Se meubler gratuitement

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Par Adil Boukind
mercredi 4 juin 2014
Se meubler gratuitement
(Crédit Photo: Isabelle Bergeron)
(Crédit Photo: Isabelle Bergeron)

La journée des déménagements a pour effet de remplir rapidement les rues de Montréal de meubles abandonnés sur le trottoir. Théoriquement, c’est le moment idéal pour trouver ce dont les étudiants ont besoin. Certaines stratégies et certains lieux permettent de rendre la récolte plus efficace sans avoir à la faire durant la frénésie du 1er juillet.

 IL FAUT toutefois se dépêcher, puisque les autres habitants de la ville en profitent aussi pour tenter de dégoter la perle rare. Récente diplômée du baccalauréat en droit de l’UdeM, Magali Brunelle est une habituée de la récolte des meubles. «Je ramasse souvent des meubles avec mon père et ma soeur pour fournir mon appartement et le sien», commente l’ancienne étudiante. Pour elle, cette pratique se fait à des endroits spécifiques de la ville, qui sont souvent aussi les quartiers les plus aisés. «Je fais souvent le tour dans Westmount et Outremont au printemps puisque les trouvailles sont bien meilleures», ajoute-t-elle.

De son côté, une jeune pâtissière opérant au Vieux-Port, Alice Toulotte, meuble son appartement avec des objets récupérés dans son quartier. «Je récupère très fréquemment des meubles et objets en tout genre, raconte-telle. Je me balade dans le quartier sans avoir pour but précis de chiner, mais je trouve de tout: chaises, vieilles boîtes à outils en fer, ustensiles, bâtons de marche, meubles à rangement pour bouteilles et plein d’autres choses.»

La jeune femme, qui effectue sa récolte à pied, a développé quelques astuces afin d’augmenter ses chances lors de ses excursions. «J’ai mes endroits, je sais où j’en trouverai régulièrement, confie-t-elle. Par exemple, on en trouve souvent devant les appartements en travaux, les gens rénovent et jettent.» Alice récupère les matériaux afin de construire elle-même ses propres meubles; sa table de salon est faite à partir de palettes industrielles récupérées. « Je fabrique aussi quelques meubles, tables, tabourets avec mes trouvailles, décrit-elle. Je les vendrai peut-être un jour, mais en général, je garde les belles pièces pour moi puisque ce sont des objets uniques.»

Une fois le meuble récupéré, il faut souvent le travailler un peu afin de lui donner une seconde vie. «Un bon coup de nettoyage dans la cour, un gros seau d’eau et une brosse, conseille Alice. Je décape le bois au besoin si un meuble est verni et que je n’aime pas la couleur, je repeins pour donner un autre style, une nouvelle jeunesse.» Par ailleurs, les électroménagers ne sont généralement pas des butins intéressants. «Je ne récupère pas d’électroménagers puisqu’ils sont souvent jetés parce qu’ils sont défectueux, indique Alice. C’est très lourd et souvent vieillot.»

Ce n’est pas tout le monde qui adhère à la récupération de meubles dans la rue. Louis Hage, qui a immigré à Montréal il y a quelques années, déplore l’aspect aléatoire et long de la pratique. « Il faut beaucoup de temps et une voiture pour pouvoir ramasser des meubles», critique-t-il. Afin de remédier à ce problème, il a décidé de se tourner vers les sites d’annonces gratuites. « J’ai passé des heures sur Kijiji et Craigslist dans la section à donner, j’ai contacté tous les donneurs et j’ai organisé ma journée pour ramasser le maximum de meubles le jour où on avait un camion», rapporte-t-il.

Pour des raisons sanitaires il ne faut pas récupérer matelas, coussins ou autres meubles en tissus. (Crédit Photo: Isabelle Bergeron)

Pour des raisons sanitaires il ne faut pas récupérer matelas, coussins ou autres meubles en tissus. (Crédit Photo: Isabelle Bergeron)

Tout n’est pas bon à prendre

Le Portail Santé Montréal met en garde la population sur le fait de ramasser des meubles. La principale menace est celle des punaises de lit. Que cela soit pour Magali ou Alice, aucune d’elles ne récupère de meubles comportant des tissus. «Je ne ramasse jamais de meubles qui ont des surfaces coussinées puisqu’elles pourraient contenir des puces [punaises] de lit ou d’autres parasites », assure Magali. Ce type de meubles présente un autre inconvénient. « Les coussins sont impossibles à laver», ajoute Alice.

En revanche, un certain type de chaises rembourrées fonctionne. « Si les chaises sont recouvertes de tissus fibreux, elles sont à éviter, commente Magali. Mais il n’y a pas de problèmes si c’est du cuir. » On privilégiera certains types de matériaux. « Le matériau doit toujours être la première considération, indique l’étudiante. Du bois plein peut toujours être reverni, sablé ou repeint.» Cela permet de donner de nombreuses vies à certains meubles.