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Les Carabins se disent prêts à accueillir les premiers athlètes transgenres de leur histoire dans leurs équipes. Crédit photo : Benjamin Parinaud.

L’inclusion en compétition

«On trouvait problématique que certains de nos étudiants ne puissent pas accéder aux programmes sportifs, parce qu’on ne savait pas comment prendre en compte leur identité de genre, différente de leur sexe biologique », explique le directeur des opérations du bureau national U Sports, David Goldstein. Selon lui, participer aux championnats permet aux étudiants transgenres d’intégrer une communauté sportive à l’échelle nationale.

À contrecourant du Comité international olympique

La nouvelle politique adoptée par U SPORTS laisse désormais les athlètes universitaires concourir dans le groupe correspondant à leur identité de genre dans chacun des 21 sports que l’organisation chapeaute, et ce, sans égard pour leur sexe biologique. Citant un manque de preuves scientifiques, le comité estime injuste d’imposer un traitement hormonal aux étudiants transgenres. Le rapport du CCES*, sur lequel il se base, affirme qu’aucun lien direct entre les performances sportives et le taux de testostérone n’a été prouvé. En référence, la politique du Comité international olympique oblige les transgenres femmes à se soumettre à un traitement hormonal d’un an minimum avant de pouvoir passer d’une catégorie de genre à une autre.

La nouvelle clause impose seulement aux athlètes de rester fidèles à leur décision pour l’année universitaire en cours et d’être en conformité avec le Programme antidopage canadien.

Une politique bona fide

Le directeur des opérations d’U SPORTS avance que le processus d’assimilation d’une nouvelle identité de genre peut être un travail de longue haleine. Il doute que les étudiants ayant fait cette transition s’amusent à passer d’une catégorie sportive à une autre uniquement pour gagner des médailles. « Notre objectif premier était de leur permettre d’accéder aux programmes sportifs, affirme M. Goldstein. On leur fait confiance pour qu’il n’y ait pas d’abus derrière. »

L’entraîneur sportif non binaire Emmett Lamache abonde dans le même sens. Pour celui qui travaille avec des athlètes transgenres à Edmonton, il importe de miser sur l’honnêteté des athlètes pour s’affilier aux équipes auxquelles ils s’identifient de manière régulière, et non pas à celles qui leur permettraient d’accéder plus facilement à la gloire. « Un championnat universitaire, ce n’est pas juste une ligue pour le fun », prévient l’entraîneur.

Vers l’effacement des genres dans le sport ?

Avant l’ajout de la nouvelle clause d’inclusion des transgenres, la dichotomie des genres était claire dans la politique Équité et Égalité d’U SPORTS. « Les étudiants hommes ne pouvaient participer qu’aux programmes interuniversitaires masculins, et les étudiantes femmes aux programmes féminins », déclare M. Goldstein.

Il mentionne cependant l’exception des femmes qui veulent pratiquer un sport n’ayant une équipe universitaire que dans la section masculine. « Le problème de [l’ancienne] politique, c’est qu’elle ne définissait pas sur quels critères précis on différencie un homme d’une femme, ni dans quelle catégorie placer ceux qui sont en transition entre les deux genres », avoue le chef du bureau d’U SPORTS.

L’étudiant au DESS en société, politiques publiques et santé à l’UdeM et bénévole au sein du groupe LGBT RÉZO, Jonathan Bordet se réjouit quant à lui du fait que la nouvelle politique privilégie l’inclusion à la performance sportive. « Le rapport aux genres est encore plus normé dans le milieu sportif que dans le reste de la société », révèle-t-il, faisant allusion aux équipes sportives rarement mixtes et au modèle de virilité encore bien implanté dans les catégories masculines. Il souligne qu’en incluant les personnes transgenres, la nouvelle politique représente une avancée considérable pour le combat des minorités LGBT et ouvre une porte à l’effacement des genres dans le sport.

*Centre canadien de l’éthique dans le sport, « Créer des environnements inclusifs pour les participants transgenres dans le sport canadien » (2016).

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