Pour le professeur à l’École d’architecture Gonzalo Lizarralde, qui dirige l’atelier, l’objectif de l’exposition est de sensibiliser la population à l’urgence d’agir face aux répercussions des changements climatiques.
Cuba est l’endroit idéal, selon M. Lizarralde, surtout d’un point de vue géographique. « C’est la première ligne de bataille, assure-t-il. C’est par là que traversent la plupart des ouragans et des tempêtes tropicales qui sont exacerbés par les changements climatiques. C’est un lieu privilégié pour les observer. »
L’atelier se penche sur le rôle que peut avoir l’architecte dans des problématiques complexes et s’est déjà tenu en Haïti, en Colombie et au Brésil. « Il y a toujours en commun de travailler avec des populations vulnérables, donc des personnes qui vont être affectées par des catastrophes liées aux changements climatiques », précise M. Lizarralde.
Pour le professeur, l’aspect très concret de l’atelier a permis aux futurs architectes d’être confrontés à une réalité qu’ils ne connaissaient pas. « Les notions liées aux changements climatiques sont souvent très abstraites, avance-t-il. L’avantage de cet atelier, c’est de voir physiquement l’impact direct. Quand on parle avec un villageois cubain qui vient d’être affecté par une catastrophe, la perspective des changements climatiques change énormément. »
M. Lizarralde illustre ses propos par des exemples comme la montée des eaux ou des pertes matérielles importantes pour les habitants. « Quand tu vois le côté humain, forcément, ta vision change », insiste-t-il.
Une expérience dépaysante
Le voyage des étudiants les a amenés à rencontrer douze étudiants cubains en architecture de l’Université centrale « Marta Abreu ». Une rencontre et des échanges enrichissants, selon l’étudiante à la maîtrise en architecture Geneviève Maude Leduc, mais pas sans quelques difficultés. « Avec la barrière de la langue, ça nous a forcés à trouver des moyens alternatifs pour nous comprendre et communiquer, explique-t-elle. Au départ, ça a été un frein, mais on parlait anglais et on a dessiné beaucoup, c’est assez universel. »
Le choc culturel a été assez important pour Geneviève, qui se rendait à Cuba pour la première fois. « C’est un pays qui est très différent du nôtre, assure-t-elle. Il n’est pas capitaliste. Les Cubains ont très peu de ressources et ça paraît, mais ce sont des gens extrêmement résilients et très heureux, de ce que j’ai pu voir. »
Concernant la ville de Santa Clara, l’étudiant à la maîtrise en architecture Maxime Savoie a remarqué une différence notable avec ce qu’il connaît. « Les espaces publics étaient beaucoup plus investis que ce qu’on peut voir à Montréal, évoque-t-il. C’est probablement dû au fait qu’ils ont seulement accès au Wi-Fi dans les espaces publics et les universités. Ça faisait en sorte qu’il y avait beaucoup de gens dans les parcs. »
Pour Maxime, outre le travail qu’il a pu effectuer sur place, c’est l’expérience humaine qu’il retient. « C’est vraiment de voir comment, même si on a plein d’a priori sur le système économique et politique, tout est similaire à la maison, avance l’étudiant. On a tous les mêmes aspirations, les mêmes priorités. Ils ont plus de barrières et sont moins privilégiés, mais en fin de compte, c’est la même chose. »
Une spécialité maison
Pour M. Lizarralde, la Faculté d’aménagement de l’UdeM fait partie des chefs de file internationaux sur les questions liées à la vulnérabilité. Selon lui, cela se vérifie par les nombreux professeurs spécialisés dans ces questions, les ateliers qui y sont consacrés ainsi que les publications dédiées à ces problématiques. « Je pense que l’UdeM, aujourd’hui, est un acteur reconnu internationalement sur les questions de gestion de risques », poursuit-il.
Grâce à cet atelier et aux actions entreprises par la Faculté sur ces questions, le professeur espère créer des vocations et permettre une meilleure sensibilisation au sein de la société. « On souhaite créer une nouvelle génération de professionnels qui vont amener du contenu pour des politiques reliées à ces enjeux, décrit-il. Parce que ce qui arrive souvent, c’est qu’on a de bonnes politiques, mais ce sont des coquilles vides. »
Les futurs élèves de l’atelier du professeur Lizarralde connaîtront une nouvelle destination l’an prochain, puisqu’après trois années à Cuba, c’est la ville de Concepción, au Chili, qui sera à l’honneur. « C’est un pays un peu plus riche, mais avec des enjeux énormes liés aux changements climatiques, aux tremblements de terre et aux tsunamis », développe-t-il. Un terrain très propice pour les étudiants, poursuit-il, qui permettra de comparer le système chilien, beaucoup plus moderne, avec ce qui a été fait auparavant.