Quand la CBC insulte implicitement le cinéma canadien

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Par Anh Khoi Do
mardi 22 février 2011
Quand la CBC insulte implicitement le cinéma canadien

Il y a sept ans, la CBC abandonnait la diffusion aux chaînes câblées des Prix Génie, la cérémonie qui récompense le cinéma canadien, parce que les cotes d’écoute étaient trop faibles. Le 10 mars prochain, le réseau canadien rediffusera l’événement en direct.

Au bout du fil, Christine Wilson, la directrice générale intérimaire de la chaîne d’État, dit que 2011 est LE bon moment pour reprendre les droits de diffusion des Prix Génie. « Cette année, deux films canadiens, soit Incendies et Barney’s Version, sont sélectionnés aux Oscars en plus de l’être aux Prix Génie. Nous (la CBC) pouvons inciter les Canadiens à aller voir leurs films. Pour la cérémonie, nous promettons un bon spectacle et une brochette de vedettes. »

Tel le dieu romain Janus qui regarde à la fois en avant et en arrière, votre humble serviteur a une réaction dichotomique. J’applaudis la CBC, car la chaîne envoie le message que le souci pour notre cinéma doit brûler dans le cœur de tous et non d’une clique de nationalistes culturels. En même temps, la remarque sibylline de Mme Wilson ne laisse pas croire que la CBC a repris sa foi en la promotion de notre cinéma : l’obsession de la CBC pour l’audiométrie, qui l’avait amenée à abandonner les droits de diffusion des Prix Génie en 2004, est toujours mal dissimulée.

Même si Mme Wilson soutient que la chaîne d’État reprend vraiment ces droits, la prise de position de la CBC envoie un message qui me met mal à l’aise. La mention de la présence de deux films canadiens à la prochaine soirée des Oscars sous- entend qu’entre 2004 et 2010 le cinéma canadien ne valait pas la peine d’être promu. Puisque des Américains aiment nos films, nous devrions maintenant avoir l’assurance que notre pays sait bénir le septième art. Plutôt clair comme message.    « Non, nous ne cherchons pas à combattre un complexe d’infériorité culturelle que des Canadiens auraient ou n’auraient pas par rapport aux Américains », se défend Mme Wilson.

Pourtant, peut importe ce que peut croire la CBC, notre cinéma a brillé entre 2004 et 2010. Pensons à la sélection du film canadien Water pour dans la catégorie de l’Oscar du meilleur film en langue étran- gère en 2007. La CBC a-t-elle éga- lement oublié que les prix Génies en 2008 étaient dominés par deux films anglo-canadiens, Away from Her et Eastern Promises? D’autant plus que celui-ci s’est rendu aux Oscars. En 2009, le Génie de la meilleure actrice gagné par Ellen Burstyn, l’interprète prin- cipale du film canadien The Stone Angel, démontre que les acteurs « oscarisés » continuent d’apprécier de jouer dans nos films.

En fait, la CBC pourrait changer son slogan « Canada lives here » en y ajoutant ceci : « when we think it’s worth it ».