Le discours du cinéphile

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Par Anh Khoi Do
mercredi 9 février 2011
Le discours du cinéphile

À l’approche de la cérémonie des oscars, qui aura lieu le 27 février prochain, certains sont tout sucre tout miel avec le film The King’s Speech (Le discours du roi) de Tom hooper. Si j’avais pu éclairer le jury des oscar de ma lanterne, ce film n’aurait jamais reçu de nomination pour le meilleur film ni pour son scénario.

Certes, le réalisateur de ce drame prétendument véridique, portant sur le combat du roi britannique George VI contre un problème de bégaiement, sait émouvoir. Même s’il peut être difficile pour un spectateur contemporain de s’identifier à un roi, celui-là se présente comme un personnage attachant en raison des difficultés d’élocution qui l’assaillent. Or, en sélectionnant The King’s Speech, l’Académie des arts et des sciences du cinéma envoie ce message étrange : si votre oeuvre est touchante, on pardonnera la plus évidente manipulation de faits historiques.

Les artisans du film ont-ils inconsciemment omis les détails qui auraient permis à ce récit d’être plus fidèle à l’Histoire ?

Le film ne dit pas un mot sur la conviction qu’avait Édouard VIII, le frère du roi George VI, qu’une alliance entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne avant 1939 aurait permis d’éviter une guerre entre les deux pays. De plus, que dire de cette tactique du scénariste qui suggère que George VI aurait rencontré Lionel Logue, son thérapeute d’élocution, en 1934 plutôt qu’en 1926! George VI était-il vraiment un Jack Bauer de son époque, disposant de si peu de temps pour améliorer son élocution en prévision de sa déclaration de guerre contre l’Allemagne à la radio en 1939?

Bref, en plus de confirmer des nominations non méritées sous prétexte que certains films sont attendrissants, les jurés des Oscar n’ont pas donné, dans le passé, l’Oscar du meilleur film à des joyaux comme Crouching Tiger, Hidden Dragon ou Mystic River. Dire que l’Académie a voulu mettre fin l’année dernière à la grogne générale en permettant à 10 films, soit cinq de plus qu’avant, de pouvoir être nommés pour l’Oscar du meilleur film.