Les champs de batailles de la télévision

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mercredi 16 mars 2016
Les champs de batailles de la télévision
Crédit Photo : Courtoisie Evert F Baumgardner - National Archives and Records Administration / Creative Commons
Crédit Photo : Courtoisie Evert F Baumgardner - National Archives and Records Administration / Creative Commons
En surface, c’est un conflit générationnel. Les études se multiplient, la preuve est irréfutable : les jeunes regardent de moins en moins la télévision. Mais au-delà de ces questions de génération, c’est surtout les usages qui évoluent. Retour sur les raisons de cette désertion.

Tout d’abord, la télévision, c’est le téléviseur, l’appareil-meuble autour duquel gravite la famille nucléaire parfaite des publicités des années 1950. Mais la télévision, c’est aussi le flux continu d’images reçu sur le téléviseur et émis par les chaînes de télévision. Longtemps, l’un n’allait pas sans l’autre, d’où le double sens. Mais aujourd’hui, tout est chamboulé. Non seulement peut-on voir la télévision, le flux, depuis presque n’importe quel appareil électronique connecté à Internet, mais en plus, Internet est accessible depuis son téléviseur. Rien ne va plus dans le meilleur des mondes.

En réalité, c’est autant les manières que les moyens de consommer la télévision qui ont évolué. Alors que « le film du vendredi soir » était le rendez-vous immanquable des téléspectateurs il y a encore quelques années, il n’est maintenant qu’un choix parmi d’autres. Pour les films et les séries, les services de vidéo à la demande, dont Netflix est le vaisseau amiral, ont complètement changé la donne, avec les problèmes que cela peut susciter.

Pour certains, Netflix est cette longue maladie rongeant les chaînes de télévision jusqu’à l’os. En 2015, le service de vidéos à la demande a vu son audience américaine augmenter de 32 %, tandis que celle de la télévision baissait de 3 %. Toutes les chaînes ne sont pas touchées de la même manière et, sans surprise, les plus ébranlées sont celles proposant un contenu similaire à Netflix : des séries et des films. Car la télé, ce n’est pas que ça, c’est aussi des émissions. Et là, l’ennemi est ailleurs, peuplant les foisonnantes jungles d’Internet.

Chaînes de télé et chaînes YouTube

Qu’elles soient culturelles, sportives, scientifiques ou divertissantes, les émissions sont le cœur des chaînes de télévision. Sur TVA, La Voix continue encore de battre des records. Pourtant, sur YouTube, certaines émissions rassemblent une communauté au moins aussi importante de fidèles. Bien sûr, on peut aisément supposer que l’un n’empêche pas l’autre, et regarder les vidéos de PewDiePie [NDLR : « YouTubeur » le plus suivi du site avec près de 43 millions d’abonnés] sur YouTube n’empêche pas de suivre La Voix.

Mais une heure passée sur YouTube ou Netflix, c’est une heure de moins à regarder la télé. Et les téléviseurs sont la preuve tangible de ce déclin du flux continu d’images. Aujourd’hui, le téléviseur n’est plus le meuble d’antan, mais un appareil électronique connecté comme un autre, proposant aussi bien d’accéder aux vidéos YouTube et aux programmes Netflix que de voir TVA à la demande, ou en direct. D’ailleurs, c’est peut-être pour cette raison que la télévision comme flux ne disparaîtra pas aussi simplement. La possibilité de voir des évènements quand ils se déroulent continuera de nous faire regarder la télé. Les récents attentats de Paris ont fait battre des records d’audience aux chaînes d’info en continu, tandis que les évènements sportifs remplissent toujours les bars équipés d’une télévision. La télé est peut-être une victime collatérale d’Internet, mais la blessure n’est pas aussi mortelle qu’on le croie.