Quartier Libre : Comment se déroule une collaboration avec Netflix ?
Nicolas Krief : Les producteurs nous aident beaucoup. Leurs commentaires sont constructifs et il y a peu de contraintes puisqu’ils ont aimé notre scénario. Aux réécritures, ils nous ont dit : « Amusez-vous, faites votre film. » C’est extraordinaire ! Il y a tellement d’argent en jeu.
Q.L. : Le film produit sera un thriller. Aura-t-il aussi une identité québécoise forte ?
N.K. : Notre cinéma montre des personnages québécois, vivant quelque chose de québécois, au Québec, pendant l’hiver. C’est très important pour nous. On veut montrer notre identité, ce que c’est d’être un peuple qui vit plusieurs mois par an enseveli par la neige. Avec Patrice Laliberté [le réalisateur], on fait vraiment un film d’auteur avec une vision personnelle du cinéma. Si on utilise le thriller, c’est pour parler au monde de nous, car partout, les gens aiment ce genre.
Q.L. : Aura-t-il une portée universelle ?
N.K. : On raconte une histoire fondée sur la tension entre des personnages qui se préparent à l’apocalypse. On questionne l’origine de la menace et de la peur. On essaie d’aborder ça un peu de biais, de façon personnelle et québécoise. Mais ces thématiques-là et le genre du thriller peuvent toucher le monde.
Q.L. : Quel est le sentiment provoqué par une première participation à l’écriture d’un long-métrage grand public ?
N.K. : Quand on est scénariste, on développe énormément d’histoires, mais la plupart des projets n’aboutissent pas. Tout au long de tes études, on te dit que ça ne marchera pas, peut-être pas avec raison, mais tu es plongé au milieu de plein d’autres étudiants qui veulent tous faire des films. Alors travailler sur ce projet-là, qui va être vu, c’est vivre un rêve.
Q.L. : L’attente d’un contrat pour un long- métrage a-t-elle été longue ?
N.K. : J’ai fait de la critique cinématographique, de la radio, de la distribution, plein de trucs connexes au cinéma. J’ai recommencé sérieusement l’écriture de scénarios il y a quatre ou cinq ans, quand j’ai vu des amis scénaristes évoluer. Je me suis dit : « Ça se peut. » Ça a été long, il a fallu que je l’accepte. Il y a un an, pour Patrice et moi, ça n’allait plus. Sans ce projet avec Netflix et Couronne Nord, il aurait fallu trouver du travail.
Q.L. : Faut-il étudier pour devenir scénariste ?
N.K. : Il faut étudier quelque chose, mais pas forcément le cinéma. Quelqu’un qui a un baccalauréat en sociologie et une maîtrise en sciences politiques peut très bien devenir scénariste. Mais apprendre les techniques d’écriture de scénarios est nécessaire.
Ça formate d’abord, mais on se déformate ensuite en trouvant une manière de faire personnelle. Cette base se trouve dans des livres. L’étude de l’histoire du cinéma dans mon cursus à l’UQAM a aussi été essentielle à ma démarche. À l’université, enfin, c’était la première fois que j’avais un retour sur mon écriture.
Q.L. : Quels seraient les conseils à donner aux étudiants en écriture de scénarios ?
N.K. : Il faut écrire beaucoup. Toutes les choses qui vous passent par la tête. Faites des films nuls ! Je suis pour le travail de fond, dans l’amélioration constante, sur le long terme. Il faut aussi se faire du fun et des amis. Écrire, c’est du plaisir. Et le cinéma est un art collaboratif.
Q.L. : Qu’apporte le scénariste dans cet art collaboratif ?
N.K. : Il apporte un autre regard et une technique pour raconter une histoire de façon visuelle, en y ajoutant du littéraire grâce aux dialogues. Le scénario, c’est ce qui parle aux gens, ce qui amène les thèmes éthiques, moraux, philosophiques, la symbolique…