Surpasser l’échec

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Par Félix Lacerte-Gauthier
vendredi 15 janvier 2016
Surpasser l’échec
Crédit Marie-Claude Légaré
Crédit Marie-Claude Légaré
La session d’automne terminée, certains étudiants devront affronter l’échec. Que ce soit en se réorientant ou en puisant dans les ressources disponibles sur le campus, la remise en question est nécessaire. Quartier Libre livre quelques pistes pour comprendre l’échec et apprendre à le surmonter.

« À l’université, les situations d’échec sont rarement liées aux capacités intellectuelles, affirme le professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage à l’Université Laval, Simon Larose. Au-delà de l’intelligence, c’est plutôt la question des habitudes de travail, de l’organisation et de l’anxiété face à la performance qui joue beaucoup. »

L’étudiante au baccalauréat en science politique Marie-Ève Bélanger-Southey lie le stress et l’échec au manque d’organisation. « Tu procrastines parce que ça devient trop intense, résume-t-elle. Tu associes les travaux à quelque chose de dur et de lourd, et plus tu as peur, plus tu remets à plus tard. C’est un cercle vicieux. »

Selon M. Larose, les causes externes, comme l’environnement socio-économique, ont moins d’influence une fois l’étudiant entré à l’université. « Les facteurs qui sont invoqués plus tôt dans le développement intellectuel, comme les questions de compétences cognitives, de pauvreté, d’éducation des parents, sont des facteurs qui tendent à disparaître à l’université », explique-t-il.

On en voit des étudiants qui ont échoué, sont passés au travers et ont finalement très bien réussi. » France Dodier Coordinatrice des Services d’orientation scolaire et professionnelle à l’UdeM

L’étudiante à la mineure en arts et sciences Caroline Blanchet a appris qu’étudier à l’université représente une charge de travail plus importante qui nécessite de s’adapter. « Je retranscris toutes les notes imprimées dans un cahier afin de mieux retenir mes cours et je fais aussi des fiches de lectures, décrit-elle. J’ai réussi les cours où je l’ai fait, mais les cours où je ne l’ai pas fait, j’ai coulé. »

Prendre du recul

Pourtant l’échec ne doit pas signifier la fin, mais être utilisé pour mieux rebondir d’après la coordinatrice des Services d’orientation scolaire et professionnelle à l’UdeM, France Dodier. « C’est important de persévérer parce que ça arrive à tout le monde. On en voit des étudiants qui ont échoué, sont passés au travers et ont finalement très bien réussi », rapporte-t-elle.

La première étape consiste à se remettre en question pour comprendre son échec. « Souvent, devant un échec, les gens évitent d’aller poser des questions au professeur, tandis que les plus forts vont en poser pour comprendre pourquoi ils ont eu 90 % plutôt que 100 %, indique M. Larose. La meilleure réaction devrait être l’action plutôt que le retrait, être proactif et aller s’enquérir des facteurs liés à ce qui n’a pas été compris. » Il pense aussi qu’il ne faut pas voir le fait de recevoir de l’aide comme un signe d’incompétence.

Le Centre étudiant de soutien à la réussite de l’UdeM (CÉSAR) offre des ateliers de soutien à l’apprentissage et des rencontres avec des psychologues en aide à l’apprentissage. « Les temps très forts sont les mois de novembre, décembre, janvier, février et sont liés à la limite des demandes d’admission, mais il y a aussi plus d’affluence après les intras, quand les notes sortent », souligne Mme Dodier.

Pour pallier la déprime que peut causer un échec, Marie-Ève a développé une stratégie. « L’aide de l’entourage me permet de surmonter les problèmes et la panique que ça engendre. Le fait d’en parler, ça dédramatise », pense-t-elle.

Risquer l’échec

Il faut aussi utiliser l’échec pour se remettre en cause, selon le psychologue clinicien et chargé de cours à l’UdeM Patrick Lyne. « Ça peut être une occasion de se réévaluer, de faire un bilan, de voir si je peux améliorer cette situation ou, au contraire, si je dois réévaluer ma détermination à vouloir poursuivre dans ce domaine », explique-t-il.

M. Lyne pense aussi que les étudiants doivent travailler sur l’acceptation de l’échec. C’est un élément qui fait partie de la vie et la prise de risque est inhérente à certaines situations. « L’échec aurait été de ne pas tenter, estime-t-il. Il faut risquer le refus et accepter que certaines choses ne fonctionnent pas. Ce qu’on peut se dire, c’est “Est-ce que j’ai essayé?” Ce n’est pas parce qu’on a un échec qu’on est un échec. » Selon lui, il est primordial de comprendre que l’échec fait parfois partie de l’apprentissage.

Étymologie du mot «Échec»

D’abord écrit eschec en ancien français, le terme échec tire son origine du jeu du même nom qui fut introduit en Europe par l’Espagne musulmane et les incursions sarrasines au Xe siècle. L’expression échec est mat y désigne la prise du roi, prise mettant instantanément fin à la partie. Or cette expression provient d’abord du persan, où Shah mat signifie le roi est mort. Elle passa ensuite en français par l’intermédiaire de l’arabe. Ce n’est cependant qu’au Xiiie siècle qu’apparut le sens figuré du mot échec pour désigner un insuccès ou un revers.