« La Symphonie fantastique de Berlioz est une grosse aventure, trippante, complexe, inspirante et très divertissante pour le public », avance le chef d’orchestre et directeur artistique de l’OUM, Jean-François Rivest. Selon lui, il s’agit d’une des rares pièces qui soit une histoire avouée du compositeur, avec un scénario — ou « programme », en langage musical — intégré à même les partitions. « Elle décrit les états d’âmes d’un poète, d’un musicien et d’un artiste à fleur de peau, précise-t-il. Celui-ci est enflammé de passion pour une jolie demoiselle, sans savoir si elle va répondre à ses demandes. »
M. Rivest explique que ce récit musical est inspiré d’une personne réelle, une actrice parisienne qui n’a jamais accepté les avances du compositeur. Chaque mouvement introduit un thème propre à cette histoire, mi-réelle, mi-imaginaire. « Le premier mouvement décrit les rêveries et les frissons intérieurs que l’artiste éprouve quand il pense à elle, explique-t-il. Cette très belle mélodie, qui décrit sa solitude et ses passions, est accompagnée d’un motif répétitif qui fait état de sa jalousie. » Cet élément répétitif, qualifié d’« idée fixe » par Berlioz lui-même, est récurrent tout au long de la pièce.
Descente aux enfers
« Ma théorie sur la symphonie est qu’il s’agit d’une plongée psychiatrique, d’une descente onirique dans un bad trip profond, souligne M. Rivest. Quand tu te mets à entendre des voix, à voir de la jalousie partout et à t’imaginer ta propre mort, c’est que ça commence à aller mal dans ta tête. » Le quatrième mouvement représente la marche au supplice et la mort de l’artiste, et est suivi d’un cinquième et dernier, où l’on entend notamment des rires de sorcières interprétés par des clarinettes. « Ça fait très film d’horreur », ajoute le professeur.
Selon le chef d’orchestre, cette pièce, écrite en 1830, est très avant-gardiste pour son époque. « C’est une extraordinaire invention psychologique que la musique n’avait jamais faite jusque-là, dans son histoire, observe-t-il. On utilise toutes sortes d’artifices d’orchestration, d’instrumentation, de mariage d’instruments et de techniques de jeu pour arriver à ces fins dramatiques et narratives qui sont vraiment extraordinaires. »
Les sorciers de Harry Potter
L’OUM interprétera également deux mouvements de la suite pour orchestre Harry Potter à l’école des sorciers, du compositeur contemporain John Williams. « Puisqu’on parle de sorcières, aussi bien aller dans Harry Potter, explique le chef d’orchestre. Beaucoup de gens dans la salle seront de la génération qui a grandi avec lui. Tout le monde va reconnaître ça. »
Le pianiste soliste Félix Marquis, qui a fait des études en musique à l’UdeM, interprétera le Concerto pour la main gauche de Maurice Ravel. Composée spécifiquement pour un pianiste qui avait perdu son bras droit pendant la Première Guerre mondiale, cette pièce ne se joue donc que d’une seule main. « Si certains pianistes l’ont interprétée à deux mains — au grand dam de Ravel — au début des années 1930, plus personne ne fait ça aujourd’hui, mentionne le musicien. On essaie de préserver l’idée originale du compositeur. »
L’étudiant précise que ce morceau demeure assez technique et difficile à maîtriser. « C’est une œuvre magnifique qui surpasse bien des œuvres à deux mains, spécifie-t-il. C’est vraiment une réussite de Ravel. Cette œuvre très sombre, qui fait une grande utilisation des registres graves, est nostalgique et triste. » Félix y voit donc un lien incontournable avec la Symphonie fantastique de Berlioz.