Intitulée Aimer. Défendre. Ensemble, protégeons l’avenir du CHU Sainte-Justine, la campagne, destinée aux médias sociaux, a été lancée le 12 octobre dernier par la présidente du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) du CHU Sainte-Justine, la Dre Valérie Lamarre. Le mouvement s’inscrit dans une succession de contestations qui ont démarré avec l’annonce du projet de regroupement. Dès la proclamation de la fusion en 2015, cette dernière a été vivement rejetée par les membres du personnel de Sainte-Justine. « Le mouvement n’a pas débuté récemment, c’est sa phase publique qui a été intensifiée », souligne la Dre Lamarre.
Ce mouvement a un objectif clair. « Il s’agit de sensibiliser le plus largement possible la population du Québec à ce qui compromet l’avenir du CHU Sainte-Justine », précise-t-elle. La principale revendication des contestataires est d’obtenir le rétablissement de leurs propres conseil d’administration et direction générale. « Nous avons la conviction que le CHU Sainte-Justine a besoin de tous ses leviers pour se maintenir au top, ajoutetelle, surtout des plus hauts niveaux décisionnels, qui doivent se concentrer sur la mission mère-enfant. »
Convergence amorcée
Le ministre Barrette a affirmé que ledit regroupement faciliterait ainsi le passage des patients de l’hôpital pédiatrique (CHU Sainte-Justine) vers celui pour adultes (CHUM)*.
La Dre Lamarre conteste toutefois cette justification. « La minorité des patients de Sainte-Justine qui ont besoin d’être transférés en milieu adulte sont envoyés dans des hôpitaux près de chez eux, affirme-t-elle. Pour beaucoup, ce sera à l’extérieur de Montréal. Et même sur l’île, ça peut être dans différents hôpitaux universitaires, dépendamment des cas. » Le collectif dément l’intérêt d’une telle mesure et regrette la perte d’autonomie du CHU Sainte-Justine. « Des liens entre différents hôpitaux existent déjà, explique la Dre Lamarre. Il n’est pas nécessaire de partager un conseil d’administration et un PDG pour améliorer ce processus. Inévitablement, il y aura des arbitrages, et le poids des besoins des adultes risque de toujours l’emporter. »
La Dre Lamarre s’inquiète des raisons évoquées par le ministre pour justifier le regroupement qui, selon elle, ne sont que des prétextes vers un plus grand regroupement des services. « La fusion des plus hauts niveaux décisionnels est la pièce maîtresse d’une fusion complète, et cette étape est déjà franchie », ajoute-t-elle. La docteure s’inquiète qu’à long terme, différents services soient fusionnés entre les hôpitaux.
Sans se positionner sur la campagne entreprise par le CMDP, la conseillère en communication et relations avec les médias du CHUM Joëlle Lachapelle indique que les deux hôpitaux, bien qu’administrés par un conseil d’administration commun, demeurent distincts. « Le regroupement CHUM-CHU Sainte-Justine sert à mettre en commun les expertises en soins, en enseignement et en recherche, tout en gardant la spécificité de chacun des établissements. »
Des conséquences pour les étudiants en santé
Le candidat à l’exercice de la profession infirmière (CEPI) au CHU Sainte-Justine Fares Massaad, s’oppose à cette fusion. « Je crois qu’elle n’est pas nécessaire, pas bénéfique et absolument pas pertinente », s’exclametil. Pour motiver son opposition, il évoque des conditions de travail déjà difficiles, notamment à cause du manque de personnel soignant. « J’ai moi-même travaillé 16 heures de suite aujourd’hui parce qu’il y avait trois infirmières en moins sur mon unité », précise-t-il. Pour lui, créer une nouvelle instabilité administrative n’aiderait pas les équipes surmenées à bien traiter leurs patients.
L’étudiant au baccalauréat en sciences infirmières et coordinateur aux affaires externes de l’Association étudiante des sciences infirmières de l’UdeM (AÉSIUM), Tony Nguyen, affirme qu’à sa connaissance, aucune conséquence du regroupement n’a porté préjudice aux étudiants de la Faculté des sciences infirmières de l’UdeM. « Si le regroupement apporte des effets néfastes sur les étudiants, l’AÉSIUM se positionnera contre », ajoute-t-il. Pour sa part, Farres craint que le risque d’instabilité administrative rende la recherche de stage plus difficile pour les étudiants.
Le ministère de la Santé et des Services sociaux indique cependant que le regroupement ne devrait pas avoir d’incidence sur le nombre de stages disponibles au sein du CHUM et du CHU Ste-Justine. Chaque hôpital restant libre d’accueillir autant de stagiaires qu’il le souhaite.