Volume 21

Les festivals passent au vert

Esquiver verres de bière, bouteilles d’eau et autres déchets laissés par terre est monnaie courante à la sortie d’une longue soirée dans un festival. La plupart de ces événements ont une politique claire en matière de développement durable, mais ces mesures ne sont pas toujours suffisantes pour éviter les débordements. 

« Sur le site d’un festival, un vendeur a refusé de me vendre un hot dog sans carton, alors que j’allais le jeter quelques secondes après », raconte l’étudiante à la maîtrise en gestion de projets à l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’UQAM, Noémi Ready-Dusseault. L’étudiante adepte de festivals se fait un devoir de disposer convenable- ment de ses déchets, mais elle concède que les infrastructures disponibles sur les sites ne lui facilitent pas toujours la tâche.

Selon la directrice générale du Conseil québécois des événements écoresponsables (CQEER), Caroline Voyer, bien mettre en évidence poubelles et bacs de recyclage est un premier pas, mais il faut aller plus loin. « Dans les grands événements, comme les festivals, on utilise souvent des piles, des néons et des réchauds à gaz en grande quantité, souligne-t-elle. Or, ce sont des matières dangereuses, il faut donc les récupérer et les acheminer vers les endroits où elles pourront être traitées. » La directrice générale du CQEER estime qu’au- delà des matières résiduelles, d’autres critères, comme les moyens de transport privilégiés ainsi que la provenance de la nourriture et des produits utilisés sur le site, doivent être pris en considération. 
 
Le Piknic Electronik a réussi à prouver que la réduction à la source est possible. L’année der- nière, les organisateurs ont instauré un système de consigne qui permet de récupérer, de laver et de réutiliser tous les verres distribués. «Notre motivation était de montrer à tout le monde que c’est possible de consigner les verres, pour que dans quelques années tous les festivals le fassent », affirme le directeur général et cofondateur du Piknic Electronik, Nicolas Cournoyer. Il prévoit intégrer progressivement au projet tous les contenants utilisés à ce festival. 
 

Le Festival international de percussions de Longueuil a aussi posé plusieurs gestes pour transformer ses pratiques au cours des années. «En 2010, nous avons été un des premiers festivals à interdire la vente ou la distribution de bouteilles d’eau en plastique sur le site de l’événement, précise la directrice artistique, France Cadieux. Cette année, il y aura aussi une navette à vélo qui aidera les personnes à mobilité réduite à se rendre d’une scène à l’autre. » 

Mme Voyer confie que les organisateurs d’événements ont plus de pouvoir qu’ils ne le croient pour transformer les pratiques. « Une  compagnie de bière remettait des verres en plastique numéro 6 [NDLR : numérotés de un à sept, tous les types de plastique ne sont pas recyclables. Le meilleur exemple de plastique non recyclable est la styromousse servant à confectionner les gobelets à café ou à thé] qui ne sont pas recyclables avec nos infrastructures actuelles, explique-t-elle. Elle a dû modifier ses pratiques parce que certains festivals se sont unis pour demander un changement. » L’engagement environnemental grandissant de ces événements porte à croire que les transformations entreront dans les mœurs. 

Vert, couleur de l’argent

La diplômée en stratégie de production culturelle et médiatique à l’UQAM et cofondatrice du Festival de bandes dessinées de Montréal (FBDM), Myriam Lalumière, estime toutefois que les défis sont différents pour les petits festivals. « Au début, l’idée c’était seulement de réussir à faire le festival », relate-t-elle.  Encore étudiante, elle a démarré l’événement en 2011 avec un minimum de ressources. Sa surprise a été grande en voyant tous les critères environnementaux demandés par Hydro-Québec en leur formulant une demande de commandite. « Je travaille à la maison et nous n’avons ni bureau ni employé permanent,  indique-t-elle. C’est donc impossible de préparer une politique de développement durable élaborée. » Alors que les grands festivals ont au moins un employé attitré au développement durable, les petits événements comme le FBDM n’ont pas accès aux mêmes ressources en termes de temps et d’expertise.

Malgré le défi supplémentaire que représente la gestion du développement durable, le FBDM tente aussi de modifier ses pratiques. « Notre problème majeur au festival, c’était le papier », avoue la cofondatrice du FBDM. L’impression du programme de l’événement a souvent entraîné des surplus. « Cette année, nous avons développé une application mobile, ce qui réduira considérablement la quantité de papier à distribuer », précise Mme Lalumière.

Selon Mme Voyer, les grands partenaires institutionnels comme Loto-Québec, la Société des alcools du Québec (SAQ) et les caisses Desjardins sont de plus en plus pointilleux sur ce sujet quand ils accordent une commandite. C’est en partie ce qui explique l’engouement des grands festivals pour le développement durable selon la directrice générale du CQEER. 

Partager cet article