À compter du 31 décembre 2025, le fonds de dotation de l’UdeM ne comptera plus aucune action cotée en bourse de compagnie liée au secteur des hydrocarbures. Toutefois, la façon dont les 14,1 millions de dollars ainsi libérés du portefeuille qui en compte 420 millions seront réinvestis n’est pas encore connue.
« Ce n’est pas rien, l’exclusion de tout un secteur, c’est un symbole fort », estime le recteur de l’UdeM, Daniel Jutras, au cours d’une entrevue avec Quartier Libre. C’est d’ailleurs l’ensemble de l’industrie des énergies fossiles qui est visé par cette mesure. « On parle de toute la chaîne : exploration, production, entreposage, transport, raffinage, commercialisation », explique-t-il. Pour l’instant, la liste des actions concernées n’a pas été dressée, mais, selon lui, le principe est clair : c’est la nature des activités des compagnies qui sera prise en compte.
Le désinvestissement du fonds de dotation, ardemment réclamé au cours de la dernière année par des regroupements étudiants et des membres du corps professoral, demeure néanmoins, aux yeux du recteur, un « geste symbolique ». « Envisager tout seul [le désinvestissement] n’est pas suffisant, soutient M. Jutras. Il y a d’autres façons pour nous d’agir sur la crise climatique par le biais de nos investissements et d’envoyer des signaux symboliques sur les principes qui animent l’Université. » C’est pourquoi les cibles de réduction de l’intensité carbone du fonds de dotation, soit 20 % d’ici 2025 et 35 % d’ici 2030, sont maintenues.
Quant à savoir dans quel secteur d’investissement seront réinvestis les dollars ainsi libérés, le recteur a souligné qu’aucun ne sera privilégié. « Plus il y a des règles précises sur l’endroit où on doit investir, plus il est difficile de maintenir un rendement adéquat, estime-t-il. L’idée, c’est d’avoir des critères qui nous permettent une certaine flexibilité et une certaine diversification. » Ces critères sont notamment les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), qui permettent d’évaluer les entreprises cotées en bourse autrement que par la valeur de leurs actions.
« Les coups d’éclat » n’ont pas eu d’influence
Interrogé sur l’influence qu’auraient pu avoir l’occupation du pavillon Roger-Gaudry du mois de mars dernier ainsi que les autres manifestations étudiantes dans le processus décisionnel, M. Jutras s’est montré franc. « La réponse honnête, c’est que le processus était déjà en marche », affirme-t-il. Il précise que la réflexion entourant les scénarios de désinvestissement avait commencé depuis le mois d’octobre 2021.
La porte-parole de l’UdeM, Geneviève O’Meara, souligne qu’une première version de ces scénarios avait été remise au recteur une semaine avant l’occupation. « Je veux être transparent là-dessus, et j’espère que ce sera reçu positivement : le travail était tellement avancé sur cette réflexion-là que l’occupation elle-même n’a pas changé les orientations que nous avions déjà mises en marche », assure le recteur.
Il reconnaît néanmoins que le rapport de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM (FAÉCUM) publié au printemps 2021 et intitulé La transition écologique de l’Université de Montréal a influencé les décisions. « Moi, je suis un gars rationnel, lance M. Jutras. Quand je lis le rapport de la FAÉCUM, qui était très bien argumenté, quand je lis les commentaires formulés par les étudiants, les étudiantes, par des profs, par des membres de la communauté, oui, ça participe à la réflexion de l’administration. […] Mais les coups d’éclat, manifestations, banderoles affichées et occupations [ne doivent pas] diriger les décisions. »