Il y a un an, Hong Kong traversait la plus grande crise politique depuis sa rétrocession à la Chine en 1997, alors que le mouvement des parapluies s’imposait dans son paysage politique. De fin septembre à décembre 2014, des milliers de Hongkongais, dont une majorité d’étudiants, ont bloqué la ville afin de demander la mise en place d’un suffrage universel direct pour l’élection du chef du gouvernement en 2017. Un an plus tard, le mouvement paraît être dans l’impasse.
L’année dernière, la mobilisation de Hong Kong a fait descendre dans les rues de nombreux étudiants pour qui le parapluie est devenu symbole de ralliement, mais aussi moyen de protection contre les gaz lacrymogènes utilisés par les forces de l’ordre pour les disperser.
Le mouvement semble s’être épuisé, selon l’étudiant au baccalauréat en études internationales à l’UdeM Valentin Habasque, en échange à l’Université de Hong Kong durant la session d’hiver 2015. « Il n’en restait rien de visible dans la ville, précise-t-il. Sur le campus, seuls une bannière sur la fenêtre du bâtiment des résidences et le local principal de l’association des étudiants, rempli de fournitures pour les manifestations, témoignaient du mouvement de l’année d’avant. »
Le projet électoral de Pékin au cœur du débat politique
Dans la lignée des mobilisations de 2012 contre les cours de patriotisme chinois, le mouvement des parapluies s’est déclenché sur fond d’un débat concernant les modalités de désignation du chef de l’exécutif, dirigeant politique de la ville. Pékin soutenait une réforme électorale proposée en août 2014 mettant en place un suffrage universel avec un filtre : un comité de nomination destiné à approuver les candidats. Cette condition a provoqué la mobilisation du camp pro-démocrate. Celui-ci estimait alors que la capitale tentait d’écarter les candidats qu’elle ne voulait pas voir élire et que les élections n’avaient du suffrage universel que l’apparence. « La résignation des Hongkongais vis-à-vis de Pékin et de leur gouvernement est très perceptible », juge Valentin.
Bien que la mobilisation du mouvement des parapluies n’ait pas abouti à l’obtention d’élections libres, le chargé de cours d’analyse de l’actualité au certificat en journalisme de l’UdeM Marc Laurendeau estime que la mobilisation n’a pas été vaine. « C’est une bonne chose que les Hongkongais se manifestent, soutient-il. Le mouvement des parapluies leur a donné une forte visibilité sur la scène médiatique internationale. » Cette visibilité profite d’ailleurs à l’un des leaders étudiants du mouvement, Joshua Wong, dont les propos sont fréquemment relayés par les médias occidentaux.
L’avenir démocratique incertain
Le 18 juin dernier, le Parlement de Hong Kong n’a finalement pas adopté la réforme électorale soutenue par Pékin en août 2014. Les députés du camp pro-démocrate de Hong Kong ont jugé les conditions de Pékin inacceptables. Ils ont voté contre son projet de réforme électorale qui n’a pu obtenir la majorité, le mettant ainsi en échec.
Malgré les imposantes mobilisations de l’an passé et le rejet par les parlementaires de son projet électoral, Pékin n’a pas cédé aux revendications démocratiques. « Il existe à Hong Kong un fort contraste entre une société intégrant de nombreuses valeurs démocratiques, comme la liberté d’association, et ses institutions, contrôlées par Pékin, explique la professeure au Département de science politique de l’UdeM et chercheure en politique comparée au Centre d’études et de recherches internationales, Marie-Ève Reny. Pour réussir à instiller plus de démocratie dans les institutions, le mouvement devrait se redéfinir et avoir un programme plus précis. »
En attendant, certains, à l’instar de Joshua Wong, mettent en place des mouvements, comme le groupe militant étudiant Scolarism, afin d’encourager la participation de la communauté étudiante dans les mobilisations publiques. « Les manifestations étudiantes de Tiananmen sont commémorées de façon annuelle à Hong Kong », souligne d’ailleurs Valentin. À la fin du mois de septembre 2015, à peine quelques centaines de Hongkongais ont commémoré la mobilisation pro-démocrate. D’autres manifestants favorables à Pékin ont également défilé contre cette commémoration.
Coulisses de l’article
À la session d’automne 2015, aucun étudiant n’effectue d’échange à Hong Kong. « Tous les étudiants ont choisi d’y aller à l’hiver prochain », précise la coordonnatrice à la Maison internationale de l’UdeM, Judith Beaulieu.