Avis de recherche : mauvais payeurs de loyer

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mercredi 7 janvier 2015
Avis de recherche : mauvais payeurs de loyer
Crédit photo : flickr.com/bixmant
Crédit photo : flickr.com/bixmant
Vous est-il déjà arrivé de payer votre loyer en retard ou d’être en défaut de paiement ? Sachez que cette information personnelle pourrait désormais être dévoilée à vos amis Facebook par un mécanisme d’avis de recherche. Cette nouvelle méthode de dénonciation des mauvais payeurs suscite toutefois un questionnement sur la protection des renseignements privés. 
La Régie du logement est un tribunal spécialisé dans le traitement des litiges inférieurs à 70 000$, impliquant les propriétaires et les locataires au sujet de leur bail à logement.

En décembre dernier, l’Association des propriétaires du Québec annonçait la mise en place d’un mécanisme d’avis de recherche pour retrouver les locataires mauvais payeurs reconnus coupables par une décision de la Régie du logement. Ce mécanisme revient à indexer, sur la page Facebook de l’Association des Propriétaires du Québec, les décisions rendues par la Régie du logement.

Cette nouvelle façon de faire pose de sérieuses questions reliées au droit à la vie privée. L’Association utilise ici le recours à l’image et la réputation en ligne des personnes condamnées pour pallier à la difficulté de les rejoindre par voies traditionnelles.

 « A priori, l’information portant sur une personne n’est pas illicite, explique le professeur  titulaire au Centre de recherche en droit public de la Faculté de droit de l’Université de Montréal, Pierre Trudel. Ce n’est donc pas automatiquement une faute de diffuser des informations publiques sur une personne. » De plus, les jugements de la Régie du logement sont déjà disponibles en ligne pour toute personne qui désire les consulter. Cette diffusion de l’information doit néanmoins se faire au nom de motifs légitimes, ce qui implique une absence d’intérêt de nuire.

La légitimité d’un double référencement

Le principal problème vient alors de la légitimité d’un double référencement à la fois sur le site de la Régie du logement et sur une page Facebook, et de la double peine qui peut en découler.

Or, les informations publiées sur Facebook demeurent bien plus faciles d’accès que sur le site de la Régie du logement. Alors que sur le site de la Régie du logement, il faut effectuer une recherche en précisant le nom de la personne sur laquelle on souhaite obtenir de l’information, cette démarche n’est pas nécessaire sur le populaire réseau social. Une liste de noms sera disponible sous les yeux  des lecteurs.

Le partage d’informations et la possibilité d’émettre des commentaires associés à Facebook peuvent également entraîner des réactions très violentes ainsi que la stigmatisation d’une personne.

L’Association mentionne vouloir faciliter l’exécution des décisions et forcer les locataires à être proactifs en cas de difficultés de paiement en contactant leur propriétaire pour prendre une entente. Elle dénonce également la difficulté de rejoindre les locataires après leur départ du logement, et la nécessité de recourir aux réseaux sociaux pour garantir l’exécution de la sanction.

Les tribunaux ont déjà reconnu la possibilité de recourir aux réseaux sociaux pour entrer en contact avec une personne qui ne disposait pas d’adresse connue au Québec, mais qui communiquait régulièrement via Facebook.

Toutefois, lancer un avis de recherche pour les mauvais payeurs peut comporter des risques.  La cyberintimidation qui pourrait en découler risque en effet d’invalider ce mécanisme.