Un long-métrage sur la première vague de la pandémie

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Par Anaïs Amoros
vendredi 30 avril 2021
Un long-métrage sur la première vague de la pandémie
Sur le tournage de Première Vague | Crédit photo : Kino Montréal
Sur le tournage de Première Vague | Crédit photo : Kino Montréal
Le directeur général et artistique de Kino Montréal, ancien étudiant de l’UdeM et ancien directeur de la radio CISM, Jarrett Mann, a produit son premier long-métrage intitulé Première vague. Quartier Libre s’est entretenu avec lui.

Quartier Libre (Q. L.) : Tu viens de produire ton premier long-métrage, produit par Kino-Montréal. Pourquoi l’as-tu nommé Première vague ?

Jarrett Mann (J. M.) : L’ADN de Kino est de faire du court-métrage, mais exceptionnellement, en temps de pandémie, on a fait un gros projet, un film choral, qui a permis à quatre cinéastes de participer. Chacun d’eux a réalisé 15-20 minutes du film. On avait lancé un appel pour avoir des cinéastes intéressés le 12 mai 2020, pour raconter l’histoire des cent premiers jours de la pandémie. On a reçu une quarantaine de candidatures, puis on a retenu quatre histoires différentes, qui s’entrecroisent dans le long-métrage. Ce n’est pas un film à sketchs, c’est un tout. On a commencé à développer le projet avant même qu’on sache quand on pourrait le tourner, c’est assez particulier.

Q. L.: Première vague est une fiction qui s’apparente à un documentaire. Peut-on parler de docu-fiction ?

 J. M. : C’est un genre de docu-fiction, tous les personnages du film sont fictifs, mais on s’est inspiré de ce qu’ont vécu les cinéastes et de ce qu’on a lu dans les médias. Le projet était de témoigner des événements qu’on vivait à ce moment-là. L’histoire se déroule sur les cent premiers jours, et l’écriture du film était en cours avant même que l’on arrive au centième jour, donc les cinéastes étaient encore en train d’ajuster leur scénario juste avant le tournage pour continuer d’être influencé par ce qui arrivait au Québec. C’était assez unique comme processus de création. On a intégré des images d’archives de cette période, des points de presse de François Legault, des rues désertes de Montréal, des files d’attente pour faire son épicerie, etc. Ces banalités du quotidien seront intéressantes à revoir dans les années à venir.

Q. L.: Comment réalise-t-on un film en période pandémique ?

J. M. : Toute la préproduction s’est faite en confinement, donc ça a été long avant que l’équipe se rencontre, tout s’est fait sur Zoom, même les auditions pour les rôles ont été virtuelles. La proximité nous a manqué. Pour le tournage, le guide de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) nous a dicté le déroulement sur les plateaux de tournage, le temps durant lequel les comédiens pouvaient être proches, le nombre de minutes par jour où ils pouvaient enlever leur masque, comment manipuler l’équipement, etc. C’était assez costaud, surtout pour un tournage indépendant comme le nôtre, ça alourdissait le processus. Pour la distribution des rôles, il a fallu trouver des comédiens qui étaient dans la même bulle pour enlever le masque. Pour les autres, il a fallu être ingénieux dans le tournage et la magie du montage.

Q. L. : Les quatre cinéastes ont eu seulement quatre jours chacun pour réaliser leur segment, comment se préparer à un tel défi ?

J.M.: Chacun des cinéastes a en effet eu quatre jours, pour un total de seize jours. C’est très peu, mais à Kino, on est habitué à travailler avec des contraintes de temps souvent extrêmes. L’une de nos signatures est le Kino Kabaret, on fait des courts-métrages en soixante-douze heures. Mais faire un long-métrage, c’est autre chose, ça représente un grand défi. Le film a été écrit et tourné en un temps record, de l’idée du film jusqu’à la première, moins d’un an s’est écoulé.

Q. L.: Qu’est-ce qui t’a motivé à réaliser ce film ?

J. M.: J’étais à l’UdeM, j’étudiais dans un cours de production cinématographique quand le fameux 11 septembre est arrivé. Quelqu’un est intervenu dans le cours pour dire qu’un avion avait frappé les tours du World Trade Center. J’avais écouté les nouvelles sans arrêt pendant une semaine après ça. Je m’en suis toujours voulu de ne pas avoir pris ma caméra vidéo pour filmer les gens qui regardaient les nouvelles et lisaient les journaux, pour témoigner de l’événement à travers le regard des Montréalais autour de moi. Donc quand la pandémie a frappé, j’étais, comme nous tous, conscient qu’on vivait un moment historique et je ne voulais pas passer à côté de mon sentiment d’urgence de documenter cet événement.

Q. L. : Va-t-il y avoir un Deuxième vague ou un Troisième vague ?

J. M.: On ne sait jamais (rires). Je ris, parce qu’au début, on nous faisait la blague sur la deuxième vague pour nous demander s’il y aurait une suite, et maintenant, c’est rendu à parler d’une trilogie. On espère que ça n’ira pas plus loin que ça avec la troisième vague. On va commencer à savourer la diffusion de ce film avant de parler de la suite. On l’a littéralement terminé dimanche dernier (25 avril) et la première était hier (28 avril). On verra pour la suite. Mais c’est important pour nous de produire rapidement, pendant qu’on est encore en train de vivre ces événements-là, même si ça a été une course contre la montre.

Q. L. : Où peut-on visionner Première vague ?

J. M. : Présentement, il est à l’affiche des rendez-vous Québec cinéma jusqu’au 8 mai. On espère ensuite une tournée des festivals, mais on l’ignore encore.