Nouvelles plumes

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Par Manon Lefèvre-Mons
mercredi 12 novembre 2014
Nouvelles plumes
Emmanuelle Poirier-St-Georges vient de publier un roman autobiographique dans lequel elle raconte son quotidien et sa maladie.
Crédit photo: Isabelle Bergeron
Emmanuelle Poirier-St-Georges vient de publier un roman autobiographique dans lequel elle raconte son quotidien et sa maladie.
Crédit photo: Isabelle Bergeron
Se lancer dans l’écriture et la publication d’un premier roman peut être un chemin semé d’embûches et de doutes, à plus forte raison quand on est aux études ou quand on vient de les terminer. C’est pourtant le défi qu’ont relevé récemment Emmanuelle Poirier-St-Georges, Martin Clavet et Alice Michaud-Lapointe, auteurs respectifs d’Une histoire de taxis d’ataxie, ou la dernière illusion, de Ma belle blessure et de Titre de transport. Portraits croisés de trois jeunes auteurs ambitieux.

Lorsqu’un étudiant publie pour la première fois un roman, il y a un travail fastidieux derrière une jolie couverture. «Sur l’échelle des courses olympiques, le roman figurerait du côté des courses de grand fond, le 10000 mètres, ou le marathon, croit le professeur de création littéraire à l’UdeM Pierre Propovic. Il faut donc du souffle, de l’endurance, de nombreux retours sur écriture et tout simplement de la durée.»

L’étudiant au certificat de traduction à l’UdeM Martin Clavet a remporté le 21 août dernier le prestigieux prix littéraire Robert-Cliche qui récompense le meilleur premier roman inédit pour Ma belle blessure, qui a été publié peu de temps après.Dans ce roman, un garçon âgé d’une dizaine d’années raconte dans son journal intime l’intimidation et les violences physiques qu’il subit dans sa nouvelle école. «J’ai écrit ce que j’avais envie d’écrire sans vraiment me poser de questions», indique Martin Clavet.

De son côté, le jeune auteur n’a pas eu besoin de mener un parcours du combattant pour voir son roman publié. «Mon cas est particulier parce que c’est le fait d’avoir gagné un prix littéraire qui m’a permis de faire publier mon roman, explique Martin Clavet. Je n’ai donc pas eu besoin de faire des démarches pour trouver un éditeur. En ce sens, tout s’est fait très simplement et sans grandes difficultés. J’ai eu beaucoup de chance.»

L’étudiante en littératures de langue française à l’UdeM Emmanuelle Poirier-St-Georges s’est quant à elle lancée dans l’aventure de l’écri­ture et de la publication d’un roman auto­biographique pour raconter son quotidien, parfois difficile. Emmanuelle souffre de l’ataxie de Friedreich, une maladie neurologique, génétique et dégénérative, dont elle parle sans tabou dans son roman. «Je me mets devant une page blanche et ça coule tout seul, affirme-t-elle. Certains disent que j’écris comme je parle. Erreur, j’écris comme je voudrais parler, sans la maladie atrophiant ma voix. En gros, l’écriture est la seule forme d’expression où je peux être comme tout le monde, et même me démarquer.»

L’heure des doutes?

De son côté, la diplômée en création littéraire à l’UdeM Alice Michaud-Lapointe a lancé son premier roman le 22 octobre dernier. Titre de Transport raconte plusieurs histoires se déroulant aux abords et dans le métro montréalais. Âgée de 24 ans, la diplômée n’a pas tout de suite pensé au jugement potentiel des gens sur son âge. «À mon avis, il faut penser au texte avant de penser à l’âge de la personne qui le publie, croit-elle. Mais surtout, je pense qu’en tant que jeune, il faut s’assumer dans ce que l’on fait.»

Quand l’écriture de son livre s’est achevée, la jeune femme a pourtant été en proie aux doutes. «Est-ce que c’était vraiment ça que je voulais écrire? Est-ce qu’on entendait ma voix dans ce recueil? Est-ce que ce manuscrit pourrait réellement se transformer en livre? Ce sont toutes des questions que je me suis posées», confie Alice.

Selon Emmanuelle Poirier-St-Georges, son âge ne lui a pas fermé de portes et lui permet même d’avoir une belle authenticité dans son autobiographie. «Les souvenirs sont encore assez frais, assure-t-elle. C’est plutôt et toujours le préjugé de la jeune malade que j’affronte. De prime abord, certaines personnes me prennent pour une attardée mentale et croient que quelqu’un a écrit le livre pour moi ou avec moi.»

Lorsque Martin Clavet a soumis son texte au jury du prix Robert-Cliche, il n’a pas ressenti d’appréhensions particulières. «Les membres du jury n’ont aucune idée de l’identité, de l’âge ou du sexe des auteurs puisque les manuscrits ne sont pas identifiés et de cette façon, aucune discrimination ne peut être faite, explique-t-il. J’ai envoyé mon manuscrit en sachant que le processus de sélection se faisait de façon anonyme, je n’ai donc pas eu à craindre les préjugés.»

Pour en arriver à la publication d’un premier roman, il faut s’armer de patience, selon Emmanuelle. «L’édition au Québec, c’est long, mais si l’on croit en son écrit, il ne faut pas lâcher la patate!» dit-elle. Heureusement, d’autres comme elle y parviennent, et publient des romans qui ont leur place dans les devantures de librairies.

Leur premier roman

Michel Tremblay 
Le Train

18 ans

Victor-Lévy Beaulieu 
Mémoires d’outre-tonneau

23 ans

Réjean Ducharme 
L’Avalée des avalés

25 ans

Anne Hébert 
Les Songes en équilibre

26 ans

Gabrielle Roy 
Bonheur d’occasion

36 ans