Une projection dans le passé

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Par Louis-Philip Pontbriand
lundi 4 novembre 2019
Une projection dans le passé
L'idéateur de la pièce, David Ricard, a appris quelques secrets que lui avait gardés sa famille, au moment où il a visionné pour la première fois les vieilles bandes vidéo de son arrière-grand-père. Photos : Paméla Photographe
L'idéateur de la pièce, David Ricard, a appris quelques secrets que lui avait gardés sa famille, au moment où il a visionné pour la première fois les vieilles bandes vidéo de son arrière-grand-père. Photos : Paméla Photographe
Deux diplômés de l’UdeM ont présenté leur coréalisation, Le Kodak de mon arrière-grand-père, du 22 octobre au 2 novembre derniers dans la Salle intime du Théâtre Prospero. Créée à partir de vieilles bandes vidéo 8 mm, cette œuvre située au croisement du théâtre documentaire et du cinéma est le récit de la (re)découverte du passé familial de son idéateur et interprète.

À l’âge de 16 ans, David Ricard a hérité de la caméra et d’un projecteur ayant appartenu à son arrière-grand-père, ainsi que d’un grand nombre de bobines de pellicule vidéo 8 mm que celui-ci avait tournées. C’est ce matériel qui lui a servi d’inspiration et de substrat pour le développement de cette production théâtrale. Celle-ci combine la projection des bobines originales avec des montages de pellicules numérisées. Les bandes vidéo étant dépourvues de toute piste sonore, le texte est accompagné de musique jouée — et improvisée — en direct par deux musiciens présents sur scène.

À l’époque où M. Ricard a hérité de tout ce matériel, à la suite de la mort de son grand-père, il se dirigeait vers des études en cinéma. « J’avais donc de la facilité à m’identifier à son geste et à sa manière de filmer, explique-t-il. C’est ainsi que j’ai découvert qui était mon arrière-grand-père, que je n’avais jamais connu en vrai. Ça m’a conduit à écouter et à réécouter les vidéos, jusqu’à les présenter presque 20 ans plus tard dans un univers un peu plus artistique. »

 

Chaque projection des vileilles bandes vidéo dégrade un peu plus celles-ci. M. Ricard les manipule donc avec le plus grand soin.

Chaque projection des vileilles bandes vidéo dégrade un peu plus celles-ci. M. Ricard les manipule donc avec le plus grand soin.

 

Retrouver les affects

Celui qui a terminé en 2008 le programme de majeure en cinéma à l’UdeM explique qu’il a tenté, à chaque représentation du spectacle, de retrouver les affects qu’il a eus lorsqu’il a visionné les bandes vidéo pour la première fois. « Ça a eu un certain impact sur moi, de voir mon grand-père jeune, alors qu’il venait juste de mourir, confie-t-il. C’est cette émotion-là que je transmets sur scène. » Sa collègue Valery Drapeau a assuré la mise en scène et la dramaturgie de la pièce. « Je suis allé la chercher pour avoir un regard extérieur sur mon travail et sur la pièce, développe M. Ricard. C’est elle qui lui a donné cet aspect plus théâtral et documentaire, alors qu’auparavant, elle était plus performative. »

Mme Drapeau explique que l’aspect d’improvisation présent dans Le Kodak de mon arrière-grand-père l’a interpellée dès le départ. « On n’a jamais voulu qu’il y ait un texte définitif, précise-t-elle. Ça donne un résultat assez unique sur scène. » Les mouvements de l’interprète étant plutôt restreints sur scène, la dramaturge précise qu’elle a développé un état de corps et une précision des gestes, plutôt qu’une chorégraphie à proprement parler.

Le concepteur musical de la pièce, Andrew Beaudoin, est un diplômé en musiques numériques de l’UdeM. Il joue de la musique en direct sur scène, souvent accompagné du bassiste Roger Cournoyer. « Les musiciens donnent la réplique à mon texte, et moi aussi, j’adapte mon texte à la musique que les musiciens improvisent », explique M. Ricard. Le résultat de cet échange à trois accompagne les images qui défilent à l’écran, à la manière d’une bande originale, unique à chaque représentation.