« Dry January »,« Ocsober »,« 28 jours sans alcool » : pour le directeur général d’Éduc’alcool, Hubert Sacy, ces défis ne sont pas le meilleur moyen pour réguler sa consommation à long terme.
D’après Hubert Sacy, le directeur d’Éduc’alcool, un organisme qui vise à informer la population québécoise sur la modération et à inciter celle-ci, les mois sans alcool ne représentent pas une solution pérenne pour lutter efficacement contre la consommation excessive de boissons alcoolisées.
« Si quelqu’un veut arrêter de boire pendant une journée, une année, une vie entière, c’est correct, explique-t-il. Mais il faut savoir que boire comme un malade pendant 11 mois de l’année pour cesser de boire complètement pendant un mois, ça n’est pas la meilleure façon de faire. »
Pour M. Sacy, ces défis, qui ont graduellement conquis tous les continents depuis la tenue de la première édition du genre en Australie avec « Ocsober », ne sont pas les meilleures façons de développer une relation saine avec l’alcool.
Selon lui, d’autres modes de consommation existent, plus responsables à long terme et moins nocifs pour la santé. « Le modèle idéal est un modèle où l’on respecte systématiquement, à l’année longue, les limites recommandées*, précise-t-il. Il faut mieux ne pas boire d’alcool deux jours par semaine qu’un mois dans l’année. »
La notion de « défi » problématique
Le directeur général considère également que l’appellation « défi » est problématique, car elle stigmatise la consommation excessive de boissons alcoolisées.
« La notion de défi signifie que c’est un geste extraordinaire, exceptionnel et terriblement difficile, de ne pas boire pendant un mois, poursuit-il. Quand on appelle ça “défi” généralisé à toute la population, c’est comme si on laissait entendre que toute la population a des difficultés à arrêter de boire. J’espère que ce n’est pas le cas, car on serait un sacré peuple mal barré ! » M. Sacy reconnaît toutefois que ne pas boire d’alcool pendant un mois peut représenter un défi pour une minorité de personnes, réellement dépendantes.
La consommation stable en pandémie
D’après Éduc’alcool, qui réalise très régulièrement des sondages au Québec, le portrait de la consommation d’alcool des Québécois n’a pas beaucoup changé au cours des huit mois de pandémie. Au total, en novembre dernier, 8 Québécois sur 10 n’ont pas augmenté leur consommation d’alcool (67 %) ou l’ont diminuée (13 %), alors que 2 sur 10 l’ont un peu (17 %) ou beaucoup (3 %) augmentée. En revanche, comparativement à avril et mai 2020, où près de 3 Québécois sur 10 avaient augmenté leur consommation d’alcool pour réduire leur anxiété et leur stress, seuls 17 % sont encore dans ce cas.
La dernière enquête de l’organisme révèle également que 22 % des sondés ont franchi les limites de consommation recommandée au moins deux fois en novembre.
« C’est cet indicateur qui est le plus déterminant, car l’augmentation et la diminution de la consommation en soi ne donnent pas le portrait complet de la situation, détaille M. Sacy. Si une personne qui buvait deux verres par semaine doublait sa consommation, cela ne poserait pas vraiment de problème, puisqu’elle respecterait toujours les limites recommandées. » Le directeur général d’Éduc’alcool ajoute que les chiffres observés sont stables concernant la consommation excessive au Québec.
* Les limites recommandées sont de deux verres d’alcool par jour pour les femmes et trois pour les hommes, avec un maximum hebdomadaire de dix verres par semaine pour les femmes et quinze pour les hommes. Il faut également observer une journée, idéalement deux, sans alcool chaque semaine, régulièrement, et ce, tout au long de l’année.