Culture

Oeuvre de l'artiste Francis Koch, membre de la coopérative Cercle Carré

Opération Compost

La coopérative d’habitation Cercle carré a ouvert ses portes le 1er juillet 2010 : 75 travailleurs culturels et artistes y vivent. C’est la deuxième coopérative d’artistes à voir le jour à Montréal. Balade dans un quartier, rencontre avec les résidents, histoire de composteur.

Les rues sont calmes. L’arrondissement de Ville-Marie est à la fois impersonnel et chaleureux : un Gotham City des beaux jours. Sur le toit d’un immeuble, une créature de ferraille se repaît des rayons du soleil. Arrivé rue Queen, je réalise qu’une porte située au premier étage donne sur le vide. Aussi, la parallèle de Queen n’est autre que la rue King ; on doit encore en rigoler à la commission d’urbanisme. Au bout de la rue, de l’autre côté du fleuve, l’immense silo numéro cinq. La façade de Cercle carré se dresse devant moi, mur de briques rouges. Elle s’insère parfaitement entre les anciens bâtiments. Le cabinet Douglas Alford, qui a dessiné le projet, respecte l’énergie du quartier et n’en brise pas la composition.

Oeuvre de l'artiste Francis Koch, membre de la coopérative Cercle Carré

Christiane Vien, présidente du CA, me reçoit dans l’espace de diffusion culturelle Cercle carré. Ce lieu accueille les expositions et les activités communes. Un projet d’oeuvres créées collectivement devrait y voir le jour l’année prochaine. Christiane m’explique que les membres de la coopérative ont décidé d’agir concrètement pour préserver leur environnement. Dans cette optique, Michael Hawrysh, un collaborateur de l’Éco-quartier Saint-Jacques, présente aux artistes leur nouveau composteur suédois – qui est malheureusement introuvable chez Ikea. À cet instant, il est clair que s’impliquer dans une coopérative représente bien plus qu’être seulement copropriétaire. Les membres sont tous intéressés par le projet, une véritable complicité existe entre les résidents. Sur une vague d’éclats de rire, le groupe contemple la bête. Elle ressemble à ces appareils de loterie, dans les foires et kermesses. D’ailleurs, Jacques Charbonneau, un des importateurs de l’outil, propose d’effectuer un tirage au sort. Les bulletins sont placés à l’intérieur du composteur, il tourne une fois le compartiment et le numéro 708 est pioché. Marie Marais, un des sept membres fondateurs reçoit le trophée : un tablier vert !

La récipiendaire m’accompagne dans l’exploration de la coopérative. Si les couloirs sont tristes, ouvrir une porte d’appartement s’apparente à soulever le couvercle d’un coffret d’épices. Parfums et couleurs se mêlent pour créer un patchwork d’ambiances au sein de l’immeuble.

Marie m’explique qu’il y a trois critères principaux pour intégrer la coopérative. Une première contrainte est le revenu maximum : 75 % des habitants doivent toucher moins de 25 000 dollars par an. Les loyers sont modiques : 503 $ et 577 $ respectivement pour des 3 1/2 et des 4 1/2. Ils servent à rembourser le prêt ayant servi à la construction de l’immeuble et à rendre possibles les activités de l’association. C’est le Groupe Conseil en développement de l’habitation qui a aidé la coopérative dans ses démarches. Aussi, les membres doivent être engagés professionnellement dans le milieu artistique et être prêts à s’investir dans le communautaire. Ce sont eux qui remplissent les charges de différents comités : entretien, relations publiques, finances, bon voisinage…

En quittant le lieu, j’apprends que les artistes sont aussi des entrepreneurs. L’un d’eux gère un commerce de noix dont profitent tous les occupants.

Lezarts, l’autre coopérative d’artistes qui est en activité depuis huit ans, se situe dans le quartier Centre- Sud et accueille des créateurs en arts visuels et médiatiques. Les deux organismes font partie de la Fédération des coopératives d’habitation intermunicipale du Grand Montréal. La rumeur court qu’une troisième coopérative se forme dans les environs du Mile-End.

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