Société

Dans les confins du cerveau humain pour comprendre la société actuelle

Sorti le 1er octobre dernier au Québec, l’ouvrage du neurobiologiste Bruno Dubuc Notre cerveau à tous les niveaux, du Big Bang à la conscience sociale explore la question du rôle du cerveau humain dans le fonctionnement de la société, dans une perspective évolutionniste. Quartier Libre l’a rencontré pour en savoir plus sur le sujet.

« Il est nécessaire de mieux se comprendre en tant qu’être humain », explique le vulgarisateur scientifique et détenteur d’une maîtrise en neurologie de l’Université de Montréal Bruno Dubuc. Avec le cinéaste militant Yvon D. Ranger, ils imaginent, dans leur ouvrage Notre cerveau à tous les niveaux, du Big Bang à la conscience sociale, un monde dans lequel les rapports sociaux seraient plus harmonieux grâce à une société moins axée sur la productivité et la compétition.  

En effet, bien que ces principes aient toujours existé chez l’humain, ils sont devenus des valeurs prédominantes dans la société actuelle. Pourtant, c’est la capacité des êtres humains à s’entraider et à coopérer qui a fait en sorte que ces derniers ont été capables de « coloniser » tous les climats de la Terre, selon M. Dubuc. Le vulgarisateur scientifique ajoute que, si la transmission des connaissances et l’innovation technologique élèvent l’espèce humaine, elles sont aussi ternies par le système capitaliste.

« Chaque humain est un univers qu’on peut apprendre à connaître, et chaque cerveau mérite de se développer, affirme-t-il. Nous avons tous une contribution significative à apporter à autrui, tant que les rapports demeurent sains et [ne sont pas]trop hiérarchiques. » M. Dubuc précise que l’expérience de vie est propre à chacun, ce qui représente un panier unique d’enseignements à se partager mutuellement.

De plus, peu d’espèces vivantes ont conscience de leur propre existence, poursuit le neurobiologiste. Il souligne que cette particularité mène ainsi inévitablement à des crises rattachées à l’angoisse de donner du sens à son existence ou à son identité face aux autres.

Un livre porteur de réponses

En se nourrissant des constats de divers primatologues, les deux auteurs dévoilent dans leur ouvrage des sujets en lien avec les ressemblances et les différences au sein de l’espèce humaine. « Chaque microcommunauté fait plus ou moins face à des contraintes universelles telles que faire des bébés, les élever, honorer les décès, indique M. Dubuc. Ce serait le vernis culturel qui représente la façon particulière de faire ces choses-là [NDRL ; de faire communauté], dépendamment du coin de la planète. »

Pourquoi alors, dans la majeure partie du monde, les individus n’arrivent-ils toujours pas à atteindre la tolérance ou la cohésion sociale malgré des besoins quasi identiques ? Le vulgarisateur scientifique explique que, comme la psychologie a longtemps été sous-estimée, un décalage entre le savoir scientifique et la manière dont les humains s’organisent en tant qu’espèce. L’influence du stress sur la dynamique de groupe est notamment très minimisée.

L’auteur confirme que les réactions automatiques au danger que les personnes ressentent à l’égard de celles différentes d’elles-mêmes sont rapidement observables en neurosciences, notamment dans l’amygdale. Dans leur ouvrage, MM. Dubuc et Ranger révèlent aussi que la xénophobie, entre autres, possède un caractère génétique qui a été utile pour la survie de l’espèce humaine il y a des siècles. Prendre conscience des réactions physiologiques que provoquent les systèmes de pensée se révèle donc important. Pour les enjeux collectifs, c’est la familiarité qui fait reculer l’adversité. Une camaraderie pourrait ainsi voir le jour si chaque personne tentait de comprendre la manière dont les autres réfléchissent. « Ce n’est pas un ingénieur qui a conçu le cerveau, sinon celui-ci aurait été programmé de manière optimale du premier coup, illustre M. Dubuc. À la place, c’est le hasard de l’évolution. »

Notre cerveau à tous les niveaux, du Big Bang à la conscience sociale, de Bruno Dubuc et Yvon D. Ranger aux éditions Écosociété. Paru le 1er octobre 2024. 49 $

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