L’année 2010 a été décrétée « Année de la paix et de la sécurité en Afrique » par la Commission de l’Union africaine. Un voeu pieu, comme en témoignent des conférenciers de retour du Soudan.
Le Soudan a connu plus d’années de guerre civile que de paix depuis son indépendance en 1956. Aujourd’hui encore, il demeure difficile d’entrevoir un retour à la paix, confirmaient les participants à une conférence tenue par le Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix (ROP), tenue à l’Université de Montréal le 21 septembre dernier.
De retour d’un voyage de recherche dans ce pays, la directrice scientifique du ROP, Marie- Joëlle Zahar, soulignait la mauvaise foi du gouvernement soudanais dans la mise en oeuvre d’un processus de paix au pays. Elle rappelle le défi que représentent les divisions au sein du pays, d’une part entre le Nord et le Sud, mais également à l’ouest au Darfour.
La professeure Zahar affirme qu’un des principaux défis à relever pour l’instauration d’une paix durable au Soudan est «le manque criant d’infrastructures et de moyens afin de mettre en oeuvre un véritable processus de paix ». Malgré une forte présence de la communauté internationale, peu d’initiatives ont été prises dans le but de créer des liens entre le Nord et le Sud du Soudan. La division entre ces deux régions demeure une des sources principales de conflits dans le pays. D’autant plus qu’un référendum se prépare en 2011 sur le droit à l’autodétermination de la région d’Abiye, la métropole du Sud-Soudan. Cette situation préoccupe beaucoup Marie- Joëlle Zahar, particulièrement « parce que Khartoum [la capitale] refuse tout débat sur l’indépendance du Sud ».
Un conflit oublié
Kyle Matthews, chercheur principal du Montreal Institute for Genocide and Human Rights Studies de l’Université Concordia, rappelle que plus de deux millions de personnes ont perdu la vie au Soudan en raison de la guerre civile qui sévit depuis 20 ans. Le conflit a aussi fait quatre millions de déplacés.
Guillaume Lavallée, journaliste de l’Agence France-Presse (AFP) basé à Khartoum, explique que, malgré la forte présence de médias internationaux et d’agences de presse, peu d’articles ou de reportages sont repris dans les grands médias nord-américains. «Ce n’est pas que le conflit au Soudan est souscouvert, c’est plutôt la capacité du monde à écouter qui est faible», dit-il. Guillaume Lavallée rappelle aussi que le manque d’infrastructures dans le pays rend le métier de journaliste difficile. «C’est un conflit couvert par téléphone satellite […], le manque de route fait en sorte qu’on assiste très peu à des combats, la majorité du temps on [les journalistes] arrive après et on ne retrouve que des cadavres.»