REINVENTERRA : Le retour

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Par Léa Bertrand
vendredi 30 octobre 2015
REINVENTERRA : Le retour
À Putat en Indonésie, un villageois et sa femme récoltent des cacahuètes à la main. Crédit Reinventerra.
À Putat en Indonésie, un villageois et sa femme récoltent des cacahuètes à la main. Crédit Reinventerra.
Les six participants au projet REINVENTERRA, qui inclut un stage en Asie du Sud-Est et est proposé à l’UdeM dans le cadre de deux cours du Département de science politique*, présenteront leurs documentaires à l’UdeM le mercredi 4 novembre à 18 heures. Durant trois mois, cet été, ces étudiants ont eu l’occasion de traiter des problématiques liées au contrôle et à l’exploitation des ressources naturelles dans la région. Quartier Libre fait un suivi de leur expérience et des difficultés qu’ils ont pu rencontrer.

Pour le professeur au Département de science politique Dominique Caouette, l’empreinte que pouvait apporter chaque étudiant au documentaire faisait partie intégrante du projet. « Chaque documentaire a sa nuance, sa personnalité, parce que chaque documentaire a le regard de son équipe et son vécu », dit-il.

L’un des principaux défis du projet a été l’adaptation à une culture et à un cadre de vie différents. « Il fallait s’habituer à une culture, une nourriture, une température différentes rapidement, tout en assimilant des connaissances techniques, indique Rosanna. C’était intense. » Avant de partir, les étudiants ont suivi des formations pour atténuer le choc culturel. « Des gens peuvent être parfaitement fonctionnels dans la société québécoise et arriver aux Philippines et être vraiment désorientés, raconte M. Caouette. Lors de la sélection, on essaie de trouver des gens qui vont pouvoir s’ajuster. »

Certains étudiants ont aussi été confrontés à la réticence des autorités gouvernementales sur place. Pendant le stage de Lucy et David, les autorités ont menacé de poursuivre le principal intervenant de leur documentaire, le chef des traditions Kenisio Malasan. « Notre intervenant a eu peur, il a voulu arrêter le documentaire, relate Lucy. Il n’y avait finalement aucune base légale à ces menaces, donc on a pu le convaincre de continuer. »

Les étudiants étaient accompagnés d’homologues philippins et d’un assistant de recherche indonésien, partenaires dans le projet, mais aussi d’interprètes. Malgré cela, la langue a souvent représenté un obstacle. « Avec notre principal intervenant, on a pu discuter, mais c’était un peu plus compliqué de parler avec les autres adultes », regrette Lucy.

Des défis techniques

Les étudiants ont dû trouver eux-mêmes le matériel de tournage. « Un des grands défis, c’est qu’on n’a pas un matériel de premier ordre, indique M. Caouette. La qualité varie d’une année à l’autre, selon l’équipement. » Hugo et Tariq ont pu s’acheter du matériel grâce à une campagne de financement participatif.

M. Caouette estime que le projet a été un succès. « Le but premier des documentaires, c’est de pouvoir les utiliser pour venir illustrer le propos d’un cours, indique-t-il. À ce niveau-là, tous les documentaires ont une valeur intéressante. »

Les étudiants ont quant à eux trouvé l’expérience enrichissante. « C’était vraiment quelque chose de fascinant, j’étais entre deux mondes, témoigne Ken-Melvin. Il y a eu beaucoup de défis, mais j’ai énormément appris sur le plan technique. »

L’an prochain, le projet REINVENTERRA à l’UdeM doit se poursuivre en collaboration avec le Third World Studies Center de l’Université de Manille aux Philippines.

Relisez notre article « DocumenTerre », sur les prémices du projet.

*Dans le cadre des cours POL3904 – Travaux pratiques et INT3002 – Stage en milieu de travail.

** David Lévi est collaborateur pour Quartier Libre.

Projection des documentaires le 4 novembre à 18 heures Amphithéâtre 3110 | Faculté d’aménagement

 

Philippines

L’huile de palme

L’étudiante au baccalauréat en études internationales Lucy Lavirotte et l’étudiant au baccalauréat en économie politique David Lévi** ont choisi d’axer leur documentaire sur les répercussions de l’huile de palme sur les populations indigènes. « Ces populations sont très dépendantes des ressources de la forêt, décrit Lucy. Une compagnie minière s’est installée d’un côté du village et de l’autre, il y a des champs d’huile de palme. Ils sont vraiment coincés entre les deux. » Le documentaire met en scène le Panglima [NDLR : le chef des traditions] Kenisio Malasan de la tribu du site de Marebong dans la municipalité de Sofronio Espanola. Dans un style narratif, leur scénario expose les frictions entre modernité et tradition.

L’industrie minière

L’étudiante au baccalauréat en communication politique Rosanna Tiranti et l’étudiant au baccalauréat en économie politique Ken-Melvin Bejer ont choisi de s’intéresser à la région de Rio Tuba, également sur l’île de Palawan, où s’est installé un important site minier de nickel. Les étudiants ont illustré les conséquences de l’industrie minière sur les communautés, tout en gardant une certaine objectivité. « On voulait montrer un portrait de gens affectés par la compagnie minière, explique Rosanna. On ne voulait pas montrer uniquement le côté antimine très repris dans les documentaires, mais plutôt laisser les gens et les images s’exprimer. » Leur documentaire retrace l’histoire de deux familles touchées différemment par la présence de la compagnie.

Indonésie

L’agroforesterie

Les étudiants au baccalauréat en économie politique Hugo Maurer et Tariq Rami ont réalisé leur documentaire sur le village de Putat, en Indonésie. Les habitants ont adopté un mode particulier de culture de la terre pour s’adapter aux conditions difficiles de leur environnement grâce à l’agroforesterie de paysage. « Ils font pousser des teks sur les collines et des cultures vivrières dans les vallées, explique Hugo. On a voulu montrer comment les habitants du village se sont adaptés, mais aussi comment leurs sources de revenus s’adaptent en fonction des saisons. Ils ont apporté une solution très naturelle dans le sens où ils ont trouvé un moyen de composer avec la nature et non contre elle. » Les étudiants ont adopté un point de vue plus scientifique, par le jeu d’allers-retours entre modes de vie des habitants et éclairages des chercheurs.