Amour, sexe et pouvoir

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Par Charles Lerhe
mercredi 29 novembre 2017
Amour, sexe  et pouvoir
L'étudiante en science infirmières Élise Gullickson-Larouche (à gauche) et l'étudiante en droit Mathilde Romano (à droite) de l'UdeM lors de leur première réunion pour la création d'une association de sensibilisation aux agressions à caractère sexuel à l'Université. (Crédit photo : Laura-Maria Martinez)
L'étudiante en science infirmières Élise Gullickson-Larouche (à gauche) et l'étudiante en droit Mathilde Romano (à droite) de l'UdeM lors de leur première réunion pour la création d'une association de sensibilisation aux agressions à caractère sexuel à l'Université. (Crédit photo : Laura-Maria Martinez)
La ministre responsable de l’Enseignement supérieur, Hélène David, a déposé au début du mois de novembre le projet de loi 151 qui vise à « prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel* ». Le code de conduite annoncé, qui encadre les relations entre professeurs et étudiants, a fait réagir depuis la publication d’un sondage à l’Université Laval.
Quand on pense que plus de 95 % des agressions sexuelles ne sont pas dénoncées, c’est le seul moyen de véritablement protéger la communauté étudiante.
Simon Telles, Président de l’UEQ

Le 10 novembre dernier, l’Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures (AELIÉS) a dévoilé les résultats préliminaires de son sondage concernant les pratiques d’encadrement aux études supérieures. « On souhaite dresser un portrait des pratiques et des réalités des relations d’encadrement à l’Université Laval pour ensuite faire des recommandations à la direction », a indiqué le président de l’AELIÉS, Pierre Parent-Sirois.

Dans ce sondage, réalisé sur une base volontaire et diffusé sur Internet, on y apprend que 58 % des répondants admettent avoir vécu des situations inconfortables ou ressenti de la vulnérabilité, par rapport à leur relation avec leur directeur de recherche.

Le gouvernement québécois obligera les établissements d’études supérieures à adopter d’ici le 1er septembre 2019 une politique concernant les relations intimes entre les professeurs et étudiants. « Cette politique doit prévoir un code de conduite visant notamment à encadrer les liens intimes, amoureux ou sexuels qui peuvent s’établir entre un étudiant et une personne ayant une influence sur le cheminement de ses études », stipule le projet de loi.

Le professeur au Département d’administration et fondements de l’éducation de l’UdeM Guy Bourgeault souligne qu’il y a toujours un lien affectif qui s’installe entre un professeur et un étudiant, qu’il soit positif ou négatif. « Comme tout professionnel, le professeur doit garder conscience que c’est lui, comme enseignant, qui doit faire attention à la qualité de la relation professionnelle, précise M. Bourgeault. Il doit garder le cap sur le but de cette relation, pour aider l’étudiant à apprendre et à se développer comme chercheur. »

Il y a donc une exigence, comme dans tout ordre professionnel qui se respecte, soutient M. Bourgeault. « Concrètement, la part affective est trop souvent minimisée ou masquée, fait-il valoir. Ce n’est pas possible, un rapport interpersonnel dans lequel l’affectivité ne joue pas.» En ce sens, un effort doit être fourni pour être le plus objectif possible, car s’il est indéniable qu’il faille un code de conduite, l’esprit éthique doit également être développé, affirme le professeur.

L’UEQ en commission parlementaire

Présente aux travaux sur le projet de loi, l’Union étudiante du Québec (UEQ) a fait valoir sa position. Au cours de la commission parlementaire, la coordonnatrice aux affaires académiques de l’UEQ, Catherine Grondin, a soutenu que l’association souhaite mettre les personnes survivantes au cœur de la stratégie de la loi.

D’après l’association, il faut interdire formellement les relations entre professeurs et étudiants en cas de lien d’autorité directe. « Lorsque ce lien existe, il est impossible de s’assurer de la validité du consentement sexuel, puisqu’il existe une probabilité importante que celui-ci soit influencé par la nature même de la relation académique, explique le président de l’UEQ, Simon Telles. Quand on pense que plus de 95 % des agressions sexuelles ne sont pas dénoncées, c’est le seul moyen de véritablement protéger la communauté étudiante. »

Le projet de loi 151 est actuellement débattu à l’Assemblée nationale, où les auditions publiques ont débuté le jeudi 16 novembre dernier.

* Communiqué de presse du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur


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