Souvenirs en noir et blanc

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Par Lucas Sanniti
samedi 9 décembre 2023
Souvenirs en noir et blanc
Le temps d’une exposition, Michel Élie Tremblay retrace l’histoire d’un quartier. (Crédit photo : Juliette Diallo)
Le temps d’une exposition, Michel Élie Tremblay retrace l’histoire d’un quartier. (Crédit photo : Juliette Diallo)
Pour célébrer le 20e anniversaire de la société d’histoire Mémoire du Mile-End, l’exposition Les visages du Mile-End revisités, a mis en vedette le travail du photographe Michel Élie Tremblay à la bibliothèque Mordecai-Richler l'automne dernier.

Avant d’entrer dans la bibliothèque Mordecai-Richler, située en bordure du quartier du Mile End, les premiers clichés du photographe Michel Élie Tremblay accueillent le public, dans le parc Mile End adjacent. Ces premiers fragments du passé capturent des moments inusités des vies de celles et ceux qui habitaient ce quartier riche en histoires, entre le début des années 1980 et la fin des années 1990. À travers des portraits d’enfants qui célèbrent la Saint-Jean-Baptiste ou encore la marche d’une fanfare de quartier dédiée à la fête italienne de la San Marziale, Michel Élie Tremblay dévoile un quartier animé, riche en festivités et en rythmes rassembleurs.

UNE EXPÉRIENCE SOLITAIRE

À l’intérieur de la bibliothèque, l’exposition vivante annoncée laisse plutôt place à un silence sérieux. Aucun guide n’est présent sur les lieux. Les visiteurs sont donc livrés à eux-mêmes pour la découvrir. Les quelques photos qui tapissent les rayons semblent se fondre  dans le décor. Le peu de personnes présentes  sont affairées à lire. Seule une minorité d’entre  elles prennent le temps d’apprécier ces capsules d’une autre époque. 

Pendant que les lecteur·rice·s vaquent à leurs occupations, sans réellement prêter attention  au travail du photographe, les visages capturés par ce dernier dégagent une convivialité humaine sincère. Ces clichés, discrètement placés sur les étagères près de l’entrée, montrent  des moments intimes et spontanés de la vie des habitant·e·s de l’époque. Le public peut y découvrir des portraits de famille de diverses origines culturelles, des discussions entre ami·e·s prises sur le vif dans les rues et les commerces du quartier, ainsi que des sourires confiants, destinés à l’appareil photo de Michel Élie Tremblay. À croire que ces sourires visent également les visiteurs.

LOINTAINE PROXIMITÉ

Le café Olympico, capturé en en 1987, est toujours présent dans le Mile-End. (Crédit photo : Juliette Diallo)

Des quelques personnes présentes lors du passage de Quartier Libre, seul un homme, qui habite le quartier depuis plus de 27 ans, a  voulu s’exprimer sur l’œuvre du photographe, à condition de ne pas être nommé. « C’est une exposition qui est importante pour les gens du quartier », explique-t-il, tout en soulignant  l’aspect historique de la collection, avant d’en- chainer, tout sourire : « on pourrait croire que  certaines photos sont plus anciennes qu’elles le sont réellement ».

C’est à se demander si le noir et le blanc des photographies, et le regard austère mais franc des figures qui peuplent les portraits de Michel Élie Tremblay influencent la réaction du bibliothécaire. 

La confiance entre l’artiste et ses sujets transparait à travers ces portraits recueillis par le photographe pendant deux décennies. Le lien évident tissé entre Michel Élie Tremblay et les instants de vie qu’il capture amène le  public à partager la complicité et la camaraderie qui émane de ces images. Une proximité, qui, aujourd’hui, peut parfois sembler difficile à rencontrer dans le quotidien effréné de la vie moderne…