Questions comptables

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Par Dominique Cambron Goulet
mercredi 29 octobre 2014
Questions comptables
Illustration : Mélaine Joly
Illustration : Mélaine Joly
En ces temps de coupes budgétaires, chaque dépense faite par l’UdeM devient questionnable. Déjà, le 21 septembre dernier, le Journal de Montréal titrait un article sur la nomination de nouveaux vice-recteurs : « No­minations en pleine austérité ». On y mentionnait les questionnements de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM (FAÉCUM) sur ces nominations, alors que le budget doit être révisé à la baisse. Rappelons qu’un de ces vice-recteurs est responsable des campagnes de financement. À l’instar d’un représentant commercial d’une compagnie, il est censé rapporter bien plus d’argent à l’institution que le montant de son salaire.

Le 23 octobre dernier, l’UdeM a lancé un appel d’offres pour remplacer la rampe mobile qui relie le métro Université-de-Montréal et le pavillon Roger-Gaudry. On prévoit aussi des réfections majeures dans ce tunnel ainsi que la création d’un espace commercial. Cette rampe, qui a fêté ses 50 ans cette année, mérite amplement une remise à neuf. N’oublions pas qu’elle a régulièrement été en réparations lors des dernières années. Ces réparations ont d’ailleurs duré plusieurs mois l’an dernier seulement.

Le coût de ce projet est évalué à 11 M$. Un montant qui fait sourciller quand on pense au 24,6 M$ de coupes déjà annoncées dans le budget annuel de l’Université. Ce n’est d’ailleurs pas le seul contrat de réfection d’infrastructures d’envergure que l’UdeM accorde cette année. On envisage un montant entre 500 000 $ et 5 M$ pour la réfection du panneau d’urgence de la centrale thermique. On peut prévoir que la pertinence de ces dépenses sera remise en question, si la nomination de deux vice-recteurs l’a également été.

Est-ce que l’Université dépense vraiment trop sur ses infrastructures ? Cette année, l’UdeM prévoit dépenser 65,9 M$ dans la gestion des immeubles, soit 9 % de son budget de fonctionnement. Cette enveloppe comprend les travaux ponctuels, ainsi que les dépenses quotidiennes reliées à l’entretien des infrastructures. En contrepartie, le budget relié à l’enseignement et à la recherche représente 59 % des dépenses, soit 445,8 M$.

Lorsque l’on arpente les couloirs de l’UdeM, il n’est pas rare de voir des signes de vétusté. Faire du « patchage » semble être ici la norme plutôt que remettre en bon état les bâtiments de manière durable. Pas étonnant que tout le monde veuille déménager au Campus Outremont. Doit-on laisser moisir le campus de la montagne sous prétexte de compressions budgétaires ? Lorsque le pavillon Roger-Gaudry deviendra impossible à rénover, on en fera quoi ? Des condos ?

Les 11 M$ que coûtera la réfection de la rampe mobile seront amortis sur plusieurs années budgétaires. Ainsi, on ne peut pas voir cette somme comme la simple moitié du montant des coupes. Il s’agira d’ailleurs d’un excellent investissement si le nouveau tunnel tient pour un autre cinquante ans. Tout comme ce fut le cas pour plusieurs écoles de la Commission scolaire de Montréal récemment, il faut évaluer les coûts de réfection des infrastructures udemiennes au plan patrimonial et non seulement au plan comptable.

Guerre de chiffres

Cette semaine, le recteur Guy Breton réitérait dans son blogue que les universités québécoises disposent d’un budget par étudiant d’environ 3 000 $ de moins que les universités ontariennes, chiffres à l’appui. Toutefois, selon le chroniqueur de La Presse Francis Vailles, ces chiffres sont erronés, puisqu’ils mettent sur un pied d’égalité les étudiants à temps plein et à temps partiel. Étant donné que le Québec compte beaucoup plus d’étudiants à temps partiel que l’Ontario (34 % contre 17 %) et que ceux-ci ne représentent pas les mêmes coûts pour les universités, M. Vailles évalue plutôt l’écart à 1 500 $ par « étudiant équivalent à temps complet ».

Mais pourquoi cette guerre de chiffres pour se comparer encore une fois à l’Ontario ou au reste du Canada ? Le Québec est le seul endroit au monde où les cégeps existent. La réalité de ses universités est ainsi bien différente de celle des universités des autres provinces canadiennes. Comment donc pourrait-on voir si les universités québécoises sont sous-financées ? Peut-être en regardant l’état de leurs infrastructures.