Réfléchir l’avenir de la planète

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Par Michaele Perron-Langlais
mercredi 18 octobre 2017
Réfléchir l’avenir de la planète
Le codirecteur du CELCP Simon Harel a pris la parole lors de la journée d’inauguration du centre. (Photo : Jèsybèle Cyr)
Le codirecteur du CELCP Simon Harel a pris la parole lors de la journée d’inauguration du centre. (Photo : Jèsybèle Cyr)
L’inauguration officielle du Centre de recherche des études littéraires et culturelles sur la planétarité (CELCP) s’est déroulée le 16 octobre dernier à l’UdeM. Pour les membres de la communauté universitaire et les différents acteurs qui y ont pris part, cette journée a été l’occasion de stimuler la réflexion sur les différents enjeux planétaires et de découvrir les objectifs du centre.
On arrive à une impasse, qui est probablement mise en relief par l’élection d’un Donald Trump, la montée du nationalisme de droite dans l’Union européenne, la crise des réfugiés qui sévit depuis plusieurs années
Simon Harel, Professeur au Département de littératures et de langues du monde et codirecteur du CELCP

«La planétarité, c’est l’après-mondialisation culturelle et économique », résume le professeur au Département de littératures et de langues du monde et codirecteur du centre, Simon Harel. D’après lui, ce concept développé à la fin du xxe siècle provient d’une volonté de réfléchir à l’avenir du monde sans être centré sur l’être humain. « On est tous pris au dépourvu par une réalité politique et militaire qui s’impose et, d’une certaine manière, on est tous figés dans la terreur, dit M. Harel. La notion de planétarité nous permettrait de penser collectivement à des alternatives. »

Des enjeux variés

Le CELCP a pour mission de traiter les questions liées à la planétarité par l’analyse de discours littéraires, linguistiques, scientifiques, théoriques et culturels. Pour y arriver, l’équipe souhaite rassembler des spécialistes de différentes disciplines dans le monde. « Nos membres peuvent être aussi bien des astrophysiciens que des sociologues que des gens qui travaillent dans le domaine de la théorie littéraire, affirme M. Harel. On n’est donc vraiment pas un centre d’études littéraires au sens restrictif de l’expression. » Les recherches touchent entre autres aux enjeux climatiques, économiques et éthiques en lien avec l’avenir de la planète.

La valorisation de la dynamique de recherche-création et le maintien d’un dialogue constant avec les différents acteurs sociaux et culturels font également partie des objectifs visés. « C’est très important pour nous d’être en phase avec la société civile et de ne pas être uniquement un centre universitaire qui est au-dessus de la mêlée et qui ne parle pas au vrai monde, explique le codirecteur du CELCP. On veut se servir de ce centre comme d’un levier pour poser des questions qui vont être totalement actuelles. »

Soutenir la recherche

Des bourses sont aussi offertes à des étudiants et des professeurs pour des projets liés aux études planétaires. Pour la doctorante en études anglaises et boursière du centre Safa Kouki, l’apport du CELCP est beaucoup plus qu’un soutien financier. « Le nom même du centre m’a aidé à conceptualiser mon projet, raconte-t-elle. Le jour où les bourses pour la recherche sur la planétarité ont été annoncées, j’ai réussi à situer mon projet dans ce concept. »

Sa thèse défend l’existence de ce qu’elle nomme une « littérature des camps de réfugiés ». « Il y a des productions littéraires réalisées par des réfugiés et d’autres rédigées en collaboration avec des journalistes ou des écrivains professionnels, fait remarquer Safa. Cette littérature des camps de réfugiés n’est pas prise en compte dans le monde littéraire, donc il y a comme un trou. On en parle en anthropologie, en sciences politiques, mais pas en littérature. Mon projet est de théoriser ce nouveau genre littéraire. »

La doctorante en études anglaises Asma Mestiri a elle aussi reçu une bourse du CELCP. Son projet remet en question la représentation des victimes de trafic humain dans les médias dominants. « Je traite ces histoires telles qu’elles sont dépeintes dans la littérature et la photographie », explique-t-elle. L’étudiante oppose ces représentations artistiques du parcours des victimes de la traite des êtres humains à celles qu’en font les grands médias, notamment aux nouvelles.

Pour Asma, les recherches sur la planétarité visent à résoudre des problématiques culturelles et politiques en imaginant une nouvelle identité internationale, en dehors du langage de crise que transmettent les médias d’information. « Les études planétaires représentent cette nouvelle structure, cette nouvelle façon de produire de la connaissance, relate-t-elle. Pour moi, cela m’aidera à représenter les sujets de traite d’êtres humains dans ce que j’estime être un espace commun efficace. »

Un enthousiasme marqué

« Je pense que beaucoup de gens s’intéressent à ce domaine, mais ils ne connaissent pas nécessairement le centre, parce que c’est encore nouveau, dit Asma Mestiri. J’espère que les gens seront aussi emballés que je le suis. » Dès ses débuts, l’engouement autour du CELCP a d’ailleurs été très fort. M. Harel affirme avoir reçu un appui soutenu de la Faculté des arts et des sciences de l’UdeM, qui croit au projet.

Le codirecteur du centre considère que la pertinence des recherches sur la planétarité est d’autant plus grande dans le contexte actuel. « On arrive à une impasse, qui est probablement mise en relief par l’élection d’un Donald Trump, la montée du nationalisme de droite dans l’Union européenne, la crise des réfugiés qui sévit depuis plusieurs années, constate-t-il. La notion de mondialisme s’essouffle, et il faut penser à un après. » La planétarité devient ainsi un nouveau paradigme pour réfléchir à l’avenir des sociétés.

Le nouveau centre de recherche a déjà prévu plusieurs activités et événements en lien avec ses objectifs, notamment des conférences, des projections de films et la mise en place d’un cercle de lecture. Un premier colloque international aura lieu à Montréal en mars 2018 et un second sera organisé en Roumanie à l’automne suivant.