Portés disparus

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Par Olivier.Simard.Hanley
mardi 12 octobre 2010
Portés disparus
Les soviétologues : disparus avec l'URSS

Les inventions et les innovations ont toujours chambardé certains métiers, qui se sont vus relégués aux oubliettes. Qui se souvient de la phrénologie, la science des bosses du crâne, écartée par la médecine moderne, ou encore du travail de typographe, révolutionné par l’arrivée de l’ordinateur ? Certaines professions ou certains champs universitaires ont eux aussi régressé au point de devenir des disciplines dévolues au passé et à l’Histoire. Examinons les tribulations de quelques disciplines universitaires.

Les soviétologues occupaient un métier très en vogue quand l’étoile rouge était à son zénith. L’utilité de leur emploi sur l’échiquier politique mondial a cependant perdu de son mordant à l’effondrement du bloc communiste. Ceux qui ont appris à scruter et à guetter les politiques du Kremlin ont dû se réorienter à la suite de la chute de l’URSS. Ils ont pour la plupart réussi à recycler leur savoir et sont devenus analystes politiques. L’ouverture des archives de l’URSS a généralisé le champ d’études de la soviétologie, autrefois confiné à des spécialistes très avertis, l’ouvrant à un plus grand public d’historiens. On parle plutôt de nos jours des études slaves ou des spécialistes de la politique d’Europe de l’Est.

Même les spécialistes russes ont dû se trouver de nouvelles carrières : l’International Science and Techno logy Center (ISTC), organisme fondé en 1992, a distribué depuis pas moins de 73000 bourses à d’anciens experts nucléaires de l’exbloc communiste afin d’éviter qu’ils se tournent vers des États voyous.

L’enseignement du latin, autrefois proverbial, se conjugue de nos jours au passé au Québec. Les déclinaisons d’antan n’ont plus l’éclat qu’elles avaient : l’enseignement du latin a été noyé sous le poids de programmes plus variés et éclectiques (la musique, l’éducation physique, les sports). Pourtant, il n’a pas complètement été jeté par-dessus bord. Les États-Unis en sont la preuve vivante. Là-bas, on l’enseigne encore dans les milieux académiques, et il attire même une quantité appréciable d’élèves, nous apprend Thomas McCreight, qui enseigne le latin et le grec à l’Université Loyola de Baltimore. Il mentionne qu’il y a même une pénurie généralisée d’enseignants de latin, ce qui témoigne de l’intérêt qu’on y porte. Enfin, on a même envisagé, dans certains milieux européens, de faire du latin une langue officielle pour les documents de l’Union européenne. Bref, le latin n’est pas mort ! Il tire son épingle du jeu tant bien que mal.

L’esperanto, idiome inventé par un universitaire polonais en 1887, a connu un bon départ, mais demeure complètement marginal. Sans doute moins par contre que le volapuk, langue inventée par un Allemand au début 1900, qui a connu 15 années de gloire, excluant par caprice la lettre « r » de son alphabet. Les locuteurs d’esperanto ont été persécutés sous Hitler et Mussolini et la langue unificatrice mondiale s’avère de nos jours tout simplement être l’anglais. L’esperanto stagne, mais respire encore un peu : les Verts, le parti écologiste français, ont une « Commission esperanto», destinée à encourager son utilisation et son apprentissage pour remplacer l’anglais ! Il y avait même un club d’esperanto à l’Université de Montréal, lancé en 2005, qui paraît aujourd’hui être dormant.

Les soviétologues : disparus avec l'URSS

 

Dans les années à venir, quels métiers sont appelés à changer, ou même à être révolutionnés ? Les bibliothécaires et les libraires tirent la sonnette d’alarme dans un monde dans l’effervescence d’Internet et des médias virtuels. Le journalisme se retrouve aussi aujourd’hui en mauvaise posture. Des universités américaines qui abandonnent leur programme de journalisme (UC Berkeley), des étudiants qui appréhendent le pire dans un futur de «journalisme citoyen». L’agence chinoise de nouvelles Xinhua, ou Chine Nouvelle, se prépare à lancer une gigantesque agence de nouvelles à bas prix, une sorte de Walmart tentaculaire des nouvelles.

Une pièce d’anthologie pour terminer : plus personne aujourd’hui n’est analyste pour la Commission québécoise des vins de messe. La personne responsable (autour des années 1940) était chargée de scruter les caractéristiques chimiques et qualitatives du vin et de sa vigne pour qu’il soit bien conforme aux multiples obligations que le clergé imposait au vin destiné à la messe.