différentes et ciblent des publics tous aussi divergents. « Lorsqu’on va au ciné-club politica, c’est pour regarder des films qui échappent au circuit commercial et que l’on ne verra pas ailleurs, explique-t-elle. Ce sont des films qui sont vus soit dans des milieux politisés, soit dans des milieux activistes. »

L’étudiante au baccalauréat en biologie Laura Melissa Argueta admet que les deux expé­riences sont complètement différentes. « Je suis allée au Cinéma Politica de Concordia pour la projection d’un documentaire alors qu’au Ciné-Campus de l’UdeM, j’y suis allée pour voir un film étranger », dit-elle.

Le concept du Cinéma Politica invite à l’échange, selon le chargé de cours au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques Hubert Sabino. « L’idée que les ciné-clubs soient au sein des universités replace les institutions dans leur sphère éducative et favorise le débat, la discussion et la réflexion », souligne-t-il.

L’étudiante au baccalauréat en enseignement en adaptation scolaire Christine Perry abonde dans ce sens. « Ce qui me plaît, c’est qu’il y a des spécialistes à la fin de la projection qui laissent la place à la discussion pour pouvoir pousser la réflexion plus loin », affirme-t-elle.

L’Université McGill, l’Université Concordia, l’UQAM et l’Université Sherbrooke possèdent toutes les trois un Cinéma Politica. Pour
M. Sabino, la position géographique de l’UdeM est un obstacle potentiel à la création d’un tel ciné-club. « McGill, Concordia et l’UQAM sont peut-être davantage accessibles puisqu’elles sont situées au centre-ville, explique-t-il. Peut-être que les gens ont le réflexe de se rendre au centre-ville pour leurs activités culturelles et sociales. Reste qu’il y a un grand bassin d’étudiants, d’employés et de citoyens autour de l’UdeM et que ces personnes pourraient profiter de la présence d’un Cinéma Politica dans leur communauté. » D’autres initiatives s’apparentent pourtant à la démarche réflexive du Cinéma Politica à l’UdeM telles que le ciné-philo ou encore l’anthropologie visuelle.

Une initiative avant tout étudiante

En plus de nécessiter un local approprié à la diffusion de films, le lancement d’un ciné-club affilié au réseau du Cinéma Politica nécessite un minimum de quatre étudiants bénévoles. Ces derniers doivent être motivés à organiser des collectes de fonds pour payer les frais d’adhésion annuels.« Ce type d’initiative est rarement lancé par les instances universitaires elles-mêmes, affirme Mme Froger. Il faut que cela vienne des étudiants. »

Lorsqu’une demande pour un documentaire en particulier se fait sentir, les Activités culturelles de l’UdeM tentent d’y répondre par l’intermédiaire du Ciné-Campus. « Sur nos six programmations à l’année, on essaie toujours d’inclure des documentaires et d’inviter des experts qui pourront balancer les points de vue », assure la conseillère aux Acti­vités culturelles Chloé Ferland-Dufresne.

Une demande à laquelle répond par exemple la diffusion du documentaire de la réalisatrice américaine Laura Poitras, Citizen Four, qui aura lieu début février. « Ceux qui n’auront pas eu l’occasion d’aller le voir aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal pourront se rattraper au Ciné-Campus », affirmela coordonnatrice du Ciné-Campus, Amélie Michaud.

Malgré tout, certains étudiants regrettent de ne pas avoir un espace dédié aux documentaires politiques. « Je trouve ça dommage de devoir aller dans une autre université pour assister à la projection de documentaires », souligne l’étudiante à la majeure en biologie Laura Melissa Argueta.

« Je pense qu’un Cinéma Politica serait bénéfique pour la vie sociale et culturelle à l’UdeM, autant pour les étudiants que pour les différents employés, explique M. Sabino. Un Cinéma Politica à l’UdeM permettrait d’affirmer davantage la place de l’Université comme lieu de réflexion sur les enjeux sociaux, politiques ou environnementaux actuels ainsi que sur l’art ou le cinéma. » Selon le chargé de cours, malgré la présence de quelques ciné-clubs à l’Université, aucun ne comble réellement l’objectif d’un Cinéma Politica.