Les Grands Vents cherchent un second souffle

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Par Cédric Thévenin
mercredi 19 septembre 2018
Les Grands Vents cherchent un second souffle
Seule une poignée d’étudiants s’est présentée aux auditions le 7 septembre dernier. Crédit Alpha Coulibaly.
Seule une poignée d’étudiants s’est présentée aux auditions le 7 septembre dernier. Crédit Alpha Coulibaly.
L’orchestre d’harmonie Les Grands Vents de Montréal ne jouera pas lors de cette session. Trop peu d’instrumentistes à vent se sont engagés dans cet ensemble qui leur est dédié. Sont-ils de moins en moins nombreux ?

Le directeur de l’orchestre d’harmonie, le professeur agrégé à la Faculté de musique David Martin, voulait réunir 35 musiciens. Il lui en manque les deux tiers. Son groupe est trop petit pour interpréter son répertoire. Cette situation perdure depuis 2012.

Trop peu d’harmonies professionnelles

Certains instrumentistes à vent de l’UdeM ne trouvent pas de place en orchestre. « À la minute où ils sont un nombre supérieur à celui demandé par l’orchestre symphonique, certains n’auront pas de cours d’ensemble, expose le professeur titulaire Jean-François Rivest, chef de l’Orchestre de l’UdeM (l’OUM). C’est le cas par exemple des flûtes. Cette année il y en a 15, comme d’habitude, mais pour seulement trois places. »

Pour le directeur musical et artistique de l’Orchestre à Vents Non Identifié (OVNI) et de l’Orchestre de Jeux Vidéos (OJV), Jonathan Dagenais, le problème reste à relativiser. « Il y a une grande offre d’orchestres d’harmonie privés à Montréal, rappelle-t-il. L’OVNI a un niveau universitaire. Les étudiants de l’UdeM peuvent y obtenir des crédits. Il faut qu’ils en fassent la demande. »

Un marché difficile

Les Grands Vents de Montréal peinent à trouver des candidats et à offrir des débouchés professionnels. Selon MM. Dagenais et Martin, le travail rémunéré est difficile à trouver dans les orchestres à vents à la sortie de l’université. « Il existe toujours des harmonies dans l’armée, souligne néanmoins le second. C’est une piste de carrière. »

Plus généralement, les universités québécoises recrutent de moins en moins d’instrumentistes classiques, particulièrement dans la famille des vents, selon M. Rivest. « L’orchestre d’harmonie est une tradition en perte dans la société musicale québécoise, explique le professeur. L’apprentissage des instruments à vent dans les écoles secondaires a diminué durant ces 20 dernières années. »

Un point de vue que partage la coordonnatrice de la Fédération des harmonies et des orchestres symphoniques du Québec (FHOSQ), Daphnée Bisson. Elle observe une tendance à la baisse de l’enseignement dans les écoles secondaires. « On le voit car on est près du milieu, ça fait partie de notre membership, mais il n’y a pas de données tangibles », regrette-t-elle.

La Fédération des associations de musiciens éducateurs du Québec (FAMEQ) pense pouvoir expliquer cette évolution par la mise en place de la réforme de l’éducation. Elle procède actuellement à un sondage dont les résultats seront affichés cette semaine.

Davantage de marketing

De 2010 à 2012, M. Martin a recruté pour les postes vacants des Grands Vents de Montréal des musiciens provenant du cégep Marie-Victorin et de l’école de musique Vincent-d’Indy. Un partenariat entre l’Université et ces établissements le lui a permis. Cependant, le retrait d’une subvention y a mis fin. Cette année, M. Martin a tenté d’attirer des musiciens de l’extérieur. « Jusqu’à date, il n’y a pas beaucoup d’intérêt », constate-t-il néanmoins.

Le professeur observe en outre que les spectateurs connaissent mieux le répertoire symphonique, composé notamment par Beethoven et Ravel. « Je trouve que c’est triste, car il y a de très belles œuvres pour les orchestres à vents, comme Lincolnshire Posy de Percy Grainger », commente-t-il.

Même l’OVNI, qui interprète aussi bien du jazz que des musiques du monde ou de la musique classique, n’attire pas facilement du public, confie M. Dagenais. « L’orchestre d’harmonie a un petit côté péjoratif », regrette-t-il. Le directeur de l’orchestre d’harmonie observe néanmoins que le directeur des Grands Vents a plus de difficulté à recruter des musiciens que lui. « Il faudrait faire plus de marketing, conseille-t-il. Les gens extérieurs à l’université n’osent pas candidater pour les Grands Vents de Montréal. »

C’est ce que compte faire M. Martin, qui essayera de relancer Les Grands Vents de Montréal à la session d’hiver. « Je vais les promouvoir au sein d’un réseau plus étendu, auprès d’élèves du secondaire », promet-il. S’il souligne qu’il n’a pas de budget, il reste optimiste pour la suite.

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