Itinérance : L’empathie par l’expérience (partielle)

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Par Zacharie Routhier
mercredi 10 avril 2019
Itinérance : L’empathie  par l’expérience (partielle)
Crédit photo : Zacharie Routhier.
Crédit photo : Zacharie Routhier.
Pendant une semaine, une dizaine d’étudiants se sont succédé sur le campus de l’Université McGill, dormant à l’extérieur la nuit et récoltant de l’argent pour les personnes en situation d’itinérance le jour. Sans prétendre connaître véritablement la réalité de ceux qui vivent dans la rue, les militants de 5 days for the homeless estiment néanmoins que tenter de se glisser dans le quotidien de l’autre permet de développer de l’empathie à son égard.

Mercredi 20 mars 2019, 22 heures. Huit étudiants et un chien sont rassemblés au sous-sol du pavillon Bronfman. « J’ai pris les bons sacs de couchage. C’est le genre de trucs que les nouveaux ne savent pas ! », lance à la blague l’étudiante Katharine Birkness, qui en est à sa quatrième nuit de la semaine à l’extérieur. Mais elle ne juge pas pour autant ses camarades qui en sont à leur première nuitée. « La première fois, tu ne dors pas du tout, raconte celle qui termine son baccalauréat en sciences cognitives. C’est si inconfortable, si froid, et tu ne sais pas trop ce que tu fais. Mais la seconde, j’étais si fatiguée de ne pas avoir dormi la veille que j’ai vraiment bien dormi ! »

Le manque de sommeil est l’une des réalités de l’itinérance à laquelle les participants de 5 days for the homeless, qui doivent continuer à se rendre en cours, se heurtent. « Tu as un aperçu de comment cela affecte tout le reste », expose l’étudiante au baccalauréat en développement international Jade Perraud, qui participe au mouvement pour la deuxième année.

Alors, pourquoi le faire ? « Ça peut aider à développer de l’empathie, croit la directrice du comité encadrant l’activité, Suraiya Foss-Philipps. Juste de voir en surface ce que signifie être en situation d’itinérance, d’en avoir un aperçu et à quel point c’est difficile. » En plus de ne pas pouvoir accéder à leur appartement ou aux douches, les étudiants qui participent à l’expérience complète doivent également se limiter aux dons pour se nourrir.

Sensibiliser, mais aussi redonner

Durant leur temps libre, les participants récoltent des dons sur le campus. « C’est un peu confronter les étudiants. Est-ce qu’ils vont nous donner de l’argent et nous parler, à nous, parce qu’on est étudiants, et pas à des itinérants qu’ils voient tous les jours ? » illustre Suraiya. Pour elle, c’est aussi l’occasion de discuter avec les étudiants et de les sensibiliser à la cause.

Cette année, cet effort aura encouragé une nouvelle étudiante, Megha Eaker, à participer à 5 days for the homeless. Après avoir croisé le collectif sur le campus McGill plus tôt dans la semaine, celle qui étudie à la maitrise en sciences infirmières a décidé elle aussi d’y prendre part. « En tant qu’infirmière [souhaitant travailler avec les personnes en situation d’itinérance], comprendre la réalité d’une personne me permet de mieux l’aider », explique-t-elle.

L’initiative, qui s’étend sur un cycle ininterrompu de cinq jours, aura aussi permis de récolter plusieurs milliers de dollars. « On ne prétend pas qu’on sait exactement comment redonner aux personnes en situation d’itinérance », prévient Jade. C’est pourquoi les dons ramassés par les participants sont remis à Dans la rue et à Chez Doris, deux organismes communautaires impliqués directement dans le milieu, et avec lesquels ils entretiennent des liens pour divers projets connexes.

« Dormir dehors n’est qu’une petite partie de ce qu’on fait [en tant que comité], raconte Jade. Malheureusement, c’est le genre de choses qui fait que les gens y prêtent attention. » Le reste de l’année, le collectif participe notamment à l’initiative Faisons pour deux, qui invite les étudiants à cuisiner en double leur repas du midi, pour en donner la moitié à quelqu’un dans le besoin.