Pour une publicité éthique

icone Campus
Par Lambert Gagné-Coulombe
dimanche 20 octobre 2019
Pour une publicité éthique
Jonathan Nicolas, diplômé du baccalauréat en administration des affaires à HEC en 2012, est le fondateur de GLO. Photo : Jacob Côté.
Jonathan Nicolas, diplômé du baccalauréat en administration des affaires à HEC en 2012, est le fondateur de GLO. Photo : Jacob Côté.
Le fondateur de GLO, Jonathan Nicolas, propose des formations aux étudiants de HEC Montréal depuis cet automne pour aborder les enjeux d’éthique, de transparence et d’intégrité en marketing. Selon lui, ces notions sont manquantes dans les programmes universitaires.

Depuis le 23 septembre, l’entreprise spécialisée en stratégie numérique et en publicité GLO parcourt les universités du Québec avec son programme Nouvelle Garde. Mis en place en partenariat avec l’Association des étudiants en communication de l’UdeM (AÉCUM), il propose des formations gratuites aux étudiants de HEC Montréal. Le but est de les sensibiliser aux enjeux éthiques, un élément qui manque dans le programme du Département de marketing, selon le fondateur de l’entreprise, Jonathan Nicolas.

Au moment de l’obtention de son baccalauréat en administration des affaires à HEC en 2012, M. Nicolas n’avait toujours pas vu la création d’un cours obligatoire portant sur les questions éthiques de l’industrie. « Je trouve ça assez frappant, compte tenu de tous les scandales qui concernent le milieu des affaires, de dire que l’éthique, c’est optionnel, alors que ça ne l’est pas », affirme-t-il. Il faudra attendre l’automne 2020 pour que le cours éthique, gouvernance et droit des affaires soit inclus au programme. Là encore, le père de GLO s’avère pessimiste. « Les questions comme  » À qui appartient la propriété des données [des consommateurs] ? « , dans un cours d’éthique générale, ce ne sera jamais abordé », déplore-t-il.

Éthique et intégrité en marketing, des enjeux tabous

Des étudiants du professeur adjoint du Département de marketing de HEC Montréal, Bruno Lussier, soulèvent la nécessité de dénoncer les problèmes éthiques du marketing. Jonathan Nicolas nomme quelques exemples de stratégies non éthiques au sein du fonctionnement des agences comme la charge de travail donné aux nouvelles recrues, les problèmes de discrimination et le manque de diversité homme/femme, mais aussi sur le plan culturel et ethnique. « Les messages publicitaires manquent aussi parfois de représentativité et de diversité culturelle », explique le fondateur.

Pour remédier à cette lacune dans l’enseignement, M. Nicolas propose des ateliers pratiques aux étudiants de HEC. Lors de ces formations, GLO se concentre sur la relation entre l’agence et les annonceurs. L’entreprise propose de travailler sur quatre grands piliers : la transparence, la collaboration, l’expertise et l’intégrité. L’objectif est de vulgariser l’information, d’impliquer les clients dans la production avec les agences et de mettre les clients en lien avec des experts du domaine. Selon M. Nicolas, parler de ces différents enjeux en marketing demeure tabou pour les acteurs de l’industrie.

Si l’opération première de GLO est d’accompagner ses clients dans leurs campagnes de marketing sur plate-forme numérique, les ateliers de Nouvelle Garde sont la continuité de ce projet. « Si l’on veut être des acteurs de changements dans notre industrie, il ne faut pas juste que ça passe par nos clients, explique M. Nicolas. On a donc décidé de passer par la relève pour former les étudiants et les sensibiliser à ces défis. »

Quand la fatigue se manifeste

Pour le professeur Bruno Lussier, le résultat d’un sondage mené auprès de ses élèves de troisième cycle est d’autant plus inquiétant. Lors de sa dernière réalisation, un tiers des répondants a avoué être assez ou très épuisé, ce qui pourrait, d’après lui, avoir un lien avec les futurs comportements éthiques au sein d’une entreprise. Selon l’une de ses études*, au sein des entreprises, ce sont généralement les employés très épuisés et anxieux qui font part du plus haut taux de comportements non éthiques à l’interne. Il semble donc important pour M. Lussier d’aborder les sujets de l’éthique au sein des cours à l’université.

Le professeur discerne une panoplie d’agissements non éthiques, dont ceux de fausser des informations, de mentir aux employeurs ou aux clients et de ne pas respecter le code d’éthique de l’entreprise. Il note que souvent, les gestionnaires haut placés dans la hiérarchie organisationnelle ferment les yeux quant aux comportements non éthiques, favorisant une performance de production. L’étude couvre un grand ensemble d’industries, une méthodologie qui lui permet de conclure que le comportement éthique est hautement assujetti, entre autres, au niveau de l’anxiété et de l’épuisement chez les employés.

« Je crois que la jeunesse d’aujourd’hui a le pouvoir de changer les choses, mais d’ici là, il faut avoir des outils », conclut M. Lussier. Les étudiants du Département de marketing de HEC Montréal pourront tenter de se procurer ces outils aux prochains ateliers de Nouvelle Garde à Montréal les 4 et 15 novembre prochain, à l’Espace Infopresse.

* Lussier, B., Hartmann, N. N., & Bolander, W. (2019). Curbing the Undesirable Effects of Emotional Exhaustion on Ethical Behaviors and Performance : A Salesperson-Manager Dyadic Approach. Journal of Business Ethics, 1-20.