Fier et radieux, Dany Laferrière présente son nouveau livre L’art presque perdu de ne rien faire, un recueil de courts essais, une forme d’art qui, selon l’auteur, doit être pratiquée avec le sérieux d’un athlète. Rencontre avec le chouchou de la presse littéraire, qui maîtrise bel et bien l’art de méduser et de séduire son auditoire.
« Je crois fortement que le roman est une affaire de corps et que les idées sont une affaire d’esprit. Mais l’esprit est chevillé au corps. Il n’y a pas de différence. Vous le verrez d’ailleurs dans ce livre. C’est un mélange d’éclats biographiques et de réflexions. Je revisite un peu les mêmes zones : l’enfance, l’adolescence, la petite galerie de ma grand-mère, ma mère, Montréal, les voyages. Mais cette fois-ci, c’est soutenu par les idées, les réflexions », raconte Dany Laferrière.
Vers 11 heures, aux bureaux des Éditions du Boréal, l’écrivain apparaît tout content et demande à son attachée de presse et au directeur général de la maison d’édition de retirer la table qui crée une distance entre lui et nous. Il s’assoit. Avec naturel et aisance, d’un calme olympien, il explique qu’il voulait ce livre « copieux » ; c’est-à-dire un recueil de toutes les émotions et sensations qui l’ont traversé ces dernières années.
Réfléchir comme un sportif
L’auteur insiste pour dire qu’il n’est pas un penseur. En souriant, il lance que : «réfléchir, c’est le fun […], mais il faut le faire comme un athlète». Pour lui, réfléchir est intéressant quand on le fait sérieusement, à la manière d’un grand sportif. Il ajoute que se détourner des courants de pensée à la mode est extrêmement important. «Dans mon livre, je délire en présence de tout le monde». Au fil de ses essais, il propose de courtes réflexions personnelles sur la vie, la mort, la littérature, entre autres. Mais il précise qu’il ne cherche pas à avoir raison. Il s’agit plutôt de marquer un «temps d’arrêt» qu’il convertit en réflexion.
Ce qui fait vivre
Arrive le moment d’un tête-à-tête chaleureux avec l’auteur dans une petite pièce fermée. Bien que Laferrière «striptease » sa pensée dans ses livres, serait-il tout compte fait un écrivain du secret ? Dans son dernier livre, il écrit : «Tout homme cache un secret, on le sait – cela peut arriver qu’il l’ignore lui-même. Et tout paparazzi s’évertue à découvrir la star.» En personne, il répond que «le vrai secret est celui que l’on porte en soi. C’est le secret de la vie, le secret qui fait vivre.»
Ce qui fait vivre réside aussi métaphoriquement dans un fruit mûr. La mangue est pour l’auteur un autre élément qui fait vivre. «Pour moi, c’est la métaphore de l’enfance et de la vie. C’est le goût de la vie. C’est un moment de gratuité», dit-il. Dans son livre, les textes se déclinent sous le thème de « » manger une mangue, compter les hivers avec du saké, chercher sa mère, lire la poésie, etc. Pour l’auteur, ce sont des arts qu’il faut cultiver. Il nous offre donc ce dernier fruit mûr où ses lecteurs découvriront que l’art de ne rien faire n’empêche pas l’art de réfléchir.