Mercredi après-midi, la Cour supérieure a rejeté la demande d’injonction qui avait été déposée au palais de justice de Montréal le jour précédent par deux étudiant·e·s de l’Université McGill, Gabriel Medvedovsky et Raihaana Adira. Tous deux étaient représentés par l’avocat Neil Oberman. Les plaignant·e·s affirmaient que depuis l’installation du campement, un environnement « hostile » et « dangereux » régnait sur le campus, et demandaient donc son démantèlement.
L’étudiante Blue*, qui jetait un coup d’œil à la situation aux États-Unis, est fière de la mobilisation qui s’est déployée au cours des derniers jours. « J’espérais enfin voir plus de choses faites à Montréal, puisque j’ai l’impression qu’on ne nous prend pas au sérieux », explique la manifestante, installée au campement depuis samedi.
Pour la professeure à la Faculté de médecine à l’Université McGill Mayada Elsabbagh, présente sur le campus en soutien aux étudiant·e·s depuis lundi, le campement est un moyen pour les étudiant·e·s d’utiliser les mécanismes démocratiques à leur disposition afin de manifester et de faire valoir leurs revendications auprès de l’administration.
Les manifestant·e·s demandent notamment la divulgation des investissements des universités McGill et Concordia, suspectant que ces derniers servent à financer la guerre à Gaza. La professeure stipule que le rejet de l’injonction aurait été un signe que ces mécanismes démocratiques auraient été désuets. « Le campement est une nouvelle manière de manifester, souligne Mme Elsabbagh. Il doit toutefois y avoir un dialogue, mais c’est toujours l’Université qui refuse d’en parler. »
Toujours pas de dialogue
D’après la professeure, les étudiant·e·s et les professeur·e·s de l’Université McGill, dont elle-même, entament des démarches afin de rencontrer les représentant·e·s de l’administration de l’établissement depuis plusieurs années.
L’objectif des propalestinien·ne·s à McGill serait de discuter de la situation à Gaza et du manque de reconnaissance de l’Université vis-à-vis des Palestinien·ne·s, mais l’administration ne se serait pas montrée ouverte au dialogue jusqu’à présent. « Ils [les représentants de la direction] n’ont jamais cherché à parler avec les représentants des groupes étudiants », déplore l’étudiant à McGill et l’un des représentants de la branche montréalaise du Mouvement de la jeunesse palestinienne (PYM Montréal) Ali Salman.
Mme Elsabbagh espère que le campement ainsi que les manifestations inciteront l’administration à entamer le dialogue avec sa communauté, bien qu’elle en doute. La professeure se désole également que les communiqués que diffuse l’Université ne reflètent pas la réalité sur le terrain. « Nous les avons invités à venir voir de leurs propres yeux, nous sommes pacifiques », précise-t-elle.
Un membre de l’administration, dont le nom n’a pas été communiqué, avait émis, lundi en matinée, devant la centaine de manifestant·e·s présent·e·s sur les lieux, un « final warning » (dernier avertissement) leur demandant de démonter le campement, sous peine d’être possiblement évincé·e·s par les forces policières. Une vidéo avait notamment circulé sur les réseaux sociaux. Tout comme les plaignant·e·s, l’Université appréhendait la sécurité de ses membres.
Dans la foulée des derniers événements, la relationniste de l’Université McGill avait été contactée par courriel mercredi afin de recueillir les commentaires de l’établissement sur la situation. Les messages sont restés sans réponse.
Selon Ali, ces échanges entre l’administration et les groupes propalestiniens seraient les seuls depuis le début du campement.
Une situation stable
À part la présence de quelques agent·e·s de sécurité du campus, qui forment un périmètre autour du campement pendant la journée, ainsi que celle de forces policières le soir, le calme règne. « La police a reconnu que les manifestations ont été pacifiques et c’est un point important à retenir », a réitéré à maintes reprises Ali.
En plus des agent·e·s de sécurité déjà présent·e·s sur le campus, l’Université McGill a demandé, il y a quelques jours, l’assistance des forces policières pour gérer le campement, mais jusqu’à présent, aucune arrestation ni suspension n’a été menée contre les manifestant·e·s propalestinien·ne·s à Montréal, contrairement à la situation aux États-Unis. Si un accroissement de la présence policière avait été constaté autour du site durant la fin de semaine, il y a eu une désescalade depuis lundi.
* Afin de respecter l’anonymat de l’étudiante, le prénom a été changé.