Qui est Samuel Bronfman ?

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Par Vincent Allaire
mardi 8 février 2011
Qui est Samuel Bronfman ?

Il a vendu de l’alcool à des gangsters de Chicago en pleine prohibition, fondé un empire
économique en plus d’être le patriarche d’une dynastie qui a marqué le XXe siècle au
Canada et aux États-Unis. Il détient un honneur unique, spécifiquement montréalais :
son nom fait référence à la fois à un pavillon de l’UdeM ainsi qu’à un pavillon de
l’Université McGill. Voici l’histoire de Samuel Bronfman, l’homme d’affaires qui ne s’est
jamais laissé saouler par le succès.

Samuel Bronfman en 1936.

Àquelques mois du début de la Seconde Guerre mondiale, la reine Elisabeth II et le roi George VI visitent le Canada. C’est la première fois qu’un monarque régnant foule le territoire canadien. Le Canada se prépare à réserver un accueil chaleureux aux deux monarques. Un homme d’affaires canadien flaire l’occasion. À la tête de l’une des distilleries les plus prospères du Canada, les distilleries Seagram, Samuel Bronfman se met en tête de créer et d’offrir un whisky à la hauteur de la famille royale britannique.

Samuel Bronfman est né au XIXe siècle (1889) à Soroki en Bessarabie, aujourd’hui la Moldavie. Ses parents émigrent au Canada peu après à cause des pogroms menés par la Russie tsariste de l’époque.

C’est de cette façon qu’est né le très canadien Crown Royal. Le whisky obtient un succès populaire dès sa création. Encore aujourd’hui, le Crown Royal reste le whisky canadien le plus vendu aux États-Unis. Samuel Bronfman sera aussi à l’origine du rhum Captain Morgan, en plus de distribuer par le catalogue de Seagram le whisky écossais Chivas Regal et la vodka suédoise Absolut.

Alors que son patronyme signifie en yiddish « l’homme des spiritueux » (liquor man), Samuel Bronfman est devenu brasseur un peu par hasard.

Contrebande

Le Crown Royal reste le whisky canadien le plus vendu aux États-Unis.

Au début des années 1910, Samuel et ses frères gèrent plusieurs hôtels au Manitoba. La vente d’alcool est l’opération la plus profitable de leur activité. Cette source de profits rapides se tarira toutefois avec la promulgation de la prohibition sur tout le territoire canadien dès 1918.

Samuel Bronfman a alors une idée qui fera sa fortune. Malgré la prohibition, l’État canadien n’empêche ni la production d’alcool ni son transport. Il décide donc de se concentrer sur l’exportation d’alcool aux États-Unis, qui sont aussi sous le joug de la prohibition à partir de 1919.

Samuel Bronfman fait affaire avec des contrebandiers associés aux gangsters américains, notamment ceux de la mafia de Chicago, mais cette association a un prix. Son beau-frère est assassiné en 1922 par des contrebandiers. Le scandale éclate.

Samuel Bronfman déménage alors à Montréal pour fonder en 1924 sa propre distillerie. Quatre ans plus tard, il acquiert la distillerie ontarienne Seagram. Dès 1940, Seagram devient la distillerie la plus importante aux États-Unis et au Canada. Homme d’affaires, il devient mécène. Il sera président du Congrès juif canadien de 1939 à 1962 pour ensuite fonder la Fondation de la famille Samuel et Saidye Bronfman. Peu avant sa mort en 1981, il fait construire un pavillon sur le campus de l’Université McGill. Le bâtiment abrite aujourd’hui la Faculté de gestion Desautels.

Samuel Bronfman meurt à l’âge vénérable de 81 ans, mais pas assez vieux pour assister à l’inauguration de son pavillon «udemien». C’est sa famille qui verse à l’UdeM 2,1millions de dollars pour la construction de la Bibliothèque des lettres et sciences humaines inaugurée en 1985 en présence de son fils Charles (premier propriétaire des Expos) et de sa fille Phyllis Lambert (fondatrice du Centre canadien d’architecture).

En 2000, le géant français Vivendi acquiert le conglomérat Seagram pour 38 milliards de dollars. Plusieurs marques détenues par Seagram sont vendues à d’autres entreprises. C’est la fin de l’empire fondé par Samuel Bronfman.