Dessiner l’avenir

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Par Émilie Goupil-Nantel
lundi 4 mars 2019
Dessiner l’avenir
(Courtoisie Musée des maîtres et artisans du Québec).
(Courtoisie Musée des maîtres et artisans du Québec).
Penser le design autrement pour concevoir des objets écoresponsables, c’est le sujet sur lequel travaille le professeur au Département de design et d’arts numériques de l’Université Concordia Martin Racine. Son exposition ADN : La vie future des objets s’inspire du mouvement du design spéculatif pour décrire l’avenir des biens de consommation.

«ADN élabore une critique de la direction qu’on prend au niveau de la consommation et de la production des biens manufacturiers, explique Martin Racine. Le professeur de design condamne la rapide obsolescence des objets du quotidien. « Ils ont une durée de vie de plus en plus courte, finissent au dépotoir et créent une pollution énorme », poursuit-il.

Cochercheur sur le projet ADN, le professeur à l’École de design de l’UdeM Philippe Lalande confirme que l’objet industriel peut poser certains problèmes de nature écologique. « En design industriel, on est soumis à la mise au point, à la production de biens matériels, industrialisés, et à des produits souvent en grande quantité, explique-t-il. On est un peu liés au monde de la grande consommation. »

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Raconter le possible

Son projet s’inscrit dans la lignée du courant du design spéculatif (voir encadré). D’après lui, ce courant imagine des caractéristiques qui ne seraient pas forcement applicables aujourd’hui dans l’élaboration d’un objet. Le mouvement permettrait ainsi de trouver des solutions à des problèmes n’ayant pas encore fait réagir.

La perspective privilégiée dans le projet ADN est en revanche un enjeu actuel : l’élaboration d’objets moins polluants. « L’intérêt est de spéculer, de s’imaginer comment les choses pourraient être différentes », indique M. Racine, précisant que cette notion d’avenir possible est au cœur de son projet. Le professeur propose de spéculer sur ce que feront les objets dans le futur, en présentant une exposition où ils sont disséqués sous tous leurs angles.

Des applications concrètes

L’exposition prend la forme d’installations, dans lesquelles des objets illustrent les principes d’un manifeste. Ce dernier est composé de six propositions. Les objets pourraient, par exemple, « déclarer leurs impacts », comme le propose la partie éponyme de l’exposition, en référence à leur empreinte écologique. Dans le volet « Communiquer entre eux », le public est invité à appuyer sur les boutons d’un malaxeur et d’un ventilateur. Les objets répondent par des sons ricaneurs. « On réfléchit de façon un peu poétique, et des fois un peu humoristique, à certains aspects et à certains résultats de ce monde industriel dans lequel nous vivons », explique M. Lalande.

À la station « Être libres », des objets flottent dans des jarres d’eau colorée. Le chercheur Théo Chauvirey, également collaborateur au projet ADN et ancien étudiant de Martin Racine, raconte qu’une forme de vie commence à se développer dans les bocaux. « L’exposition vient rejoindre le monde synthétique et naturel, et là, on a exactement cette démonstration dans les pots », constate-t-il. Le retour à la nature est, selon lui, une solution pour l’avenir des objets.