Un automne qui ne prend pas

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Par Camille Feireisen
mercredi 11 novembre 2015
Un automne qui ne prend pas
Martine Desjardins était la présidente de la FEUQ de 2011 à 2013. Crédit photo: Martine Desjardins.
Martine Desjardins était la présidente de la FEUQ de 2011 à 2013. Crédit photo: Martine Desjardins.
Quartier Libre a rencontré la leader de la grève étudiante de 2012, Martine Desjardins, pour analyser la mobilisation actuelle des étudiants.

Le 5 novembre, 50 000 étudiants étaient en grève à l’occasion de la manifestation nationale pour un réinvestissement massif dans les services publics, organisée par l’Association pour une solidarité syndicale étudiante. Malgré l’annonce d’un automne chaud, les étudiants se mobilisent moins qu’en 2012, alors qu’ils étaient près de 300 000 à descendre dans les rues de Montréal.

Quartier Libre : Est-ce que le mouvement peine à partir parce que, contrairement à 2012, les objectifs manquent de précision?

Martine Desjardins : Pour donner leur appui, les étudiants doivent se lier à un regroupement collectif précis. On ne peut pas être de tous les bords. Est-ce qu’on agit en éducation, en santé… ? On aurait pu le faire en recherche par exemple : on y va avec un objectif précis selon notre programme. Sinon, on se retrouve avec n’importe quel groupe à défendre nos petits carrés de sable. Ce n’est pas mauvais en soi, mais se battre contre l’austérité, c’est tellement vague. Ce n’est pas non plus la même situation qu’en 2012 même si on veut souvent comparer les mobilisations. Aujourd’hui, il s’agit surtout d’un mouvement d’appui aux travailleurs et, pour cela, il faut savoir leur parler et comprendre leurs revendications.

Q.L. : Est-ce que la multiplication des revendications ne rend pas justement l’organisation plus difficile?

M.D. : Je pense que la précipitation du printemps dernier a un peu miné les chances du mouvement étudiant de repartir en effet. Du côté syndical, il ne fallait pas aller trop vite, notamment pour ne pas perdre les chances d’avoir un réel rapport de force plus tard et puis parce que la loi pose des règles strictes sur les mandats de grève. L’appui étudiant s’est aussi un peu effrité après la vague de désaffiliations en avril 2015 qui a affaibli la Fédération étudiante universitaire du Québec. Les revendications universitaires sont un peu dans le vide, mis à part les associations locales qui ont un peu repris le flambeau.

Q.L. : Est-ce que d’autres facteurs pourraient expliquer la baisse de mobilisation des étudiants?

M.D. : La longue campagne pour les élections fédérales n’a pas non plus contribué à la visibilité du mouvement au sein des universités québécoises. Même au sein des travailleurs, le mouvement reste subdivisé. Il n’est pas séparé ou opposé, mais entre les négociations des infirmières, celles des enseignants et celles des chargés de cours, tout le monde essaie de s’organiser sans contrecarrer les autres et ce n’est pas évident. Il ne faut toutefois pas oublier que, déjà en 2011, il y avait des manifestations contre l’austérité, mais les manifestations citoyennes larges, c’est toujours plus difficile.