Un été à la ferme

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Par Pier-Olivier Boudreault
mercredi 24 avril 2013
Un été à la ferme
Geneviève Sylvestre a fait du wwoofing dans une rizière en Thaïlande après son baccalauréat en études internationales à l’UdeM. (Crédit : Courtoisie Geneviève Sylvestre)
Geneviève Sylvestre a fait du wwoofing dans une rizière en Thaïlande après son baccalauréat en études internationales à l’UdeM. (Crédit : Courtoisie Geneviève Sylvestre)

Travailler bénévolement dans une ferme tout en étant logé et nourri: c’est le concept du wwoofing. Une façon de concilier voyage et travail qui, chaque été, offre à des étudiants l’occasion de vivre une expérience à la fois insolite et enrichissante.

 « J’ai passé le plus bel été de ma vie», dit sans hésitation l’ancien étudiant de l’Université de Sherbrooke Benjamin Ouellet, qui a séjourné dans une ferme membre du réseau Worldwide Opportunities on Organic Farms (WWOOF). Pendant quatre mois, il a cultivé des plantes médicinales au Témiscouata, près de la frontière du Nouveau-Brunswick. «Plutôt que d’être employé dans un supermarché à remplir des sacs, j’ai préféré aller à la rencontre de gens qui travaillent leur terre et qui vivent simplement», explique-t-il.

Benjamin a passé un été bien occupé entre les tâches agricoles et les baignades dans les lacs environnants. «Je dormais dans une petite roulotte délabrée, raconte-t-il. Cela ne m’a pas empêché de profiter de mon séjour et d’apprendre énormément sur les plantes médicinales et l’agriculture biologique.» Du riz et encore du riz Après son baccalauréat en études internationales à l’UdeM, Geneviève Sylvestre a travaillé dans une rizière WWOOF en Thaïlande. « Je n’étais pas prête à trouver un emploi à ce moment-là, indique-t-elle. J’étais plutôt en mode découverte et aventure.» Elle explique que son travail était exigeant physiquement.

«J’ai aidé les Lhisus [une tribu montagnarde du nord de la Thaïlande] à couper les tiges de riz, à les transporter, à pelleter les grains pour les mettre dans des sacs et à enlever les impuretés du riz ». Pendant deux semaines, elle a mangé du riz trois fois par jour. «J’avais du riz jusque dans mon soutiengorge !» confie-t-elle

Son expérience en riziculture lui est particulièrement utile dans le cadre de son emploi de coopérante volontaire pour Oxfam-Québec, qu’elle occupe actuellement au Burkina Faso.Elle travaille à promouvoir la culture de riz écologique et durable en zone pluviale afin d’assurer l’autonomie des femmes et des enfants. «Le wwoofing, c’est l’école de la vie, dit-elle. Les relations humaines et interculturelles ainsi que le travail de terrain ne sont pas enseignés à l’université.»

Mauvaise surprise

Toutes les histoires de wwoofing ne sont pas aussi belles. La diplômée en écologie de l’Université de Sherbrooke Hélène Boulianne raconte avoir vécu une mauvaise expérience en Espagne, peu de temps après la fin de ses études collégiales en écologie. «Nous nous sommes retrouvées au milieu de nulle part, sur une route montagnarde, sans point de repère», relate-t-elle.

Le propriétaire de la ferme est enfin arrivé pour conduire Hélène et son amie chez lui. Elles ont vite constaté que la ferme en question n’était qu’un jardin à peine amorcé. Elles ont dû dormir sous une tente, dans le froid, avec comme seule couverture un drap mince. «La maison du propriétaire était une ruine recouverte d’une bâche, se remémore-t-elle. Les toilettes étaient un trou sur une butte, où tout le monde pouvait nous voir.» Les deux femmes ont quitté l’endroit après 48 heures et ont finalement trouvé une autre ferme, qui leur convenait davantage.

Il existe autant d’expériences de wwoofing que de types de fermes. Depuis six ans, l’agricultrice Roxane Beaulieu reçoit des bénévoles dans sa ferme familiale d’ail biologique à Melbourne, en Estrie. « Nous accueillons beaucoup d’étudiants qui sont soit en année sabbatique, soit en congé estival,explique-t-elle. Ils nous donnent un gros coup de pouce durant la période de récolte de l’ail.» Elle ne peut cependant pas uniquement compter sur la présence des wwoofers pour assurer le fonctionnement de la ferme, puisque cette main-d’oeuvre est volatile et variable d’année en année.

Une expérience marquante Si le wwoofing ne dure le plus souvent que le temps d’un été, ses impacts sur les étudiants sont plus durables. «Sans nécessairement les amener à fonder une entreprise agricole, l’expérience encouragera certains à démarrer leur propre potager», assure Mme Beaulieu.

Des vocations naissent ou se renforcent grâce au wwoofing. «J’ai pris conscience de l’efficacité de l’agriculture à petite échelle, explique Benjamin. Si l’on prend en compte les impacts environnementaux ainsi que les coûts de la machinerie et de l’utilisation de pesticides, on réalise que le modèle industriel n’est pas efficace du tout.» Après une maîtrise en environnement, il travaille désormais comme consultant en environnement pour le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.

 

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Qu’est-ce que le wwoofing ?

Worldwide opportunities on organic Farms (WWooF) est un réseau mondial qui regroupe des fermes biologiques et des bénévoles, appelés wwoofers. Ces derniers consentent à travailler bénévolement pour la ferme de leur choix, dans la mesure de leurs habiletés. En échange, les fermiers- hôtes leur fournissent un logement et de la nourriture. Il n’y a donc aucun échange monétaire entre l’hôte et le travailleur.

Les tâches sont variées : récolte, plantation, jardinage, cuisine ou encore guide écotouristique. Le réseau WWooF existe depuis 1971. Au Canada, on compte plus de 900 fermes hôtesses inscrites et plus de 3 000 wwoofers.