Campus

Éthique sur tous les plans

Quartier Libre : D’où vient l’initiative de créer un cours d’éthique en aménagement ?

Gonzalo Lizarralde : En fait, cela est parti de deux sources différentes. D’un côté, le Département de philosophie avait déjà décidé d’intégrer des cours d’éthique dans les programmes des facultés qui seraient intéressées. De mon côté, j’avais envie qu’on propose un cours de ce genre aux étudiants en aménagement, parce que je crois que c’est un aspect important de la pratique. Nous sommes constamment confrontés à des problèmes d’éthique, mais il n’existait pas encore, à l’UdeM, une formation spécifique sur le sujet. Donc on s’est rencontré, Christian Nadeau [cofondateur] et moi, et nous avons décidé ensemble de mettre sur pied ce projet.

Q. L. : Pourquoi trouviez-vous important qu’un tel cours soit proposé aux élèves de la Faculté d’aménagement ?

G. L. : Nos diplômés, lorsqu’ils entrent sur le marché du travail, ont des décisions à prendre qui auront inévitablement un impact direct sur la société. Ce que nous voulons, c’est former des professionnels qui auront la capacité et les connaissances nécessaires pour faire des choix raisonnés et éthiques par rapport aux différents projets sur lesquels ils auront à travailler.

Q. L. : Au sein du cours, comment les approches de philosophie et d’aménagement se complètent-elles ?

G. L. : Le cours se divise en deux volets qui forment finalement un ensemble. L’équipe de Christian Nadeau (professeur au Département de philosophie) s’occupe de placer les fondements de base des différentes théories éthiques en philosophie et d’expliquer les différentes approches, alors que mon équipe s’occupe du volet architectural, de la mise en application des éléments théoriques aux enjeux particuliers de l’aménagement. L’enseignement conjoint des deux domaines vise à porter l’étudiant à se questionner sur les grands enjeux éthiques en aménagement, ce qui l’aidera, par la suite, à prendre des décisions plus éclairées en situation réelle.

Q. L. : Quels sont, justement, les enjeux éthiques liés à l’aménagement ?

G. L. : Quand on fait un projet d’aménagement, celui-ci aura des conséquences sur trois différents aspects du monde : la société, l’environnement et l’objet même du projet. Les décisions que nous prenons par rapport à notre projet auront un impact direct sur la qualité de vie de la population environnante. Une population qui, de plus, n’est pas forcément « consentante » aux divers effets des projets architecturaux puisqu’elle ne peut donner son avis. Nous cherchons donc à prendre des décisions qui auront des conséquences positives sur l’environnement, mais qui pourront également profiter aux gens qui habitent la ville concernée par le projet d’aménagement.

Q. L. : Avez-vous un exemple d’application concrète ?

G. L. : Oui, parfaitement. En éthique, souvent, nous avons affaire à des dilemmes. Par exemple, nous savons que les villes tentent de plus en plus d’aménager des espaces verts afin que tous puissent profiter de l’air frais et de la nature, même dans les grands centres. Par contre, cet élargissement des zones vertes a pour conséquence de densifier les zones urbaines. Il y a moins de logements disponibles et le prix de ceux-ci, par conséquent, grimpe. À ce moment-là, ça fait en sorte que les personnes moins fortunées de la société ne peuvent plus se permettre d’habiter la ville. Alors, on a un impact positif sur l’environnement, mais un impact négatif sur la population. C’est le cas, notamment, à Londres. L’inverse est aussi possible, mais dans tous les cas, face à un tel dilemme, il faut savoir faire un choix éclairé et moralement correct.

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