Quand le vieux vend mieux que le neuf

icone Debats
Par Etienne Galarneau
mardi 26 janvier 2016
Quand le vieux vend mieux que le neuf
En 2015, les ventes de disques de catalogue s'est portée mieux que celles de disques courants, tous formats confondus. Crédit: Pixabay
En 2015, les ventes de disques de catalogue s'est portée mieux que celles de disques courants, tous formats confondus. Crédit: Pixabay
Le 6 janvier dernier, la firme Nielsen SoundScan a fait paraître son rapport sur les données musicales aux États-Unis en 2015. Celui-ci indique que le nombre d' albums «courants» vendus en format physiques et numériques était inférieur à celui des albums de «catalogue». Il s’agit de la première fois qu’une telle situation se produit, menant à plusieurs haussements de sourcils dans l’industrie.

Le nombre d’albums vendus au cours d’une année diminue depuis le début du siècle, ce qui engendre une certaine crise du marché du disque. Les chiffres, à leur plus bas depuis 2006, indiquent cependant que les albums «en catalogue», dont la sortie excède 18 mois, dépassent de quatre millions le nombre d’albums «courants» vendues. Qu’est-ce que ces statistiques indiquent par rapport à l’état actuel de l’industrie de la musique?

Les modes alternatifs de distribution

L’émergence des modules de distribution de pair à pair (peer-to-peer), comme Napster, vers la fin des années 1990, a alarmé les maisons de disques. À l’aide de ces logiciels, il n’était plus nécessaire pour les mélomanes d’acheter des disques pour satisfaire leurs besoins musicaux. Certains artistes, comme Metallica, ont vu cette réappropriation des technologies comme un affront, mais certains, comme Prince et Radiohead, ont plutôt embrassé ces nouvelles méthodes. Ainsi, de nombreux artistes ont commencé à distribuer leur musique de manière gratuite ou au prix désiré par le consommateur, en marge de l’industrie. Selon la méthodologie de Nielsen, les artistes qui souhaitent distribuer volontairement leur musique gratuitement ne sont pas inclus dans l’étude, puisqu’ils se retrouvent à l’extérieur du marché.

Le marché physique et le canon musical

L’an dernier, une étude menée par The Echo Nest annonçait que les goûts musicaux tendaient à se fossiliser vers l’âge de 33 ans. L’achat de copies physiques de musique est aussi un comportement associé aux générations antérieures aux Y. À la lumière des données de Nielsen, il devient possible de corréler ces deux informations. Une fermeture d’esprit sur le plan des goûts musicaux peut aussi impliquer un désintérêt pour l’exploration de nouveaux modes de distribution. De plus, l’étude ne considère que l’acquisition d’albums et non l’écoute en ligne par plateformes de streaming. L’augmentation de vente d’albums de catalogue peut s’expliquer par un public qui se montre récalcitrant aux nouvelles formes de diffusion et plus enclin à écouter la musique de son passé.

Tel qu’évoqué dans  ma dernière chronique, le nombre de personnages importants de la musique populaire disparus au courant de la dernière année est effarant. Malheureusement, ce genre d’événement amène aussi une explosion des ventes des discographies de ces derniers. Il suffit de constater le nombre de ventes de Blackstar, le chant du cygne de David Bowie, qui n’est pourtant pas son album le plus facile d’approche.

Les musiciens ayant fait des parutions au-delà des 18 derniers mois ont, à juste titre, plus tendance à faire partie des listes d’incontournables des critiques et médias spécialisés. La canonisation de certains personnages associés à un âge d’or de la musique populaire entraîne ce genre de comportements lorsqu’un événement marquant se produit .

Ces conclusions ne signifient pas pour autant que le monde musical est en déclin. L’industrie vie une période de transition et ces chiffres ne font qu’indiquer les voies d’avenir possibles pour cette facette de la culture occidentale. Pour les intéressés, le rapport complet de SoundScan Nielsen est disponible en ligne ici.