Le plus inquiétant dans ce dossier est le silence du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Notre journaliste Anne Gabrielle Ducharme a demandé à l’attachée de presse du ministre Yves Bolduc une explication concernant ces calculs, mais celle-ci n’est pas en mesure de d’énumérer les critères de la répartition des coupes. Puisque le gouvernement ne souhaite pas nous répondre, regardons ensemble si le ministère suit une quelconque logique.
Scénario 1 : Plus il y en a, plus on coupe
Le financement des universités est principalement calculé selon le nombre d’étudiants qui fréquentent l’établissement. Logiquement les coupes devraient l’être aussi. Cependant, l’Université Laval, qui compte environ 43000 étudiants, se fait couper 42 M$ alors que Concordia, qui compte 45000 étudiants, ne verra que 15 M$ retranchés à son budget. Il n’y a pas de corrélation directe entre le nombre d’étudiants et le montant des coupes.
On peut se demander si on a tenu compte du nombre d’étudiants étrangers, qui paient des frais de scolarité plus élevés que les Québécois, dans ce calcul. Pourtant ces deux universités ont un pourcentage égal d’étudiants étrangers, c’est-à-dire 12 %.
Scénario 2 : Donner c’est donner, reprendre c’est voler
Examinons un autre scénario qui peut-être répondra à nos nombreuses interrogations. Puisque les subventions accordées dépendent aussi de programmes spécifiques tels que la médecine ou encore la présence en région, on pourrait imaginer que les coupes sont évaluées par rapport à l’argent versé par le gouvernement à chaque université. Toutefois, on ne peut pas non plus faire une corrélation entre le montant de la subvention générale accordée par le ministère aux universités et le montant des coupes (voir tableau).
Si on compare les extrémités du spectre, l’Université McGill a reçu 296,2 M$ en subventions pour l’année 2013-2014. Elle se verra couper 15 M$, soit l’équivalent de 5,06 % de sa subvention. De son côté, l’Université Laval a reçu une subvention de 358,06 M$ et se verra couper 42 M$ soit l’équivalent de 11,72 % de son versement.
Scénario 3 : Le bâton et la carotte
Étant donné qu’il s’agit du ministère de l’Éducation et qu’il est également responsable de la gestion des écoles primaires, on pourrait se demander s’il ne souhaite pas tout simplement appliquer les bonnes vieilles méthodes éducatives d’antan.
Le gouvernement aurait pu décider de pénaliser les universités qui, année après année, signent leur budget à l’encre rouge. C’est un scénario assez tiré par les cheveux car cela a pour effet de gonfler les déficits accumulés. À l’Université Laval, l’exercice 2013-2014 s’est terminé avec un déficit de fonctionnement de 9 M$ et elle a subi une coupe assez importante de 42 M$. À l’UdeM, le budget de l’an dernier s’est soldé par un excédent de 9,8 M$ et la coupe a été de 24,6 M$. Jusqu’ici la logique de récompenses a été respectée, le bon élève a gagné la confiance du gouvernement.
Par contre, à l’Université McGill, on a enregistré un déficit de 10 M$ pour la même période. Toutefois elle demeure moins pénalisée que l’UdeM avec une coupe de 15 M$. Ce scénario invraisemblable n’a donc pas été suivi non plus.
Improvisation totale
Le gouvernement peut faire valoir des arguments budgétaires pour justifier des coupes dans les services de la province, c’est idéologique, mais c’est son choix. Par contre, il doit suivre une logique pour être équitable envers les différentes universités. Force est d’admettre que ce n’est pas le cas ici. On se retrouve donc dans une partie de Roue de fortune. Tournez la roue et découvrez combien d’argent vous sera retranché.