Apprendre en jouant

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Par Cédric Thévenin
mercredi 16 janvier 2019
Apprendre en jouant
Maxime Durand a commencé à travailler pour Ubisoft en 2010. Illustration : Courtoisie Ubisoft. Images
Maxime Durand a commencé à travailler pour Ubisoft en 2010. Illustration : Courtoisie Ubisoft. Images
Plusieurs centaines d’élèves du secondaire ont découvert l’Égypte antique grâce à une version repensée du jeu Assassin’s Creed. À la tête de ce projet, le professeur titulaire au Département de didactique Marc-André Ethier. Il conduit une étude sur l’apprentissage de l’histoire à l’aide des jeux vidéo.

«Personne au Québec n’avait fait ça », affirme l’enseignant au secondaire à l’origine du projet, Mathieu Beauséjour. Il a commencé à planifier ce cours expérimental l’été dernier. « J’ai fait ça par passion pour l’histoire, explique-t-il. J’étais un peu jaloux des projets qui avaient lieu dans d’autres matières. Je voulais permettre un apprentissage plus dynamique. » L’enseignant est convaincu que le jeu vidéo stimule la motivation des adolescents.

« Le but est d’intéresser les élèves, pas juste de les impressionner », promet M. Ethier. En décembre 2018, trois enseignants du collège privé Saint-Sacrement de Terrebonne ont donné six heures de cours d’histoire à 334 élèves du secondaire à l’aide du jeu vidéo Discovery Tour by Assassin’s Creed Ancient Egypt.

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Dépasser le divertissement

Le jeu a été développé par Ubisoft à partir de l’univers de la franchise Assassin’s Creed, les conflits et le scénario en moins. « C’est une visite guidée de l’Égypte ancienne », explique l’historien du jeu vidéo Assassin’s Creed chez Ubisoft, Maxime Durand. Il est possible de visiter les pyramides, la ville d’Alexandrie, de rencontrer Cléopâtre et de découvrir les hiéroglyphes.

M. Durand a aidé une équipe de consultants à effectuer les recherches visant à reconstituer l’Égypte antique. Selon lui, l’univers ainsi conçu est le plus fidèle possible. « Notre objectif est de créer un monde entier, alors on se ressource auprès de l’archéologie et on remplit les trous de la connaissance avec notre imagination », raconte le diplômé en histoire de l’UdeM.

Pour lui, les jeux vidéo peuvent apporter plus qu’un divertissement à leurs utilisateurs, même lorsque leur vision de l’histoire crée la polémique, comme à la sortie de l’opus d’Assassin’s Creed se déroulant lors de la Révolution française (voir encadré). « C’est sain, assure-t-il. Ça permet de se demander d’où vient l’information et si elle est vraie ou pas. » Il souligne qu’outre des informations sur la civilisation antique, Discovery Tour by Assassin’s Creed Ancient Egypt donne des sources et des éléments d’égyptologie.

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Des résultats satisfaisants

L’enseignant se dit satisfait de son projet pilote. « Des choses nous étonnent, déclare M. Beauséjour. Des élèves réussissent très bien aux évaluations sans cours magistral. » Certains ont obtenu de bons résultats à ses quizz, en réalisant seulement les projets individuels, comme un tableau comparatif de l’Égypte ancienne et de la Mésopotamie.

L’enseignant s’étonne aussi du fait que certains élèves, surtout ceux qui ont habituellement les meilleurs résultats, ont préféré travailler à partir de textes, même avec un jeu vidéo à disposition.

Un intérêt pédagogique

« L’intérêt est de montrer que les enseignants peuvent se servir des jeux vidéo s’ils font une bonne planification, explique M. Ethier. On fait une description d’une bonne pratique et des difficultés rencontrées. » Les deux doctorants qui collaborent avec lui ont pu assister aux cours, filmer et effectuer des entrevues avec les élèves avant, pendant et après les exercices. Ils retourneront ensuite en classe pour constater les effets à long terme de l’expérience.

Un bilan contrasté

M. Ethier a déjà démontré que des élèves peuvent apprendre grâce à un jeu vidéo dans une étude menée l’année dernière. Son équipe a comparé l’acquisition de connaissances de deux groupes d’élèves : l’un assistant à un cours magistral, l’autre jouant à un jeu vidéo. Les membres du premier ont retenu 51 % des informations données, alors que les autres en ont mémorisé 44 %.

Selon lui, cette première expérience, qui a duré seulement douze minutes, n’a pas mesuré l’intérêt des élèves ni associé d’enseignant à l’expérience virtuelle. M. Ethier est convaincu que son étude actuelle apportera au monde de l’éducation davantage d’informations utiles. Il espère communiquer les résultats de son étude en avril 2019.

*Cadre21 est le Centre d’animation, de développement et de recherche en éducation pour le 21e siècle.

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