Un avenir plus écoresponsable pour l’opéra

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Par Lucas Sanniti
lundi 19 juin 2023
Un avenir plus écoresponsable pour l’opéra
De droite à gauche, Hassan (Florence Bourget), Zaï-Za (Pauline Sabatier), Sidi-Toupi (Antonio Figueroa), Ali-Bazar (Geoffroy Salvas) et Fatime (Myriam Leblanc) en pleine représentation de L'Adorable Belboul. Photo | Courtoisie | Bruno Petrozza
De droite à gauche, Hassan (Florence Bourget), Zaï-Za (Pauline Sabatier), Sidi-Toupi (Antonio Figueroa), Ali-Bazar (Geoffroy Salvas) et Fatime (Myriam Leblanc) en pleine représentation de L'Adorable Belboul. Photo | Courtoisie | Bruno Petrozza
Le festival Classica lance cet été une nouvelle formation lyrique : le Nouvel opéra métropolitain (NOM). Ce projet a pour objectifs de stimuler l’écosystème lyrique du Québec et de laisser place à une nouvelle génération de chanteurs, le tout de manière écoconsciente.
«Il faut créer plus de travail et d’opportunités à cette génération lyrique de jeunes chanteurs actuels, qui est formidable.»
Marc Boucher, directeur général et artistique du festival Classica

Les créateurs du festival Classica, événement majeur de la musique classique au Québec, lancent cet été une nouvelle formation lyrique à l’occasion de la treizième édition de celui-ci : le Nouvel opéra métropolitain (NOM). Pour célébrer l’événement, les trois premières productions du NOM, L’Homme qui rit, L’Adorable Belboul et Miguela, en partenariat avec Lumifest en cavale, ont été présentées à la salle Claude-Champagne de l’Université de Montréal les 31 mai, 6 et 14 juin derniers.

Dynamiser l’opéra québécois

Le NOM est né en premier lieu d’une forme d’obsession du directeur général et artistique du festival Classica, Marc Boucher. Fort d’une carrière en chant de plus de vingt d’ans, le baryton estime désormais que l’opéra au Québec pourrait bénéficier d’une certaine revigoration.

Cette conclusion s’articule autour de deux constats qu’il a réalisés ces dernières années. « Ce qu’il se passe, c’est qu’il y a deux phénomènes, à commencer par la diminution concrète de représentations professionnelles au Québec depuis vingt ans », explique-t-il. Le deuxième constat, selon lui, est la nécessité de prioriser l’embauche d’artistes locaux. « Il faut créer plus de travail et d’opportunités à cette génération lyrique de jeunes chanteurs actuels, qui est formidable », affirme-t-il.

Cette volonté d’employer des artistes et chanteurs locaux ne vient pas seulement du désir de stimuler l’écosystème lyrique du Québec. Pour le directeur de Classica, la nouvelle formation lyrique du festival se doit de diriger le monde de l’opéra vers un avenir plus vert. L’emploi d’artistes québécois locaux permet à ces derniers d’éviter d’effectuer jusqu’à des milliers de kilomètres pour vivre de leur art. La suppression de tels déplacements entraîne donc une diminution des émissions de gaz à effets de serre (GES).

Un avenir vert pour les arts de la scène

Le souci de l’environnement fera partie intégrante du futur du spectacle et de la scène, selon M. Boucher. « Tous les arts de la scène, dans les cinq à dix prochaines années, vont être parfaitement modulés par cette problématique-là, prévoit-il. Tout le système qui permettait aux artistes de voyager un peu partout, que ce soit dans le théâtre, le cirque, la musique et tout ça, on va y penser plus activement. »

 Si la réduction des GES qu’engendrent les voyages à l’étranger est une manière pour le NOM de contribuer à un avenir plus carboneutre, les décors et les costumes ont aussi un rôle à jouer. En effet, l’une des particularités de la création de décors riches, uniques et distinctifs est l’utilisation de la projection illusionniste (aussi appelée mapping vidéo). Les arts numériques permettent ainsi d’éviter la confection de décors matériels non réutilisables. Les costumes sont pour leur part fabriqués à partir de textiles recyclés et parfois même achetés en friperie pour ensuite être retravaillés.

Pour la chanteuse soprano et titulaire d’un baccalauréat en chant de l’Université McGill Myriam Leblanc, qui incarne les rôles de Fatime dans L’Adorable Belboul et de Miguela dans la pièce du même nom, l’initiative du NOM de créer une économie circulaire se place dans l’air du temps. « Ça m’inspire l’avenir en fait, ça m’inspire le futur, on devrait tous y penser, estime-t-elle. Je sais que c’est quand même quelque chose qui se parle de plus en plus dans le milieu. Les gens partagent des productions, des costumes… Mais de là à le mettre de l’avant comme ça, je trouve ça très louable. »

Des pièces maudites et oubliées

Les ambitions carboneutres et l’utilisation des arts numériques pour insuffler une vie nouvelle dans les productions opératiques ne sont pas les seuls facteurs qui différencient le NOM des autres opéras. Selon Mme Leblanc, le choix des pièces occupe aussi une place importante. « On s’offre des œuvres qu’on n’entend jamais, poursuit la soprano. C’est ça, la différence du NOM, il prend des œuvres qui sont mises de côté pour je ne sais quelles raisons. Ce sont vraiment des œuvres qui ont beaucoup à offrir. »

Deux des trois productions présentées à la salle Claude-Champagne étaient d’ailleurs des premières mondiales. L’Adorable Belboul, opérette de la fin du XIXe siècle de Jules Massenet, était vouée à l’oubli, ses représentations ayant été interdites par l’auteur, et Miguela, grand opéra français de Théodore Dubois, n’a jamais été joué en intégralité devant un public.