Les idéaux de jeunesse mis à l’épreuve

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Par s.osama
mercredi 26 janvier 2011
Les idéaux de jeunesse mis à l'épreuve

Des années 1980 à 2003, Leslie Muller ou le principe d’incertitude, le dernier roman de Lynn Diamond, suit le parcours d’un groupe d’amis militants : au fil des ans, la naïveté et les idéaux laissent place à des rêves brisés et à la résignation.

En juillet 1981, Leslie Muller, la narratrice du roman se retrouve au Nicaragua. Tout sauf touristique, ce pays d’Amérique centrale vit des moments troubles et violents. « C’était pour la plupart d’entre nous la première fois que nous voyagions dans un pays qui non seulement faisait partie du tiers-monde, mais venait d’être bombardé», raconte Leslie. En effet, une junte avait réussi à chasser le dernier descendant d’une série de dictateurs, la famille Somoza, qui gouvernait le Nicaragua depuis les années 1930 et son dernier représentant, Anastasio Somoza Debayle, démissionne et quitte le pays en 1979. Par la suite, la junte formée de plusieurs partis se dissout à cause du pouvoir de plus en plus étendu du sandiniste Daniel Ortega qui, par l’intimidation et surtout l’aide des États-Unis, se fait élire à la présidence en 1984. Le peuple du Nicaragua fait les frais de ces bouleversements politiques, victime de bombardements ordonnés par ceux qui s’opposent au pouvoir en place; des bombardements comme celui dont témoigne Leslie Muller et qui tue, entre autres, un enfant innocent qui jouait à faire peur à des chats et des poules.

Leslie Muller fait partie d’un groupe de « Nord-Américaines pétries d’idéaux», des brigades qui sont présentes sur place pour aider dans des garderies, des hôpitaux et des résidences pour personnes âgées. C’est à ce dernier endroit qu’elle rencontre Josua, qui deviendra le grand amour de sa vie. Jeune vétéran de la guerre du Vietnam, il dispense des soins médicaux au Salvador, pays proche du Nicaragua.

Le retour au réel

Étalé sur plus de vingt ans et alternant entre des chapitres au Nicaragua, à New York et à Montréal, le récit retrace le retour à la vie normale, à la réalité, de chacun des personnages. Après avoir scandé des slogans révolutionnaires, la narratrice, elle, se retrouve propriétaire d’un logement à Montréal et fonde une entreprise de rénovations d’appartements avec Tammy, une amie rencontrée en route vers le Nicaragua. Les amitiés sont d’ailleurs au centre du roman. Elles servent à suivre l’évolution de chaque personnage et illustrent les idéaux qui se brisent au fil du temps. «Nous pensions, mon groupe et moi, pouvoir transformer le monde […]. J’avais vécu au coeur d’une idée, non pas dans le monde, mais dans l’idée du monde.» Mais la loi du plus fort continue à dominer au Nicaragua, et ailleurs dans le monde, malgré le désir de milliers de jeunes coopérants. Leslie Muller dit «[…] qui n’a pas songé au suicide au début de l’âge adulte en réalisant ce qu’il faut de compromis, d’hypocrisie et de courage pour survivre». Les choix de vie cités par le groupe d’amis dans le roman sont peu nombreux. Selon Lili, l’une des ex-militantes, les jeunes adultes peuvent «prendre une hypothèque [ou], faire des enfants».

Comment faire pour supporter les horreurs de la guerre ou des bombardements quand on est coopérant venu d’un pays occidental où la vie est plutôt confortable ? Comment retourner à cette même vie quand on a vu d’autres populations se battre pour survivre ? Comment gérer sa vie personnelle, professionnelle et sentimentale quand on est hanté par ce que l’on a vécu dans des pays en guerre? Ce sont là des questions abordées dans le roman de Lynn Diamond. À lire pour tous les étudiants qui rêvent de changer le monde…