«L’atelier est une expérience avec d’autres corporéités qui permet de se voir différemment », affirme la responsable de l’atelier, Cyrielle Joët. Elle explique qu’elle prépare ses cours en essayant de prendre en considération toutes les situations qu’elle peut rencontrer. Toutefois, il arrive souvent qu’elle doive adapter ses cours à ses participants. « Une fois je me suis retrouvée avec quatre hommes en fauteuil roulant et quatre femmes valides dans le même groupe alors j’ai décidé de faire un tango », raconte-t-elle. Elle déclare d’ailleurs que cet exercice permet de créer petit à petit un contact entre les participants.
Durant deux heures, les participants travailleront à partir d’un extrait de théâtre tiré de la pièce La Cantatrice chauve d’Eugène Ionesco. « Je pense tirer des phrases qu’on essayera d’apprendre par cœur ou des impressions qu’on travaillera dans des situations différentes en groupe ou en binôme », raconte Cyrielle. Elle ajoute qu’une part d’improvisation est nécessaire. « Je vais apporter quelques accessoires et, en fonction des personnes et des appareillages qu’elles pourront avoir, je m’adapterai », souligne-t-elle.
Briser les barrières
Pour le professeur au Département de psychologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), psychologue et art-thérapeute, Pierre Plante, cet atelier peut être un moyen pour les participants de travailler leur estime de soi. « La danse et le théâtre traduisent une communication, explique-t-il. Cette communication est la traduction des expériences propres à chacun pour lesquelles les mots ne suffisent pas toujours. » Selon lui, l’art est un moyen d’expression pour entrer en contact avec les gens.
L’étudiant au certificat en action communautaire de l’UdeM et souffrant de troubles de déficit de l’attention (TDAH), Marcio Cassab De Lacerda, se félicite de cette initiative nouvelle et intéressante. « Les ateliers proposés aux personnes en situation de handicap sont toujours la même chose, liés à l’anxiété ou à la gestion du temps », estime-t-il. Marcio souligne que l’atelier peut aider à approcher les gens et à briser les barrières entre les étudiants en situation de handicap et ceux qui ne le sont pas.
Art-thérapie
Ce cours peut être considéré comme une forme d’art-thérapie et d’après Pierre Plante, il s’agit d’un processus qui s’inscrit dans une relation entre un médium et les expériences de chacun. « L’art-thérapie est un parcours qui implique que l’individu fasse usage des médiums d’expression plastique dans l’objectif de traduire son vécu », rappelle M. Plante. Il ajoute que l’art-thérapie peut se faire en complémentarité de la parole ou sans celle-ci.
Pour Marcio, la danse et le théâtre permettent de ne pas prendre les choses trop au sérieux. « Ces activités peuvent m’aider à me relaxer, à profiter des moments présents, à connaître plus de gens et à commencer un changement en moi-même », déclare-t-il. Il estime d’ailleurs que cet atelier l’aide dans son quotidien à gérer ses anxiétés grâce aux exercices de respiration et d’étirement enseignés.
À travers les autres ateliers qu’elle anime à Montréal pour des personnes en situation de handicap, Cyrielle a réalisé que ces personnes ont souvent beaucoup de difficultés à se faire comprendre en public. « Je travaille beaucoup l’expression verbale, car je me suis rendu compte que beaucoup de personnes en situation de handicap avaient honte de leur voix à la suite de problèmes d’élocution », précise-t-elle.
Une initiative à développer
Pierre Plante suggère qu’il serait intéressant d’intégrer au sein des milieux universitaires des espaces dans lesquels tous les étudiants peuvent se ressourcer. « Les studios libres sont des espaces ludiques dans lesquels les jeunes peuvent se relaxer et s’adresser à un art-thérapeute sur place », explique-t-il.
Des initiatives comme celle-ci, Marcio aimerait qu’il y en ait plus pour aller plus loin et se dépasser. Il soutient que les personnes en situation de handicap ont aussi besoin de diversité dans les ateliers qui leur sont proposés. « Nous sommes comme tous les autres étudiants », soutient-il. Il ajoute qu’il est nécessaire d’entreprendre davantage d’ateliers originaux pour briser la barrière entre les étudiants avec et sans handicap. La date limite pour s’inscrire est le 9 février.