L’EDI à l’université Laval au cœur d’une polémique

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Par Alexia Boyer
mardi 10 janvier 2023
L’EDI à l’université Laval au cœur d’une polémique
L’administration de l’Université Laval dialogue avec un groupe d’étudiant·e·s qui réclament l’abolition d’un critère de recrutement pour les postes de chaires de recherche du Canada. Ils dénoncent une solution qui impliquerait «plus de discrimination» et négligerait l’excellence universitaire.

Les hommes blancs sont-ils discriminés au sein de l’Université Laval? Des étudiant·e·s devaient rencontrer l’administration de l’Université ce lundi 9 janvier afin de discuter de cette question.

Le 31 décembre dernier, six associations étudiantes de l’Université ont cosigné une lettre adressée au Programme des chaires de recherche du Canada, en réaction à un document d’appel de candidatures réservé aux femmes, aux Autochtones, aux personnes en situation de handicap et à celles appartenant aux minorités visibles. La création de ce critère fait suite aux quotas d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) imposés par Ottawa pour octroyer les fonds du Programme des chaires de recherche du Canada.

Les associations signataires de la lettre réclament l’abolition de ce critère, qui exclut les hommes blancs non handicapés des appels aux candidatures pour des postes de chaires de recherche du Canada, au profit de « politiques qui adressent [l]es enjeux [d’équité, de diversité et d’inclusion] avec plus de profondeur, en sollicitant plus d’efforts et en s’attaquant à la racine du problème ».

Le document d’appel à candidatures cité dans la lettre, qui date du 13 septembre 2021, avait déjà déclenché une polémique au printemps 2022.

De Guy Nantel à l’Assemblée nationale

L’humoriste Guy Nantel avait déjà interpellé les dirigeants de l’Université Laval le 28 mars 2022 sur Twitter. « Quand un jeune homme blanc non handicapé fait une demande pour étudier chez vous, est-ce que vous l’avisez en amont qu’il sera exclu de différents avantages en raison de son physique et ce, peu importe ses compétences ? », leur avait-il demandé.

La publication avait entraîné une cascade de réponses de responsables politiques au Québec, que Le Journal de Québec[1] avait rapportées. Le ministre de l’Éducation de l’époque, Jean-François Roberge, avait notamment déclaré aux médias que « discriminer pour combattre la discrimination, c’est une fausse bonne idée ».

Celle qui était alors cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade, avait partagé un avis similaire, tout en soulignant être « en faveur du fait qu’on doit avoir une meilleure représentativité ».

Le chef du Parti Québécois, Paul St-Pierre Plamondon, avait, lui, dénoncé une « idéologie qui nous vient du financement fédéral ». Enfin, le co-porte-parole de Québec Solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, avait plaidé pour « des manières plus progressives d’atteindre ces cibles-là », sans toutefois condamner la démarche.

Autres solutions

Si les étudiant·e·s ne s’opposent pas à la mise en place de politiques d’EDI, le mouvement dénonce la manière dont celles-ci sont appliquées. Les sept points développés dans la lettre tendent à démontrer que le critère de sélection selon lequel seules seront sélectionnées les candidatures « s’étant auto-identifiées comme membre [sic] d’au moins un de ces quatre groupes sous-représentés » ne combat pas efficacement les discriminations subies par ces populations et ne fait que créer une nouvelle discrimination envers un autre groupe.

Autrement dit, selon ce mouvement, « l’Université Laval ne fait rien d’autre que masquer la discrimination sans s’attaquer à ses sources complexes, en plus de négliger complètement la situation d’autres groupes démographiques qui subissent de la discrimination sans être ciblés directement par ces mesures ».

Les représentants du mouvement ont réitéré ces arguments au micro de TVA Nouvelles le 8 janvier dernier. Le titulaire d’un baccalauréat en biologie de l’Université Laval et militant au Parti conservateur du Québec François Plamondon déplore que la solution à la discrimination qui existe dans le domaine de la recherche soit d’imposer « plus de discrimination ».

« Avant tout, les gens ici, c’est l’élite, ajoute l’étudiant à la maîtrise en biologie à l’Université Laval Louis-Joseph Brouillard. C’est l’élite de la recherche scientifique, donc avant d’être blanc, noir, femme, hétéro, ce sont des gens qui sont des experts, et c’est surtout ça qui est important. Je considère que c’est réducteur. »

Parmi les solutions que ces étudiants avancent se trouvent le recours aux CV anonymes ou encore une « revue annuelle des différents groupes sous-représentés » effectuée par la Confédération des associations d’étudiants et étudiantes de l’Université Laval (CADEUL).

[1] LARIN Vincent, Université Laval (2022) : «L’exclusion des hommes blancs est “exagérée”, dit Québec», Le Journal de Québec, 30 mars 2022 [consulté le 9 janvier 2023] https://www.journaldequebec.com/2022/03/30/universite-laval-lexclusion-des-hommes-blancs-est-exageree-dit-quebec