Volume 20

(Crédit photo : Pascal Dumont)

Guy Rocher déchaîné

Les divisions n’ont pas attendu pour se manifester au Sommet de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU) le 25 octobre dernier à Montréal. Dès le début de la journée, la conférence d’ouverture donnée par le professeur émérite du département de sociologie de l’UdeM, Guy Rocher, a donné la mesure du clivage entre partisans d’une université publique préservée de l’influence du privé et les tenants d’une approche plus néolibérale.

Invité à s’exprimer sur l’université sur le rapport Parent, M. Rocher, qui en fut membre, a rappelé le passé pour mieux éclairer le présent. Selon lui, le caractère public de l’éducation est actuellement remis en question.

M. Rocher met en cause la «révolution conservatrice» des années 1980 et 1990. Une révolution d’abord caractérisée par «l’emprise du privé aux frais du public», qui se manifeste par le fait que de plus en plus de gens d’affaires siègent aux conseils d’administration des universités québécoises. «Comme s’ils n’avaient pas d’intérêts!» ironise-t-il, mettant sérieusement en doute l’affirmation selon laquelle le privé serait mieux géré.

Il dénonce aussi une nouvelle gestion bureaucratisée, qui laisse peu de place à la démocratie, et appelle à une présence syndicale accrue. «Les syndicats sont les seules institutions démocratiques à l’université», affirme le sociologue.

M. Rocher critique également la réussite personnelle, valorisée par le milieu universitaire au détriment de la réussite collective. « Le savoir est devenu un objet de véracité » dans une économie basée sur le savoir. La question essentielle pour lui est de déterminer « pour qui, et pour quelle intention, est le savoir ? » M. Rocher tient à souligner qu’il ne veut pas «voir l’entreprise comme une ennemie.» Il ajoute que le privé peut constituer «un apport positif au niveau financier, mais aussi intellectuel, par la complémentarité de la recherche fondamentale et appliquée.»Mais, pour cela, «il est important de développer une sensibilité à la déontologie» qu’il trouve insuffisante actuellement.

En guise de conclusion, M. Rocher décoche une flèche aux recteurs. «La Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec ne doit pas être le seul groupe de pression. Le pouvoir des recteurs est exorbitant », dénonce-t-il. Si une bonne partie de la salle applaudit bruyamment, la remarque est accueillie froidement du côté des représentants des recteurs.

 

 

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