Hyve-3D: Création en immersion

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Par Léa Bertrand
vendredi 11 décembre 2015
Hyve-3D: Création en immersion
Courtoisie HybridLab
Courtoisie HybridLab
Le nouvel outil Hyve-3D a été présenté au public à la mi-novembre au laboratoire de recherche en design Hybridlab, sur le campus. Initié par le professeur de l’École de design à l’UdeM Tomás Dorta, ce système immersif permet de réaliser des esquisses en 3D et ne nécessite pas le port de lunettes. Il devrait faciliter l’échange et le processus de création.

Acronyme pour « hybrid virtual environment 3D », le Hyve-3D est un nouvel environnement de conceptualisation qui permet de voir les objets conçus en réalité virtuelle. Ces derniers peuvent être importés ou créés via un curseur 3D, par un ou plusieurs utilisateurs. « Le système nous offre l’occasion de travailler ensemble sur un même dessin et de visualiser des esquisses ou des modélisations en immersion à l’échelle », résume l’étudiante au doctorat Sana Bouddhraâ, qui effectue sa recherche à l’Hybridlab via le Hyve-3D.

Le système contient un logiciel développé par M. Dorta, ainsi qu’un support minimaliste composé d’une toile, d’un projecteur et d’une lentille. L’immersion en réalité virtuelle fonctionne par l’intermédiaire de la toile sur laquelle est projetée l’image. « Il y a une projection en anamorphisme [NDLR: en trompe-l’œil], avec une forme concave et sphérique qui donne la sensation d’une perspective réelle », détaille M. Dorta.

L’une des principales innovations réside dans l’absence de lunettes pour vivre l’expérience de réalité virtuelle. M. Dorta y voit un avantage indéniable puisque cela rend l’utilisation intuitive et collaborative. « Les outils de réalité virtuelle sont intrusifs, s’exprime-t-il. Si je mets des lunettes, je ne vous vois plus, je ne vois même pas mon corps ni mes mains, donc je ne peux pas interagir. C’est un objet personnel, qui ne se partage pas. La réalité virtuelle avec des casques, c’est comme avoir un baladeur, c’est seulement vous qui écoutez la musique. »

Plusieurs iPad individuels interconnectés par un ordinateur complètent l’installation. « Travailler de manière collaborative en réalité virtuelle, c’est en soi une innovation, insiste M. Dorta. On travaille avec des ingénieurs, des partenaires et des clients. Ça permet d’interagir avec eux dans la phase initiale et de collaborer entre disciplines. »

Autre innovation importante : au lieu d’interagir avec un crayon ou une souris, l’utilisateur dessine avec un curseur 3D dans l’espace sur un iPad. « C’est plus spontané parce qu’on garde le geste manuel, on n’est pas en train de chercher à savoir à l’avance les dimensions de l’objet pour pouvoir le dessiner, raconte M. Dorta. On peut naviguer à l’intérieur des objets et les déplacer. Une fois qu’un objet est sélectionné, c’est comme s’il était dans ma main. »

L’étudiant en doctorat à l’Hybridlab Davide Pierini effectue sa thèse en psychologie cognitive. Il estime que le processus de création – l’idéation – est favorisé par des systèmes immersifs et collaboratifs comme le Hyve-3D. « Les logiciels d’ordinateur sont moins vecteurs d’idéation, indique-t-il. Tandis que quand on est dans les premières phases du design, c’est spontané, rapide et adaptable. »

Une expérience collaborative

L’étudiante en architecture d’intérieur et stagiaire à l’Hybridlab Asma Alaya vient de terminer une étude sur le codesign pluridisciplinaire portant sur le Hyve-3D. Asma a fait récemment appel à des bibliothécaires, étudiants, professeurs et architectes pour faire de la co-idéation à travers le Hyve-3D, afin d’imaginer le réaménagement de la bibliothèque de la Faculté d’aménagement. « Les ‘‘non-designers’’ étaient très à l’aise, ça stimule vraiment leur créativité », raconte-t-elle.

Sana s’intéresse quant à elle dans sa thèse à la façon de former des designers pour qu’ils soient prêts sur le marché à travailler grâce à des expériences collaboratives. « On a besoin de travailler ensemble pour pouvoir innover, affirme-t-elle. Ce que je propose, c’est de créer des cours transdisciplinaires où les étudiants peuvent travailler conjointement grâce au Hyve-3D ou d’autres écosystèmes représentationnels et leur permettre de ‘‘sketcher’’, de discuter verbalement, gestuellement et graphiquement. »

Le système a été conçu pour le design, mais il trouve une utilité dans d’autres domaines. « On peut s’en servir en médecine pour visualiser l’intérieur du corps, par exemple, ou en cinéma, pour faire du story-board immersif, indique le professeur. On peut visualiser des objets aussi vastes qu’une ville en urbanisme, ou aussi minuscules qu’une molécule en chimie. » Hyve-3D est prêt à être commercialisé et a déjà reçu plusieurs commandes.