Pour la professeure au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques Marion Froger, le Cinéma Politica et le Ciné-Campus répondent à deux missions totalement différentes et ciblent des publics tous aussi divergents. « Lorsqu’on va au ciné-club politica, c’est pour regarder des films qui échappent au circuit commercial et que l’on ne verra pas ailleurs, explique-t-elle. Ce sont des films qui sont vus soit dans des milieux politisés, soit dans des milieux activistes. »
L’étudiante au baccalauréat en biologie Laura Melissa Argueta admet que les deux expériences sont complètement différentes. « Je suis allée au Cinéma Politica de Concordia pour la projection d’un documentaire alors qu’au Ciné-Campus de l’UdeM, j’y suis allée pour voir un film étranger », dit-elle.
Le concept du Cinéma Politica invite à l’échange, selon le chargé de cours au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques Hubert Sabino. « L’idée que les ciné-clubs soient au sein des universités replace les institutions dans leur sphère éducative et favorise le débat, la discussion et la réflexion », souligne-t-il.
L’étudiante au baccalauréat en enseignement en adaptation scolaire Christine Perry abonde dans ce sens. « Ce qui me plaît, c’est qu’il y a des spécialistes à la fin de la projection qui laissent la place à la discussion pour pouvoir pousser la réflexion plus loin », affirme-t-elle.
L’Université McGill, l’Université Concordia, l’UQAM et l’Université Sherbrooke possèdent toutes les trois un Cinéma Politica. Pour
M. Sabino, la position géographique de l’UdeM est un obstacle potentiel à la création d’un tel ciné-club. « McGill, Concordia et l’UQAM sont peut-être davantage accessibles puisqu’elles sont situées au centre-ville, explique-t-il. Peut-être que les gens ont le réflexe de se rendre au centre-ville pour leurs activités culturelles et sociales. Reste qu’il y a un grand bassin d’étudiants, d’employés et de citoyens autour de l’UdeM et que ces personnes pourraient profiter de la présence d’un Cinéma Politica dans leur communauté. » D’autres initiatives s’apparentent pourtant à la démarche réflexive du Cinéma Politica à l’UdeM telles que le ciné-philo ou encore l’anthropologie visuelle.
Une initiative avant tout étudiante
En plus de nécessiter un local approprié à la diffusion de films, le lancement d’un ciné-club affilié au réseau du Cinéma Politica nécessite un minimum de quatre étudiants bénévoles. Ces derniers doivent être motivés à organiser des collectes de fonds pour payer les frais d’adhésion annuels.« Ce type d’initiative est rarement lancé par les instances universitaires elles-mêmes, affirme Mme Froger. Il faut que cela vienne des étudiants. »
Lorsqu’une demande pour un documentaire en particulier se fait sentir, les Activités culturelles de l’UdeM tentent d’y répondre par l’intermédiaire du Ciné-Campus. « Sur nos six programmations à l’année, on essaie toujours d’inclure des documentaires et d’inviter des experts qui pourront balancer les points de vue », assure la conseillère aux Activités culturelles Chloé Ferland-Dufresne.
Une demande à laquelle répond par exemple la diffusion du documentaire de la réalisatrice américaine Laura Poitras, Citizen Four, qui aura lieu début février. « Ceux qui n’auront pas eu l’occasion d’aller le voir aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal pourront se rattraper au Ciné-Campus », affirmela coordonnatrice du Ciné-Campus, Amélie Michaud.
Malgré tout, certains étudiants regrettent de ne pas avoir un espace dédié aux documentaires politiques. « Je trouve ça dommage de devoir aller dans une autre université pour assister à la projection de documentaires », souligne l’étudiante à la majeure en biologie Laura Melissa Argueta.
« Je pense qu’un Cinéma Politica serait bénéfique pour la vie sociale et culturelle à l’UdeM, autant pour les étudiants que pour les différents employés, explique M. Sabino. Un Cinéma Politica à l’UdeM permettrait d’affirmer davantage la place de l’Université comme lieu de réflexion sur les enjeux sociaux, politiques ou environnementaux actuels ainsi que sur l’art ou le cinéma. » Selon le chargé de cours, malgré la présence de quelques ciné-clubs à l’Université, aucun ne comble réellement l’objectif d’un Cinéma Politica.