La culture générale dans l’enseignement

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Par Angèle Delmotte
mercredi 15 novembre 2017
La culture générale dans l'enseignement
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, lieu de diffusion de la culture à Montréal. (Crédit photo : Wikimedia Commons I Jean Gagnon)
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, lieu de diffusion de la culture à Montréal. (Crédit photo : Wikimedia Commons I Jean Gagnon)
La Commission scolaire de Laval a fait paraître fin octobre une campagne de publicité visant à promouvoir la formation professionnelle. On pouvait lire sur l’affiche : « Pas de temps à perdre, pas de philo, pas de littérature ni d’anglais. Bref, juste ce qu’il te plait. » La publicité a suscité la réaction de l’opinion publique et du monde étudiant.
L’école est une entreprise publique où on ne peut accepter que la culture générale ne soit pas valorisée. L’insensibilité à ce qu’est la culture est inacceptable venant d’une commission scolaire.
Benoît Melançon, Professeur titulaire du Département des littératures de langue française et directeur scientifique des Presses de l’Université de Montréal

Le président de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), Jason St-Amour, remet en cause cette campagne de publicité pour la promotion des diplômes d’études professionnelles (DEP). « C’est une publicité qui a une connotation négative, déclare-t-il. Je ne crois pas que les DEP aient besoin d’aller se battre contre les cégeps pour attirer des étudiants. On est capable de cohabiter. »

Selon le professeur titulaire du Département des littératures de langue française Benoît Melançon, la commission scolaire s’éloigne de sa mission, qui est de donner le plus de connaissances possible. « Ce n’est pas comme cela que l’on valorise un programme, conteste-t-il. L’école est une entreprise publique où on ne peut accepter que la culture générale ne soit pas mise de l’avant. L’insensibilité à ce qu’est la culture est inacceptable venant d’une commission scolaire. »

Des préjugés à délaisser

Jason souhaite revenir sur les stéréotypes établis à l’endroit de la formation générale, parfois perçue comme un processus long et inutile. Il constate que la majorité des étudiants sont pourtant satisfaits d’avoir reçu cet enseignement. « C’est un stéréotype qui est nourri pour rien, affirme-t-il. Se faire dire qu’on perd son temps, ce n’est jamais agréable quand on ne ressent pas ce feeling. »

M. Melançon abonde dans son sens. Selon lui, la culture générale a évolué au cours du temps. Les jeunes ne sont pas moins cultivés ni moins intéressés, bien qu’ils aient des intérêts nouveaux. « La culture d’aujourd’hui est beaucoup plus diversifiée, informe-t-il. Le cinéma ou le domaine scientifique font maintenant partie de la culture générale. Les étudiants ont des intérêts qu’on ne voyait pas auparavant. On ne peut pas se contenter de dire qu’ils ne sont pas cultivés. C’est un réflexe humain, mais je suis contre ce phénomène de généralisation. Quand il y a des idées reçues, le travail d’un intellectuel est de démontrer la nature de la chose. »

Le président de l’Association étudiante du Cégep de Sainte-Foy, Gabriel Boivin, approuve la place prépondérante qu’ont des matières comme la philosophie et la littérature dans un parcours scolaire. « La philosophie nous permet de construire un argumentaire solide, souligne-t-il. Cela me sert beaucoup dans mon quotidien et dans mes activités parascolaires. »

Envisager de nouvelles manières d’apprendre

Pour accroître l’engagement et l’engouement des jeunes face à des contenus plus littéraires, Gabriel propose de diversifier les manières d’apprendre. Il suggère de s’appuyer sur des sujets concrets qui sortent du cadre quotidien ou sur des travaux qui permettent une plus grande implication. Il attache aussi de l’importance à l’exploitation optimale des nouvelles technologies. « Je pense que les étudiants et les professeurs doivent trouver un juste milieu où l’ordinateur, par exemple, peut devenir un réel outil pour apprendre, relate-t-il. C’est comme ça que les étudiants vont y voir un intérêt. »

Pour finir, M. Melançon insiste sur la démocratisation de la culture. « On ne compare ni la même culture, qui est nourrie différemment, ni la même population, indique-t-il. Les outils pédagogiques changent, le rapport aux étudiants aussi et les objets culturels vont nécessairement se diversifier. » Il n’est pas possible non plus, selon lui, de comparer la culture générale d’aujourd’hui à celle d’antan, qui ne concernait qu’une partie élitiste de la population.


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