À l’interne, certains départements, comme celui d’histoire, cherchent de nouveaux moyens pour attirer des étudiants dans leurs classes. À l’international, l’Université ouvre un bureau en Chine pour consolider ses relations avec ce pays. Au niveau provincial, on observe un ballet particulier.
Menés par le service de l’admission et du recrutement de l’UdeM, des semaines intensives ont eu lieu à Gaspé et Rimouski à la fin du mois d’octobre dernier, à l’aube des inscriptions à l’université. Au programme, on y présente des conférences sur les études et la vie à Montréal.
Ce qui est échelonné sur environ une semaine dans l’Est, avec plusieurs plages horaires disponibles pour répondre aux besoins de la multitude, est présenté en quelques heures dans les divers cégeps de la province. Une chance unique pour les habitants de Gaspé, une fenêtre unique pour ceux de l’Abitibi, de Lanaudière, de l’Estrie et de la Mauricie.
Pourtant, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, les deux régions couvertes par ces « activités spéciales », sont celles où le pourcentage de jeunes entre 15 et 24 ans est le plus faible de la province, à 9,4 % et 8 % respectivement*. Est-ce que l’exercice de recrutement à long terme est le plus efficace dans les lieux où les jeunes en âge d’entrer au baccalauréat sont les moins présents ?
Résistance locale
Le Cégep de Rivière-du-Loup offre une bourse de 500 dollars aux étudiants qui veulent s’inscrire dans les programmes de graphisme, de design d’intérieur, d’arts visuels, de sciences de la santé profil International et d’une des options de sciences humaines. Les frais reliés aux services de résidences sont également couverts. Une seule condition s’impose : il faut venir de l’extérieur de la région du Bas-Saint-Laurent.
On peut y voir une réponse à l’exode rural et une volonté de faire revenir les jeunes en région. Entre 2013 et 2017, on compte une diminution de 13,4 % des jeunes de 15 à 24 ans*. Sur la même période, l’âge moyen est passé de 44,9 à 46,2 ans. On se doute qu’il y a une grande volonté d’augmenter le nombre de jeunes dans le Bas-Saint-Laurent.
Le tango se danse à deux
Avec le campus de Laval, de Saint-Hyacinthe, de Trois-Rivières, de Longueuil, le laboratoire dans Lanaudière et les partenariats avec l’Observatoire du mont Mégantic, l’UdeM a des ramifications un peu partout dans la province. L’exercice de séduction intensif dans l’Est est peut-être signe d’un changement de stratégie. Plutôt que d’aller ouvrir un campus à Matane ou jouer dans les platebandes de l’Université Laval à Percé, on mise sur l’expérience humaine et sur des ateliers qui expliquent comment se déroule la vie dans la métropole.
Ce ne sont pas les étudiants en recherches doctorales qui ont besoin de se faire expliquer la vie en ville, mais plutôt les parents des futurs bacheliers. L’invitation aux ateliers leur est d’ailleurs faite en premier lieu. Est-ce que les régions qui vivent les contrecoups de l’exode rural sont vraiment celles où il faut recruter les prochains universitaires de Montréal ?
Balbutiements d’une relation
Il y a quand même du bon dans cet exercice de séduction. Imaginons un instant que, grâce à des initiatives comme celles du Cégep de Rivière-du-Loup, les institutions postsecondaires de l’Est réussissent à faire venir les jeunes de Montréal dans leur région. Que la jeunesse urbaine, lassée du smog et des embouteillages, souhaitent reconstruire le Québec sur de nouvelles bases et faire un retour à la terre. Que les natifs du Bas-Saint-Laurent rêvent de la métropole québécoise, lieu où tous leurs rêves sont possibles. Est-ce que ce serait le début d’une révolution géoéducative ? Avec un DEC dans le bas du Fleuve, un baccalauréat à Montréal et une maîtrise en Chine, les prochains citoyens du monde sont ici.
Ça vaut sans doute le coup. Passez go, prenez les 500 dollars de Rivière-du-Loup et laissez l’UdeM vous chanter la pomme une fois de plus.
*Chiffres de l’Institut statistique du Québec